Rapport d'évaluation initiale : La plainte déposée par le Syndicat des Métallos et le Congrès du travail du Canada au sujet des activités de la Société Canadian Tire Limitée et de Mark’s Work Wearhouse Limited, connue sous le nom de L’Équipeur au Québec
Pays : Bangladesh
Numéro de dossier : 220835
Date de réception de la plainte : 21 novembre 2022
Date de publication du rapport : décembre 2024
Table des matières
- À propos de l’OCRE
- Quel est l’objectif de ce rapport?
- Qui sont les parties concernées par la plainte?
- Quel est l’objet de la plainte ?
- Partie 1 – Résumé de l’étape d’admission (ou d’admissibilité)
- Partie 2 – Évaluation initiale
- Partie 3 – Comment traiter la plainte
- Partie 4 – La question d’agir de « bonne foi » dans le processus de plainte
- Partie 5 – Observations présentées par les parties
- Partie 6 – Décision de l’OCRE
À propos de l’OCRE
L’Ombudsman du Canada de la responsabilité des entreprises (OCRE) est un mécanisme de règlement des différends relatifs aux entreprises et aux droits de la personne mis en place par le gouvernement du Canada. Toute personne peut déposer une plainte auprès de l’OCRE concernant d’éventuelles atteintes aux droits de la personne découlant des activités des entreprises canadiennes à l’étranger dans les secteurs du vêtement, des mines ou du pétrole et du gaz.
Quel est l’objectif de ce rapport?
L’OCRE rend compte de l’étape d’évaluation initiale d’une plainte déposée par le Syndicat des Métallos et le Congrès du travail du Canada, le 21 novembre 2022, au sujet des activités de la Société Canadian Tire Limitée et de Mark’s Work Wearhouse Limited.
Conformément à l’article 16 du décret de l’OCRE, les parties ont eu l’occasion de commenter les faits contenus dans le rapport. Un résumé des commentaires reçus figure la partie 5 du rapport.
Qui sont les parties concernées par la plainte?
Les plaignants concernés par le présent rapport sont les suivants :
- Le Syndicat international des travailleurs unis de la métallurgie, du papier et de la foresterie, du caoutchouc, de la fabrication, de l’énergie, des services et des industries connexes (Syndicat des Métallos).
- Le Congrès du travail du Canada (CTC).
Le défendeur est Mark’s Work Wearhouse Limited, connue sous le nom de L’Équipeur au Québec (Mark’s/L’Équipeur), une entreprise canadienne de vêtements. Mark’s/L’Équipeur est une filiale à 100 % de la Société Canadian Tire Limitée (Canadian Tire). Canadian Tire est une société constituée en vertu des lois de l’Ontario par lettres patentes datées du 1er décembre 1927, dont le siège social est situé au 2180, rue Yonge à Toronto.
Quel est l’objet de la plainte ?
Les plaignants allèguent que Mark’s/L’Équipeur fait appel à des fournisseurs ou à des usines de sa chaîne d’approvisionnement au Bangladesh dont les travailleurs, principalement des femmes, ne reçoivent pas un salaire décent.
Les plaignants invitent l’OCRE à déterminer si Mark’s/L’Équipeur et Canadian Tire ont commis des atteintes aux droits de la personne et, dans l’affirmative, à formuler des recommandations (voir la liste ci-dessous) afin de mettre fin aux atteintes présumées aux droits de la personne et de corriger le tort subi.
Pour étayer leurs allégations, les plaignants s’appuient sur le rapport publié en janvier 2021 par le Fonds humanitaire des Métallos (FHM), intitulé Même pas le strict minimum : les salaires de la main-d’œuvre du vêtement au Bangladesh et la responsabilité des marques canadiennes (Rapport du FHM). Le rapport fait état d’entrevues auprès de 35 travailleurs employés dans des usines de fournisseurs de marques canadiennes, dont 2 fournisseurs de vêtements pour Mark’s/L’Équipeur. Ils parlent de leur combat au quotidien en tant que travailleurs du vêtement pour subvenir aux besoins de leur famille et des répercussions des bas salaires qu’ils perçoivent sur tous les aspects de leur vie. Il convient également de mentionner que les chercheurs estiment qu’une grande majorité des travailleurs, entre 60 % et 80 %, dans le secteur du prêt-à-porter sont des femmesNote de bas de page 1.
Le rapport du FHM fournit les noms de deux usines de fournisseurs de Mark’s/L’Équipeur, Patriot Eco Apparel Ltd. et Standard Stitches Ltd., qui ont été identifiées en effectuant des recherches de données sur les expéditions internationales d’importations de vêtements dans les ports américains par le truchement de Panjiva (en anglais seulement), une entreprise spécialisée en gestion de données commerciales. Les plaignants déclarent de plus avoir également recensé par l’entremise de Panjiva plus d’un millier d’expéditions d’une trentaine de fournisseurs provenant du Bangladesh à destination de Mark’s/L’Équipeur.
Les plaignants ont collaboré à un projet de collecte de données appelé Garment Worker Diaries (GWD) (en anglais seulement) afin de recueillir des données probantes sur les salaires versés aux travailleurs dans les usines qui approvisionnent Mark’s/L’Équipeur. GWD a pu répertorier, dans sa base de données, cinq usines utilisées par Mark’s/L’Équipeur pour lesquelles GWD dispose de données sur le salaire des travailleurs. Ils ont conclu que les travailleurs œuvrant dans les usines des fournisseurs de Mark’s/L’Équipeur sont confrontés à un écart entre leur salaire et un salaire décent s’échelonnant entre 45 % et 55 %. Les plaignants mentionnent que les salaires normalisés des travailleurs dans les usines des fournisseurs de Mark’s/L’Équipeur sont environ 10 % plus élevés que les salaires versés dans l’ensemble de l’industrie. Néanmoins, ils affirment que l’écart touchant les salaires décents est considérable. Les plaignants affirment que les salaires dans les usines des fournisseurs de Mark’s/L’Équipeur devraient à tout le moins être deux fois plus élevés afin que les travailleurs bénéficient d’un salaire décent, quel que soit le critère de référence.
De plus, les plaignants ont effectué des recherches sur trois points de référence en matière de salaire décent au Bangladesh : le premier a été élaboré par le Centre for Policy Dialogue (PDF, en anglais seulement), le deuxième, par la Asia Floor Wage Alliance (en anglais seulement), et le troisième, par Garment Worker Diaries (en anglais seulement). Ces trois points de référence mettent en lumière l’éventail de calculs estimatifs sur le salaire décent en fonction des différentes hypothèses prises en compte par les partisans de chacun d’entre eux. Selon les plaignants, les résultats révèlent que les revenus des travailleurs de l’industrie du prêt-à-porter se situent en moyenne bien en deçà de l’un ou l’autre de ces critères de référence.
Les plaignants soulèvent trois autres questions relatives à l’allégation, à savoir : la définition d’un salaire décent, la distinction entre un salaire décent et un salaire minimum, et l’importance de la transparence à l’égard des fournisseurs.
Selon les plaignants, il est crucial de définir la notion de salaire décent pour se conformer de façon significative au droit international des droits de la personne. Ils affirment que selon un vaste consensus international, un salaire décent est un salaire qui permet aux travailleurs et à leurs familles de répondre à leurs besoins fondamentaux, en leur assurant un revenu suffisant pour se nourrir, se loger, se vêtir, s’instruire et acquérir d’autres nécessités de la vie, tout en épargnant pour l’avenir. Ils font référence aux instruments internationaux relatifs aux droits de la personne, ainsi qu’aux définitions décrites par le réseau Clean Clothes Campaign (en anglais seulement) et par la Global Living Wage Coalition (en anglais seulement).
Les plaignants soulignent en outre que le salaire minimum au Bangladesh n’est pas un salaire décent. Les plaignants affirment que les salaires minimums imposés par le gouvernement plongent les travailleurs dans la pauvreté et se réfèrent à un rapport de 2021 Wage theft and pandemic profits : The right to a living wage for garment workers (en anglais seulement), publié par le Centre de ressources sur les entreprises et les droits de l’homme (CREDH), qui écrit : « […] tandis qu’au Bangladesh [le salaire minimum correspond à] un sixième du salaire décent. Le CREDH a constaté que les marques font souvent référence aux lois locales sur le salaire minimum dans leur réponse aux conflits salariaux dans leurs chaînes d’approvisionnement, sans aborder l’inadéquation des mécanismes locaux d’établissement du salaire minimum ou de l’application de ce dernier ». [Traduction]
Enfin, les plaignants mentionnent que le manque de transparence de Canadian Tire à l’égard de ses fournisseurs au Bangladesh est un problème important aux yeux des plaignants. Canadian Tire et ses filiales ne divulguent pas publiquement les renseignements sur les fournisseurs de sa chaîne d’approvisionnement mondiale ni sur le nombre de travailleurs qui sont payés par ces fournisseurs, contrairement à d’autres marques.
Les plaignants demandent à l’OCRE de formuler les recommandations suivantes :
- Que Mark’s/L’Équipeur ou Canadian Tire s’engagent publiquement à garantir un salaire décent à tous les travailleurs de sa chaîne d’approvisionnement mondiale du vêtement;
- Que Mark’s/L’Équipeur ou Canadian Tire modifient leurs politiques, y compris, mais sans s’y limiter, toute politique d’achat ou d’établissement de prix, afin de garantir que les travailleurs de leurs usines de fournisseurs recevront au moins un salaire décent, et qu’ils négocient des mécanismes avec les centrales syndicales indépendantes du Bangladesh afin de faire en sorte que des salaires décents continuent d’être versés dans les usines de fournisseurs;
- Que Mark’s/L’Équipeur ou Canadian Tire divulguent publiquement l’information relative à leur chaîne d’approvisionnement du vêtement, conformément aux exigences de l’Apparel and Footwear Supply Chain Transparency Pledge (en anglais seulement), élaborée par une coalition d’organisations internationales de défense des droits de la personne. Une entreprise qui respecte les normes de cet engagement publiera régulièrement sur son site Web : le nom complet de toutes les usines de fournisseurs, l’adresse des emplacements, la société mère de l’usine, le type de produits fabriqués et le nombre de travailleurs œuvrant à chaque emplacement.
- Que Mark’s/L’Équipeur ou Canadian Tire négocient avec les centrales syndicales indépendantes du Bangladesh représentant les travailleurs du secteur du vêtement et des usines fournissant Mark’s/L’Équipeur et Canadian Tire afin d’offrir une indemnité financière aux travailleurs qui ont reçu un salaire inférieur au salaire décent pour la fabrication de ses vêtements;
- Que Mark’s/L’Équipeur ou Canadian Tire présentent des excuses officielles aux travailleurs des usines qu’ils utilisent dans la fabrication des vêtements pour le rôle qu’ils ont joué en versant à ces travailleurs un salaire inférieur au salaire décent;
- Que l’OCRE assure un suivi régulier des progrès de Mark’s/L’Équipeur ou de Canadian Tire dans la mise en œuvre des recommandations pendant au moins cinq ans, et qu’il publie des rapports de suivi au moins tous les six mois pour rendre compte publiquement des progrès réalisés par Mark’s/L’Équipeur ou Canadian Tire dans la mise en œuvre de chaque recommandation;
- Toute autre recommandation que les plaignants pourraient demander ou que l’OCRE pourrait juger appropriée ou juste.
Partie 1 – Résumé de l’étape d’admission (ou d’admissibilité)
- Le 14 décembre 2022, compte tenu des renseignements fournis par les plaignants, l’ombudsman a conclu que la plainte était recevable en vertu de l’article 6.1 des Procédures opérationnelles ce qui signifie que l’ombudsman a estimé que les renseignements fournis dans la plainte étaient suffisants pour conclure de façon raisonnable que chacun des trois critères de recevabilité applicables était respecté. Il y a peu de conditions à remplir pour qu’une plainte puisse être jugée recevable. Les critères d’admissibilité sont les suivants :
- Le motif de la plainte est une atteinte présumée à un droit de la personne reconnu à l’échelle internationale;
- Les allégations d’atteinte aux droits de la personne découlent des activités à l’étranger d’une entreprise canadienne dans les secteurs du vêtement, des mines ou du pétrole et du gaz;
- Le motif de la plainte aurait eu lieu après le 1ermai 2019 ou, s’il a eu lieu avant le 1er mai 2019, il se poursuit au moment de la plainte (article 5.7 Procédures opérationnelles).
- La décision de l’ombudsman a été transmise par courrier électronique aux plaignants le 16 décembre 2022. Elle a également été expédiée par courrier recommandé à Mark’s/L’Équipeur et à Canadian Tire le 19 décembre 2022, accompagnée d’une copie de la plainte. Cynthia Hill, vice-présidente des affaires juridiques et avocate générale associée de Canadian Tire, a accusé réception de la plainte par courriel le 5 janvier 2023, tant pour Canadian Tire que pour Mark’s/L’Équipeur. Seule Canadian Tire a fourni une réponse en lien avec la plainte et a également répondu au nom de Mark’s/L’Équipeur. Compte tenu de l’accusé de réception de la plainte par Canadian Tire, tant pour Canadian Tire que pour Mark’s/L’Équipeur, le présent rapport fait référence à Canadian Tire à titre de défendeur.
- La plainte est alors passée de la phase de réception à la phase d’évaluation initiale du processus de plainte.
Partie 2 – Évaluation initiale
Renseignements généraux
- L’évaluation initiale est le processus consistant à déterminer la suite à donner dans le cas d’une plainte recevable, y compris la manière de répondre aux objections éventuelles du défendeur. L’ombudsman ne prend pas de décision sur le bienfondé de la plainte à l’étape de l’évaluation initiale.
- Les objectifs du processus d’évaluation initiale sont les suivants :
- Mieux comprendre les positions des parties en ce qui concerne les allégations, y compris les objections éventuelles du défendeur;
- Commencer à cerner les besoins et les intérêts sous-jacents des parties;
- Fournir des renseignements sur le rôle de l’OCRE et les différentes procédures de règlement des litiges;
- Collaborer avec les parties pour déterminer la procédure de règlement des litiges la mieux adaptée pour résoudre les questions soulevées par la plainte, y compris les allégations et les objections éventuelles du défendeur.
- Au cours de l’évaluation initiale, l’OCRE rencontre les parties pour connaître leur point de vue sur les allégations, répondre à leurs préoccupations et questions et solliciter leur consentement à participer à un règlement rapide ou à un processus de médiation. Si les parties refusent de participer à un mécanisme consensuel de règlement des litiges, l’OCRE décide de la suite à donner à la plainte, ce qui peut comprendre l’ouverture d’une enquête.
La procédure d’évaluation initiale dans le cadre de cette plainte
- Durant l’évaluation initiale de cette plainte, l’OCRE a pris les mesures suivantes :
- Examen documentaire de la plainte ainsi qu’une réunion préliminaire avec les plaignants le 1erdécembre 2022.
- Le 23 janvier 2023, l’OCRE a reçu et examiné la réponse initiale du défendeur à la plainte.
- Le 9 février 2023, une réunion d’évaluation initiale a eu lieu en personne avec les représentants du défendeur, ainsi que ses conseillers juridiques, au bureau de l’OCRE.
- Le 10 février 2023, une réunion virtuelle d’évaluation initiale a eu lieu avec les représentants des plaignants. Pendant la réunion, les plaignants ont demandé certains renseignements au défendeur.
- Le 21 février 2023, l’OCRE a envoyé une lettre aux plaignants pour expliquer les divers processus de règlement des différends de l’OCRE.
- Le 3 mars 2023, les plaignants ont réaffirmé leur demande de renseignements supplémentaires au défendeur. Ils se sont également déclarés ouverts à tout processus de règlement des différends.
- Le 7 mars 2023, l’OCRE a envoyé au défendeur une lettre de suivi de l’évaluation initiale qui comprenait diverses options pour un processus de règlement des différends, ainsi que la demande d’information formulée par les plaignants.
- Le défendeur a demandé une prolongation jusqu’à la semaine du 27 mars 2023 pour répondre à la lettre de suivi de l’OCRE, ce qui lui a été accordé. Le 31 mars 2023, le défendeur a transmis sa réponse à l’OCRE, y compris un exposé des faits et sa position sur la demande d’information des plaignants.
- Le 1ermai 2023, l’OCRE a envoyé une lettre aux plaignants les informant du refus du défendeur de fournir les renseignements demandés et du fait que le défendeur a soulevé la question de la bonne foi des plaignants.
- Le 1ermai 2023, le défendeur et les plaignants ont été informés que l’OCRE allait entreprendre la rédaction du rapport d’évaluation initiale.
Ce que les plaignants ont rapporté à l’OCRE
- Au cours de la réunion d’évaluation initiale du 10 février 2023, les plaignants ont répété leur demande de réparation et développé plusieurs arguments avancés dans la plainte, et ont communiqué les renseignements supplémentaires qui suivent.
- Les plaignants affirment que les entreprises font souvent valoir qu’il existe une « relation juridique distincte » entre le fournisseur et le distributeur, de sorte qu’elles n’ont pas leur mot à dire sur les salaires versés. Les plaignants estiment qu’un tel argument ne devrait pas être autorisé pour justifier une atteinte aux droits de la personne. Les plaignants affirment que si les distributeurs peuvent négocier les conditions de contrats commerciaux complexes qui exigent que les produits soient fabriqués d’une certaine manière, les entreprises peuvent, elles aussi, négocier des engagements en matière de salaire décent avec les entreprises de fabrication et de production.
- En ce qui concerne le salaire décent, les plaignants ont déclaré qu’ils ne connaissaient pas d’autres marques qui versent un salaire décent au Bangladesh, mais ils ont proposé de créer une initiative multipartite dans le cadre de laquelle les entreprises pourraient jouer un rôle de chef de file dans le versement d’un salaire décent. Par exemple, l’Accord international sur la santé et la sécurité dans l’industrie du textile et de la confection (en anglais seulement) fixe des normes supérieures aux exigences nationales dans le secteur du vêtement. Les plaignants ont également mentionné la possibilité de négocier un accord-cadre international (ACI) entre une entreprise multinationale et un syndicat mondial.
- Il a été mentionné que certains avantages ne sont offerts aux travailleurs que le jour de l’audit de l’usine. En outre, les avantages ne sont pas uniformisés et leur étendue n’est pas déterminable.
- Les plaignants ont tenu à souligner l’importance de la transparence des pratiques d’approvisionnement de l’entreprise pour déterminer les prochaines étapes, car la collecte de données est difficile et les plaignants doivent s’en remettre à des données accessibles au public. Si l’entreprise ne dispose pas de données et de rapports accessibles au public, il est très difficile d’examiner l’information, de vérifier les affirmations, d’évaluer les lacunes et de trouver des possibilités d’amélioration. En outre, les plaignants affirment que la question de la transparence est essentielle pour aider à trouver des solutions viables. Par exemple, pour réduire l’écart massif entre les profits des entreprises et les salaires des travailleurs, il importe de discuter de la question du partage équitable du profit et de rendre publiques les marges bénéficiaires.
- Les plaignants ont demandé les renseignements suivants au défendeur :
- Le nom et l’emplacement de toutes les usines auxquelles il a recours à l’heure actuelle ou eu recours entre 2019 et aujourd’hui pour fabriquer des vêtements au Bangladesh;
- Les grilles salariales des usines précitées montrant la rémunération des travailleurs dans chaque poste et dans chaque usine;
- Toute condition contractuelle dans les contrats entre Canadian Tire et les usines exigeant que les usines versent certains salaires à leurs travailleurs.
Réponse de Canadian Tire à l’OCRE
- Le défendeur a fourni une réponse initiale à la plainte le 23 janvier 2023 et a assisté à une réunion d’évaluation initiale avec l’OCRE le 9 février 2023. En outre, le 31 mars 2023, le défendeur a fourni une réponse écrite à la plainte qui comprenait un exposé des faits. Ce qui suit résume les réponses du défendeur à la plainte.
- Le défendeur a demandé à l’OCRE de ne pas donner suite à la plainte pour les raisons suivantes :
- Le manque de bonne foi dont ont fait preuve les plaignants a irrémédiablement compromis le caractère équitable de l’ensemble du processus de l’OCRE;
- La plainte est sans fondement et le défendeur est en profond désaccord avec toutes les allégations contenues dans la plainte.
- Le défendeur a également refusé de fournir l’information demandée par les plaignants (voir la liste au paragraphe 13).
- Selon le défendeur, le recours au processus de l’OCRE pour demander la divulgation de ces renseignements est inapproprié, particulièrement en ce qui concerne les grilles salariales qui n’appartiennent pas à Canadian Tire et qui sont des renseignements commerciaux confidentiels de leurs fournisseurs. L’entreprise a expliqué que ses contrats avec les usines de ses fournisseurs sont assujettis à des conditions de confidentialité qui interdisent une telle divulgation.
- Toutefois, en ce qui concerne la demande de noms et d’emplacements de toutes les usines utilisées par Canadian Tire et Mark’s/L’Équipeur, le défendeur envisage actuellement de publier ces renseignements sur son site Web dans le cadre de son processus de reddition périodique sur les questions environnementales, sociales et de gouvernance (ESG).
- Le défendeur a exprimé son engagement permanent à l’égard des normes ESG et il est fermement d’avis que ses normes et ses pratiques d’approvisionnement éthique cadrent avec les pratiques exemplaires de l’industrie et les normes internationales établies en matière de droits de la personne.
- Le Code d’éthique professionnelle à l’intention des fournisseurs de Canadian Tire exige que les partenaires potentiels fassent l’objet d’une vérification préalable par l’équipe d’approvisionnement afin de s’assurer qu’ils respectent les normes d’approvisionnement éthique et qu’ils sont conformes. Après l’acceptation d’un fournisseur, des vérifications permanentes sont effectuées dans les usines pour s’assurer que le fournisseur et ses installations respectent pleinement le code de conduite de la Business Social Compliance Initiative, reconnu à l’échelle internationale. Dans le cadre de ses activités visant à garantir la conformité, le défendeur assure un suivi régulier des grilles salariales et travaille avec des tiers indépendants réputés pour auditer les usines qui fabriquent les produits des marques qu’il possède.
- Le défendeur a mentionné qu’étant donné qu’il n’exploite aucune usine et n’emploie aucun travailleur en usine au Bangladesh, sa capacité à exercer une influence sur les fournisseurs est limitée. Le défendeur a également mentionné qu’il employait 30 travailleurs de terrain à temps plein à Dhaka et à Chittagong, qui sont chargés de l’approvisionnement, de l’assurance qualité des produits et de la surveillance permanente des conditions de travail dans les usines de ses fournisseurs.
- Sur la question du salaire minimum, le défendeur a déclaré que ses usines partenaires au Bangladesh respectent la réglementation bangladaise en matière de salaire minimum et versent en moyenne aux employés des salaires plus élevés que ceux des autres usines du Bangladesh. Le défendeur a également fait remarquer que les plaignants admettent que les salaires normalisés gagnés par les travailleurs dans les usines des fournisseurs de Mark’s/L’Équipeur au Bangladesh sont environ 10 % plus élevés que les salaires gagnés dans l’ensemble de l’industrie.
- Le défendeur a expliqué que la notion de salaire décent devrait englober les avantages sociaux et les services supplémentaires fournis par les partenaires d’affaires, notamment les soins de santé sur place, les repas, le service de garde d’enfants, l’assurance maladie, les congés de maternité payés, les congés de maladie payés, les primes d’assiduité, les allocations familiales, le transport à destination et en provenance des installations de l’usine et les vêtements saisonniers.
- Le défendeur a fait remarquer que la notion de salaire décent reste une aspiration et fait appel à une analyse quantitative qui tient compte de facteurs propres à chaque société et à chaque localité. Selon le Pacte mondial des Nations Unies, il n’existe pas de définition universellement acceptée d’un salaire décent en tant que concept ni de montant monétaire universellement accepté pour définir une telle rémunération. Pour évaluer correctement ce qui constitue un salaire décent et obliger les usines des fournisseurs à se conformer à une norme définie, il faut faire appel à une expertise internationale, nationale et locale importante. Il s’agit d’une question complexe qui nécessite des analyses par un certain nombre d’experts en la matière, y compris des spécialistes de l’économie appliquée et de l’économie du développement. Même dans les économies avancées comme le Canada, où le revenu moyen est beaucoup plus élevé, l’aspiration à un salaire adéquat n’est pas toujours réalisée. Selon le défendeur, cette question complexe ne peut être résolue au moyen du processus de plainte de l’OCRE, en particulier lorsque la plainte vise une entreprise individuelle qui, en tout état de cause, n’a ni le pouvoir ni la capacité de trancher la question.
- Sur la question de la bonne foi dans le processus de plainte, le défendeur affirme que les plaignants ne sont pas de bonne foi parce qu’ils ont organisé une conférence de presse pour faire connaître leur plainte avant que le défendeur ne l’ait reçue. En outre, lors de la conférence de presse, ils ont erronément présenté certaines de leurs allégations comme des faits, alors qu’ils ne disposent d’aucun fondement probant pour étayer ces allégations.
- Le défendeur a déclaré qu’en faisant des commentaires publics, au stade où l’OCRE est chargé de déterminer la recevabilité de la plainte, et avant qu’il n’ait reçu la plainte proprement dite, les actions des plaignants ont porté atteinte à l’intégrité du processus en tentant d’exercer une pression publique sur l’OCRE pour qu’il accepte leur plainte. Le défendeur a fait référence aux procédures opérationnelles de l’OCRE et à la Note d’information sur la vie privée et la confidentialité (Note d’information) concernant l’obligation des parties d’agir de bonne foi dans le cadre du processus de traitement des plaintes.
- En outre, le défendeur a également estimé que le fait de demander des renseignements supplémentaires (voir la liste au paragraphe 13) dans le cadre du processus de règlement rapide des différends constitue un abus de procédure et une preuve supplémentaire de mauvaise foi de la part des plaignants.
Partie 3 – Comment traiter la plainte
- L’ombudsman doit décider de la suite à donner à la plainte et peut:
- fermer le dossier : l’ombudsman peut décider de ne pas donner suite à la plainte et fermer le dossier après avoir publié le présent rapport conformément au paragraphe 14(2) du décret;
- proposer une médiation aux parties : avec l’accord des deux parties, l’ombudsman peut décider que la médiation est le processus consensuel de règlement des différends le plus approprié;
- mener une enquête sur la base d’une recherche indépendante des faits : l’ombudsman peut décider d’enquêter sur la plainte en procédant à une recherche indépendante des faits, conformément à l’alinéa 7b) du décret.
- Au moment de déterminer s’il y a lieu d’ouvrir une enquête, l’ombudsman prend en considération le contexte général de la plainte et les facteurs pertinents, notamment la question de savoir si :
- la plainte est frivole ou vexatoire;
- la plainte est en cours d’examen ou a été examinée par une autre instance;
- l’entreprise canadienne a déjà fourni une réponse ou une réparation satisfaisante à l’égard des allégations formulées dans la plainte;
- des renseignements pertinents sont susceptibles d’être disponibles;
- un recours efficace est susceptible d’être disponible;
- une enquête est susceptible d’entraîner un risque inacceptable pour le plaignant ou pour d’autres personnes.
- La coopération de l’entreprise canadienne citée dans une plainte n’est pas déterminante pour établir si des renseignements pertinents sont susceptibles d’être disponibles. L’OCRE peut prendre en considération la disponibilité des renseignements provenant de toutes les sources raisonnablement accessibles. En outre, dans tout rapport final, l’OCRE peut faire des observations sur l’incidence de la coopération des parties sur la disponibilité des renseignements et d’autres aspects de l’enquête.
- Pour déterminer si une réparation acceptable ou efficace est vraisemblablement possible en l’espèce, l’ombudsman examinera les mesures correctives envisageables et les personnes qui pourraient être en mesure de les fournir.
Analyse
- À première vue, la plainte soulève de sérieuses questions concernant le droit à un salaire décent visé aux articles 23, 24 et 25 de la Déclaration universelle des droits de l’homme (DUDH) et aux articles 7 et 11 du Pacte international relatif aux droits économiques, sociaux et culturels (PIDESC). En analysant la présente plainte, l’OCRE semble considérer qu’il y a trois questions principales liées aux allégations qui concernent les commentaires des deux parties, à savoir : la question de la transparence des fournisseurs, la question de la définition d’un salaire décent et la question de la négociation des contrats avec les fournisseurs.
Transparence entourant les fournisseurs
- Afin de déterminer si les fournisseurs du défendeur au Bangladesh versent un salaire décent aux ouvriers d’usine, il serait essentiel de disposer de données correctes provenant de la source. Dans le cas où le défendeur refuserait de communiquer ces renseignements, une enquête pourrait, par exemple, permettre à l’OCRE de recueillir des renseignements sur les salaires versés, les avantages sociaux et les services offerts, ainsi que de vérifier si certaines conditions de travail sont respectées (c’est-à-dire le nombre maximal d’heures de travail, le repos et les loisirs, etc.).
- Les plaignants ont déclaré que la collecte de données était difficile et que, pour entreprendre correctement les prochaines étapes, le défendeur doit rendre publics les données et les rapports afin que les plaignants puissent examiner les renseignements, vérifier les affirmations, évaluer les lacunes et trouver des possibilités d’amélioration. Les plaignants ont indiqué que la question de la transparence est essentielle pour contribuer à l’élaboration de solutions viables.
- Au cours de la réunion d’évaluation initiale, les plaignants ont demandé au défendeur de leur fournir des documents relatifs aux grilles salariales, ainsi que les noms et les emplacements de toutes les usines utilisées par Canadian Tire et Mark’s/L’Équipeur au Bangladesh. Le défendeur a jugé cette demande inappropriée dans le cadre du processus de plainte de l’OCRE, en particulier en ce qui concerne les grilles salariales, car il s’agit d’information commerciale confidentielle concernant les usines de ses fournisseurs. Toutefois, le défendeur a mentionné que, dans le cadre de son processus de reddition périodique sur les questions ESG, il envisageait de divulguer les noms et les emplacements de toutes les usines qu’il utilise.
- L’OCRE fait remarquer que, sur les trois demandes de renseignements formulées par les plaignants, il semble possible de parvenir à un accord sur la demande concernant la divulgation des noms et des emplacements de toutes les usines utilisées par le défendeur au Bangladesh. Il mentionne également que le défendeur n’a pas répondu directement à la demande concernant l’existence de clauses contractuelles dans les contrats entre Canadian Tire et les usines qui exigent que les usines paient certains salaires à leurs travailleurs.
- Dans le cas présent, des renseignements sur les salaires seraient nécessaires pour évaluer la manière dont le défendeur traite le droit à un salaire décent, qui est prétendument en cause. Selon l’article 21 des Principes directeurs des Nations Unies relatifs aux entreprises et aux droits de l’homme (Principes directeurs des Nations Unies) (PDF), les entreprises devraient être prêtes à communiquer à l’extérieur la manière dont elles gèrent leurs répercussions sur les droits de la personne. Cela comprend la fourniture de renseignements suffisants pour évaluer la pertinence de la réponse d’une entreprise par rapport à l’incidence sur les droits de la personne concernés.
Définition d’un salaire décent
- Pour les plaignants, il est crucial de s’entendre sur la définition d’un salaire décent pour parvenir à respecter véritablement les normes internationales relatives aux droits de la personne. Ils affirment également qu’il existe un large consensus international sur le fait qu’un salaire décent est un salaire qui permet aux travailleurs et à leurs familles de répondre à leurs besoins fondamentaux, en leur assurant un revenu suffisant pour se nourrir, se loger, se vêtir, s’instruire et acquérir d’autres nécessités de la vie, tout en épargnant pour l’avenir. La plainte utilise trois points de référence différents pour mettre en évidence les estimations du niveau de vie. Les plaignants font également référence aux instruments internationaux relatifs aux droits de la personne, ainsi qu’aux définitions décrites par le réseau Clean Clothes Campaign (en anglais seulement) et la Global Living Wage Coalition (en anglais seulement)
- Pour le défendeur, le concept de salaire décent reste une aspiration et suppose une analyse quantitative des facteurs sociaux et locaux particuliers. Il affirme que la question est complexe et qu’elle ne peut être résolue au moyen du processus de plainte de l’OCRE et en ciblant une entreprise en particulier. Il fait référence au Pacte mondial des Nations Unies, qui affirme qu’il n’existe pas de définition universellement acceptée d’un salaire décent en tant que concept ni de montant monétaire universellement accepté pour définir une telle rémunération.
- Toutefois, le reste du texte du Pacte mondial se lit comme suit : «l’absence de consensus ne constitue pas un prétexte à l’inaction. Il est important de noter qu’il existe un large consensus sur ce qui constitue un salaire décent : c’est un salaire qui permet aux travailleurs et à leurs familles de répondre à leurs besoins fondamentaux » [traduction]. Les instruments internationaux, tels que l’article 25 de la DUDH, affirment : « Toute personne a droit à un niveau de vie suffisant pour assurer sa santé, son bien-être et ceux de sa famille, notamment pour l’alimentation, l’habillement, le logement, les soins médicaux ainsi que pour les services sociaux nécessaires; elle a droit à la sécurité en cas de chômage, de maladie, d’invalidité, de veuvage, de vieillesse ou dans les autres cas de perte de ses moyens de subsistance par suite de circonstances indépendantes de sa volonté ». De plus les articles 7a) ii) et 11 du PIDESC définissent un niveau de vie suffisant.
- De nombreux instruments et documents internationaux, tels que le Pacte mondial des Nations Unies, ainsi que les organisations précitées, définissent un salaire décent. Si l’ombudsman décide d’ouvrir une enquête, il pourrait être souhaitable d’élaborer une liste de critères permettant de définir un salaire décent au Bangladesh aux fins de la présente plainte.
- Le défendeur affirme qu’il se conforme aux lois nationales en matière de salaire minimum. Toutefois, les plaignants déclarent que le salaire minimum au Bangladesh n’est pas un salaire décent et que le respect du salaire minimum local ne devrait pas être utilisé pour soutenir une atteinte aux droits de la personne, telle que la violation du droit à un salaire décent. Il est dit que l’inadéquation des mécanismes locaux d’établissement du salaire minimum doit être prise en compte. Il semble que les positions divergent sur la question de savoir si le versement d’un salaire minimum au Bangladesh constituerait une atteinte aux droits de la personne. Une telle détermination peut justifier une enquête sur la question. Il pourrait être nécessaire d’en tenir compte dans le cadre de l’évaluation de la définition d’un salaire décent.
- Le défendeur a déclaré que ses partenaires commerciaux fournissaient des avantages sociaux et des services supplémentaires (soins de santé sur place, repas, garderie, etc.) qui devraient être compris dans les facteurs relatifs au salaire décent. Comme il a été mentionné précédemment, les avantages sociaux et les services peuvent être compris dans la liste des critères de détermination d’un salaire décent. Les plaignants ont indiqué que certains avantages sociaux et services offerts aux travailleurs ne sont fournis que le jour de l’audit de l’usine. Les avantages sociaux ne sont pas uniformisés et leur étendue n’est pas déterminable. Sur ce point, une enquête pourrait examiner cette divergence en vérifiant si les avantages sociaux et les services sont systématiquement offerts aux travailleurs dans les usines des fournisseurs du défendeur au Bangladesh.
Négociation de contrats avec les fournisseurs
- Le défendeur a déclaré que sa capacité à exercer une influence sur les fournisseurs est limitée dans la mesure où il n’exploite aucune usine et n’emploie aucun travailleur en usine au Bangladesh. D’autre part, les plaignants affirment que si les distributeurs sont en mesure de négocier des contrats commerciaux complexes, il leur est également possible de négocier des engagements en matière de salaire décent avec les entreprises de fabrication et de production.
- Sur cette question, l’OCRE fait allusion aux articles 11, 12 et 13 des Principes directeurs des Nations Unies (PDF) portant sur la responsabilité des entreprises en matière de respect des droits de la personne. Plus précisément, l’article 13 stipule que « la responsabilité de respecter les droits de l’homme exige des entreprises : b) qu’elles s’efforcent de prévenir ou d’atténuer les incidences négatives sur les droits de l’homme qui sont directement liées à leurs activités, produits ou services par leurs relations commerciales, même si elles n’ont pas contribué à ces incidences ». En outre, les Principes directeurs de l’OCDE à l’intention des entreprises multinationales sur la conduite responsable des entreprises (Principes directeurs de l’OCDE) (section IV. Droits humains, paragraphes 37 et 38 du commentaire)Note de bas de page 2 affirment que « le respect des droits humains est la norme mondiale de conduite attendue des entreprises, indépendamment de la capacité et/ou de la volonté des États de satisfaire à leurs obligations en la matière, et ne saurait atténuer ces obligations ». De plus, « le fait qu’un État n’applique pas sa législation nationale pertinente ou ne respecte pas ses obligations internationales en matière de droits humains, ou qu’il puisse enfreindre cette législation ou ces obligations internationales est sans effet sur la responsabilité des entreprises de respecter les droits humains ».
- Le défendeur affirme qu’il n’exerce qu’une influence limitée sur le mode de fonctionnement de ses fournisseurs. Selon les Principes directeurs des Nations Unies et de l’OCDE, une entreprise a l’obligation de prévenir ou d’atténuer les incidences négatives sur les droits de la personne, telles que l’absence de salaire décent, qui sont liées à ses activités, même si elle n’a pas contribué à ces incidences. Le défendeur n’a pas communiqué d’information concernant l’existence, dans ses contrats avec les fournisseurs, de clauses susceptibles d’intégrer un engagement à verser un salaire décent aux travailleurs. Une enquête pourrait se pencher sur cette question.
Partie 4 – La question d’agir de « bonne foi » dans le processus de plainte
- Comme il a été précisé ci-dessus aux paragraphes 25 à 27, selon le défendeur, la publication de la plainte avant que le défendeur ne la reçoive a porté atteinte à l’intégrité du processus en tentant d’exercer une pression publique sur l’OCRE pour qu’il accepte leur plainte. Le défendeur affirme que le manque de bonne foi dont ont fait preuve les plaignants a irrémédiablement compromis le caractère équitable du processus de l’OCRE dans son entièreté. En outre, le défendeur considère également que le fait de formuler des « demandes » d’information supplémentaires (voir la liste au paragraphe 13) dans le cadre du processus de règlement rapide des différends constitue un abus de procédure et une preuve supplémentaire de mauvaise foi de la part des plaignants.
- L’article 12 des Procédures opérationnelles de l’OCRE porte sur l’exigence pour les parties d’agir de bonne foi. Plus précisément, l’article 12.2 stipule que « l’obligation d’agir de bonne foi comprend l’obligation de préserver la confidentialité des informations personnelles et commerciales sensibles, de respecter les exigences de confidentialité liées au MRDP, et de s’abstenir de fournir de fausses informations à l’OCRE et de faire des fausses représentations sur le processus ».
- Dans la Note d’information dans le processus de plainte de l’OCRE communiquée aux deux parties, l’article 4 stipule que :
- « L’obligation pour les parties et leurs représentants d’agir de bonne foi au cours du processus de traitement des plaintes comprend le fait de ne pas divulguer publiquement d’informations ou de documents qui portent atteinte à l’intégrité du processus de traitement des plaintes.
- La divulgation publique par une partie d’informations ou de documents déjà en sa possession ne constitue pas, en soi, une preuve de mauvaise foi de sa part. »
- La Note d’information énumère les facteurs à prendre en compte pour déterminer si la divulgation publique d’information ou de documents a porté atteinte à l’intégrité du processus de plainte. Ces facteurs sont les suivants :
- si la divulgation était accidentelle ou intentionnelle;
- si les informations divulguées sont des renseignements personnels;
- si les informations divulguées sont protégées par un accord de confidentialité;
- si la divulgation a compromis l’équité du processus de traitement des plaintes;
- si la divulgation a fait ou est susceptible de faire augmenter le risque de représailles.
- Selon OECD Watch, les parties peuvent faire campagne pendant la procédure de traitement de la plainte tout en respectant les règles applicables en matière de confidentialité, bien que « certains Points de contact nationaux (PCN) considèrent que le fait de mener une campagne pendant une plainte est une violation de la confidentialité ou de la bonne foi, et peuvent rejeter une plainte si les plaignants communiquent quoi que ce soit publiquement à cet égardNote de bas de page 3» [traduction]. Comme l’indique succinctement une publication d’OECD Watch, les campagnes pourraient être nécessaires, étant donné qu’elles corrigent le « déséquilibre des forces en défaveur des plaignants, en incitant l’entreprise à agir pour protéger sa réputationNote de bas de page 4» [traduction]. Mais comme le note OECD Watch, un plaignant doit décider s’il doit procéder à une plainte et à une campagne et de quelle manière, à la lumière des exigences de transparence ou de confidentialitéNote de bas de page 5. Essentiellement, OECD Watch estime que l’existence d’une campagne n’est pas pertinente pour déterminer le bien-fondé d’une plainteNote de bas de page 6.
- En outre, les tribunaux des droits de la personne au Canada ont pris des décisions concernant la publication d’une plainte au cours de la procédure d’audition. Par exemple, dans l’affaire Murugesan c. CIBC Mortgages IncNote de bas de page 7, le tribunal a décidé que la règle concernant la confidentialité des documents ne s’appliquait pas aux plaidoiries, mais seulement aux documents divulgués au cours de la procédure. De même, dans l’affaire Avolonto c. York UniversityNote de bas de page 8, où le requérant a rendu publiques ses allégations et fourni des copies de certains dossiers ou de l’ensemble de ses dossiers aux médias, le Tribunal des droits de la personne de l’Ontario a statué que ses règles de procédure ne s’appliquent qu’aux documents divulgués au cours de l’instance et ne s’appliquent pas à la diffusion d’une demande ou des allégations qu’elle contient, par un requérant.
- Les principes suivants peuvent être tirés des publications précitées d’OECD Watch et des décisions des tribunaux des droits de la personne :
- Il n’est pas interdit aux parties de faire connaître leurs actes de procédure (par exemple une plainte ou une réponse à une plainte);
- Les règles interdisant les campagnes ne s’appliquent qu’aux documents divulgués au cours de la procédure, et non aux actes de procédure, y compris les plaintes;
- L’existence d’une campagne n’est pas pertinente pour déterminer le bien-fondé d’une plainte.
- En ce qui concerne la question de savoir si les « demandes » d’information supplémentaire (voir la liste au paragraphe 13) dans le cadre du processus de règlement rapide des différends constituent un abus de procédure et une nouvelle preuve de mauvaise foi de la part des plaignants, l’examen des points suivants peut être important.
- En tant qu’ombudsman, l’une des principales fonctions de l’OCRE lors de l’évaluation initiale est de faciliter l’échange d’information entre les parties. Cet échange peut contribuer à un règlement rapide.
- Les renseignements demandés par l’une des parties doivent être pertinents par rapport à l’allégation. En outre, il doit y avoir un motif raisonnable de croire que les renseignements demandés peuvent contribuer au règlement de la plainte.
- Dans le cas des renseignements commerciaux de nature confidentielle, l’OCRE peut proposer des options pour protéger ces derniers au cours d’une évaluation initiale, par exemple au moyen d’un accord de non-divulgation. Les parties peuvent également choisir de procéder à une médiation et de protéger la confidentialité au moyen d’un accord de médiation ainsi que par le privilège rattaché à la médiation.
- Il importe de préciser que l’une des trois demandes de renseignements complémentaires (les noms et les emplacements des usines utilisées par Canadian Tire et Mark’s/L’Équipeur) pourrait être rendue publique sur le site Web de Canadian Tire dans le cadre de son processus de reddition périodique sur les questions ESG. Au moment de la rédaction du présent rapport, aucune autre mise à jour n’a été fournie par le défendeur.
Partie 5 – Observations présentées par les parties
Observations des plaignants
- En résumé, les plaignants soulèvent trois observations en réponse à la version préliminaire du rapport d’évaluation initiale (Rapport) :
- qu’ils ont participé de bonne foi au processus de l’OCRE;
- qu’il est approprié pour l’OCRE d’examiner la question du salaire décent;
- que la question du contrôle exercé par le défendeur sur ses fournisseurs et/ou de ses obligations en matière de droits de la personne en ce qui concerne les activités de ses fournisseurs doit faire l’objet d’une enquête de la part de l’OCRE.
- Les plaignants demandent à l’OCRE de constater qu’ils ont participé de bonne foi au processus de l’OCRE, et d’ouvrir une enquête sur les allégations soulevées dans la plainte.
La question de la « bonne foi » dans le processus de traitement des plaintes
- En réponse à l’allégation du défendeur selon laquelle les plaignants n’ont pas agi de bonne foi, les plaignants ont répondu comme suit :
a. Les plaignants croient que la publication de la plainte ne constitue pas une participation de mauvaise foi, et qu’elle ne compromet pas l’équité du processus de l’OCRE.
- Les plaignants se réfèrent à l’analyse de l’OCRE aux paragr. 51 à 53. Ils déclarent également que la plainte ne contient que des renseignements non confidentiels accessibles au public, qu’elle ne contient aucun renseignement commercial sur le défendeur qui ne soit pas accessible au public, et qu’elle ne contient aucun renseignement nominatif d’une personne travaillant dans le secteur du vêtement au Bangladesh. Les données du projet GWD étaient les seules données non accessibles au public en ligne, mais elles ont été recueillies auprès de travailleurs qui ont volontairement communiqué ces renseignements; par conséquent, selon les plaignants, il ne s’agit pas de données protégées.
- Les plaignants estiment que la question est de savoir s’ils ont agi de mauvaise foi lorsqu’ils ont communiqué des renseignements largement accessibles au public qu’ils avaient compilés sur le défendeur. Ils estiment qu’ils n’ont enfreint ni règle ni procédure de l’OCRE en publiant la plainte. Deuxièmement, les plaignants estiment que le fait de les empêcher de rendre publics les renseignements contenus dans la plainte irait à l’encontre de la vision de l’OCRE d’un processus transparent.
b. Les plaignants croient qu’ils ont toujours respecté les règles et les procédures de l’OCRE.
- Les plaignants estiment que ni règle ni procédure de l’OCRE ne les empêche de rendre leur plainte publique. Ils se réfèrent à l’article 12 des Procédures opérationnelles de l’OCRE concernant l’obligation d’agir de bonne foi, et estiment avoir respecté toutes les exigences de cet article.
- Tout d’abord, selon les plaignants, la plainte ne contenait ni renseignement nominatif confidentiel ni renseignement commercial confidentiel. Deuxièmement, les plaignants n’ont ni divulgué ni communiqué des renseignements après la publication de la plainte, et ont participé pleinement et de bonne foi au processus de l’OCRE. Les plaignants estiment qu’ils n’ont pas fourni de faux renseignements à l’OCRE, et qu’ils n’ont pas non plus déformé publiquement le processus de l’OCRE.
- Les plaignants mentionnent également une deuxième source d’orientation sur le traitement des renseignements confidentiels, soit la Note d’information. Ils ont reçu ce document dans un courriel de l’OCRE envoyé le 10 février 2023, et ne savent pas s’il a été publié sur le site Web avant le dépôt de leur plainte, le 21 novembre 2022. Les plaignants affirment qu’aucune disposition de la Note d’information n’empêche la publication d’une plainte déposée par un plaignant. L’article 3 de la Note d’information aborde la question de la confidentialité dans le cadre du processus de traitement des plaintes de l’OCRE, et ne concerne que les documents confidentiels.
- Selon les plaignants, l’article 5 de la Note d’information ne concerne que la divulgation de renseignements ou de documents confidentiels, et non pas simplement tout renseignement ou tout document dont dispose l’OCRE. Même si l’OCRE décide d’appliquer l’article 5 de la Note d’information à la divulgation de la plainte, les plaignants estiment que l’évaluation des facteurs pèse lourdement en faveur de la poursuite de la plainte.
- L’article 5 de la Note d’information énumère cinq facteurs concernant les divulgations publiques (voir le paragr. 50). Le plaignant estime que la divulgation de la plainte ne contenait ni renseignement personnel ni renseignement protégé par une entente de confidentialité. Il n’y a pas de risque de représailles, car la plainte a été soigneusement rédigée de manière à protéger les partenaires au Bangladesh. Les plaignants ne sont pas d’accord avec le défendeur, qui prétend que la publication de la plainte a porté atteinte à l’intégrité du processus en tentant d’exercer une pression publique sur l’OCRE pour qu’il accepte la plainte. Les plaignants estiment que l’OCRE est une tierce partie indépendante et impartiale, et qu’une telle allégation est infondée et inappropriée.
- Les plaignants se réfèrent au paragr. 52, et ajoutent ce qui suit : « La Cour supérieure de justice de l’Ontario a estimé que le principe de la publicité des débats s’appliquait à la fois aux cours et aux tribunaux administratifsNote de bas de page 9. Bien que l’OCRE ne soit ni une cour ni un tribunal administratif, il leur est analogue en ce sens qu’il s’agit d’une tierce partie impartiale et qu’à l’image d’une cour ou d’un tribunal administratif, l’OCRE peut prendre des décisions impartiales, même lorsqu’il enquête sur une question qui est sur la scène publique » [traduction].
- Les plaignants reconnaissent que la confidentialité peut protéger le processus de l’OCRE à certaines étapes d’une plainte, mais ils affirment qu’il serait contraire à la vision et à l’objectif de l’OCRE d’imposer la confidentialité de tous les documents comme choix par défaut. Ils soulignent qu’afin de favoriser un processus transparent et responsable, la confidentialité devrait être appliquée de manière limitée aux documents qui contiennent des renseignements personnels et professionnels qui sont confidentiels.
- Les plaignants se réfèrent à OECD Watch qui, comme cela est indiqué ci-dessus (voir le paragr. 53), mentionne que les plaignants devraient être autorisés à faire campagne parallèlement à un processus de traitement des plaintes, et qu’une telle activité ne devrait pas être considérée comme de la mauvaise foi dans le processus de traitement des plaintes.
c. Les plaignants estiment qu’ils n’ont pas agi de mauvaise foi en demandant des documents au défendeur.
- Ils déclarent que la demande a été faite de bonne foi, en réponse directe à une demande de l’OCRE. Les plaignants ont rencontré l’OCRE le 10 février 2023 pour discuter de la plainte. Au cours de la réunion, l’OCRE a demandé aux plaignants quels étaient les documents qui, selon eux, leur étaient nécessaires pour évaluer la plainte. En réponse à l’enquête de l’OCRE, les plaignants ont rassemblé une longue liste de documents pertinents (voir le paragr. 13).
- Selon les plaignants, les renseignements demandés sont très pertinents pour la plainte; ils concernent directement la question des salaires versés aux travailleurs qui fabriquent des vêtements pour le défendeur. Ils précisent qu’ils n’ont pas cherché à avoir accès à l’intégralité des contrats, mais uniquement aux clauses contractuelles relatives aux salaires des travailleurs. En outre, ils n’ont pas connaissance des contrats conclus par le défendeur avec les usines des fournisseurs, et ne savaient pas non plus que les dispositions de ces contrats étaient confidentielles jusqu’à ce qu’il en soit fait mention au paragr. 17.
- Ils estiment également qu’il existe des raisons d’ordre politique pour lesquelles l’OCRE devrait rejeter l’allégation de mauvaise foi. Si la demande d’information des plaignants constitue un acte de mauvaise foi dans son processus, cela aurait un effet dissuasif significatif sur la participation des plaignants aux processus de l’OCRE dans leur ensemble. Ils estiment que les demandes de documents et la communication de renseignements font partie intégrante de tout processus juridictionnel ou d’ombudsman.
- Ils se réfèrent également au paragr. 57, où l’OCRE mentionne la possibilité de recourir à des ententes de confidentialité pour protéger les renseignements commerciaux sensibles. Ils soulignent que le défendeur n’a pas demandé une telle entente.
Définition d’un salaire décent
- Les plaignants se réfèrent à l’analyse de l’OCRE au paragr. 40, et ajoutent « que la complexité d’une enquête ne doit pas empêcher l’OCRE de l’entreprendre. Les atteintes aux droits de la personne internationaux seront toujours complexes. L’OCRE a été créé pour enquêter sur des questions et pour déterminer si des entreprises canadiennes commettent des atteintes aux droits de la personne à l’étranger. Une enquête sur la question du salaire décent s’inscrit tout à fait dans le mandat de l’OCRE, qui a aussi le pouvoir de la mener » [traduction].
- Ils indiquent qu’ils ont fondé leur plainte sur les meilleures données publiquement disponibles, et que les fournisseurs utilisés par le défendeur sont en deçà de trois références réputées en matière de salaire décent élaborées pour le Bangladesh. À ce jour, le défendeur n’a apporté aucune preuve du contraire. Selon les plaignants, le fait de refuser d’enquêter parce qu’il n’y a pas de consensus sur une référence unique en matière de salaire décent reviendrait à se perdre dans les détails. En effet, quelle que soit la référence, il semble que les fournisseurs ne sont pas à la hauteurNote de bas de page 10.
- En réponse à l’affirmation du défendeur selon laquelle il suffit que ses fournisseurs paient le salaire minimum, les plaignants ont rappelé l’article 38 des Principes directeurs de l’OCDE (voir le paragr. 45) Note de bas de page 11. Selon ces lignes directrices, le fait qu’une entreprise respecte les lois nationales d’un pays ne l’exonère pas de ses obligations en matière de droits de la personne internationaux.
Négociation de contrats avec les fournisseurs
- En ce qui concerne la capacité d’influencer les fournisseurs, les plaignants soulignent que le défendeur n’a pas fourni de preuves ou de renseignements à l’OCRE sur ses relations avec les fournisseurs et sur le degré de contrôle qu’il exerce sur eux.
- Ils font référence à la déclaration du défendeur selon laquelle il n’a pas de contrôle sur les fournisseurs, ce qui contredit ses propres observations à ce sujet. Les plaignants renvoient au site Internet du défendeur, à la section « ESG » (consacrée aux facteurs environnementaux, sociaux et de gouvernance), qui comprend une sous-section intitulée « Approvisionnement responsable» qui mentionne ce qui suit : « […] Nous avons la responsabilité de collaborer avec nos fournisseurs et leurs usines pour apporter des améliorations continues aux conditions de travail sécuritaires, à la protection des droits de la personne, à la rémunération équitable et aux impacts environnementaux, autant au Canada que dans le monde entierNote de bas de page 12. »
- Dans une autre sous-section du site Web intitulée « Gestion durable de la chaîne d’approvisionnement », le défendeur mentionne qu’il collabore étroitement avec ses fournisseurs tout au long de sa chaîne d’approvisionnement mondiale afin de s’assurer que ses produits sont obtenus et fabriqués conformément à ses normes rigoureusesNote de bas de page 13.
- Les plaignants concluent en affirmant que le défendeur a fait des déclarations publiques selon lesquelles : il « collabore étroitement » avec les fournisseurs afin de garantir le respect de ses « normes rigoureuses », et qu’il a la responsabilité de « collaborer avec [ses] fournisseurs et leurs usines ». Selon les plaignants, cela ne démontre guère que Canadian Tire est impuissante à contrôler les conditions de fabrication dans les usines de ses fournisseurs, et le niveau de contrôle exercé par Canadian Tire sur les usines de ses fournisseurs est une question légitime sur laquelle l’OCRE devrait se pencher.
- Enfin, les plaignants se réfèrent au paragr. 45 concernant la référence aux Principes directeurs de l’OCDE et aux PDNU qui traitent directement de la responsabilité d’une entreprise de prévenir et d’atténuer les atteintes aux droits de la personne dans sa chaîne d’approvisionnement. Ils estiment que le défendeur ne peut s’exonérer de ses obligations en matière de droits de la personne internationaux en confiant la fabrication à des tiers.
Observations de Canadian Tire
- L’avocat du défendeur a formulé des observations sur la version préliminaire du rapport. Comme cela est indiqué dans sa correspondance, l’objectif de sa lettre est de fournir la réponse du défendeur au rapport et ses premières réactions en la matière. Par conséquent, les observations formulées par l’avocat du défendeur seront désignées comme les observations du défendeur.
- Le défendeur conteste le contenu du rapport de l’OCRE « d’un point de vue juridique, factuel et conceptuel, ainsi que le processus qui a conduit l’OCRE à décider que la plainte était recevable » [traduction].
- Le défendeur considère que le rapport est incomplet, et qu’il ne contient pas de conclusions et/ou de constatations auxquelles les parties peuvent répondre, ce qui place le défendeur dans une position où il doit spéculer sur l’issue réelle de ce processus. Le défendeur déclare que « la justice naturelle, qui complète l’article 16 du décret de l’OCRE, exige que l’OCRE donne à une partie concernée la possibilité de formuler des observations sur toute constatation ou conclusion défavorable, et non pas simplement sur sa compréhension des faits, avant que l’OCRE ne publie son rapport » [traduction]. Il estime que les parties en sont réduites à fournir des observations écrites qui sont fondées sur des spéculations.
- Le défendeur estime que le préavis de trois jours avant la publication du rapport final sur le site Web de l’OCRE est contraire aux propres règles de l’OCRE, qui prévoient que les questions doivent être traitées de manière prévisible, souple, équitable et transparente, et se réfère à l’article 3.5 des Procédures opérationnelles de l’OCRE. Le défendeur demande un délai de 10 jours ouvrables pour fournir des observations supplémentaires au cas où l’OCRE aurait l’intention de publier un rapport contenant des conclusions défavorables.
- Le défendeur a répété qu’il sélectionnait les fournisseurs et les usines tout au long de sa chaîne d’approvisionnement mondiale, conformément aux normes de son Code d’éthique professionnelle à l’intention des fournisseurs (Code d’éthique) » (voir le paragr. 20). Il a également déclaré que son engagement en faveur d’un approvisionnement éthique dans l’ensemble de sa chaîne d’approvisionnement mondiale, son Code d’éthique et son engagement global en faveur des droits des travailleurs au Bangladesh étaient « réel et substantiel, et non de simples efforts ponctuels lors d’audits ou d’inspections de sites, comme l’ont allégué les plaignants sans disposer d’une base factuelle et probante pour formuler une telle allégation » [traduction].
- Le défendeur a réitéré sa déclaration concernant les 30 travailleurs à temps plein chargés de contrôler les conditions de travail dans les usines de ses fournisseurs (voir les paragr. 20 et 21).
- Il a souligné que la version préliminaire de ce rapport ne mentionnait pas Nirapon (en anglais seulement). Le défendeur est l’un des membres fondateurs de cette organisation à but non lucratif dirigée par ses membres, qui favorise et promeut une culture de la sécurité en milieu de travail au Bangladesh. Nirapon travaille avec plus de 300 usines à des fins d’orientation, d’entretien et de surveillance et pour les aider à établir un processus d’établissement de rapports. Il gère également le service d’assistance téléphonique anonyme Amader Kotha (en anglais et chinois seulement), qui permet aux travailleurs d’exprimer leurs préoccupations qui concernent la santé et la sécurité, ainsi que les violations des normes d’emploi. Le défendeur déclare qu’il surveille et examine activement les plaintes liées à tous ses partenaires commerciaux.
- Le défendeur a réitéré sa réponse concernant la question du salaire minimum (voir les paragr. 22 et 23).
La recevabilité de la plainte
- Le défendeur a déclaré que la « plainte n’est pas recevable et que la décision de l’OCRE de la juger recevable n’est fondée ni sur les faits ni sur le droit » [traduction]. Il estime qu’en considérant la plainte comme recevable et en envisageant d’ouvrir une enquête, l’OCRE créerait une nouvelle norme commerciale qui serait en contradiction avec l’article 6 de son décret.
- Le défendeur a fait référence à la fiche de référence du Pacte mondial des Nations Unies sur l’ambition des Objectifs de développement durable intitulée « Réaliser l’ambition d’un salaire décent : fiche de référence et conseils de mise en œuvre » Note de bas de page 14 et, notamment l’article suivant qui stipule que « [l]e champ d’application de cette ambition comprend les employeurs et les contractants directement employés par l’entreprise. Toutefois, cette ambition devrait être progressivement étendue à un engagement de rémunération équitable pour tous les travailleurs de l’ensemble de la chaîne d’approvisionnement d’une entreprise » [traduction]. Il souligne également que l’échéance actuelle pour réaliser l’« ambition » du salaire décent est 2030. En outre, le défendeur déclare également que, puisque les « fournisseurs de [son] client au Bangladesh sont des fournisseurs indépendants de bonne foi qui servent de nombreuses marques dans le monde entier, l’ambition d’un salaire décent devrait, selon le Pacte mondial des Nations Unies, être progressivement mise en œuvre au cours de la prochaine décennie » [traduction].
- Les plaignants déclarent que « le mandat de l’OCRE ne lui permet pas de créer de nouvelles normes qui dépassent ce que le Pacte mondial des Nations Unies a établi, et ce à quoi le Pacte s’attend des entreprises du monde entier. En fait, l’ambition d’un salaire décent n’a pas été réalisée dans la majorité des pays du monde, y compris le Canada » [traduction]. C’est pour ces raisons que le défendeur déclare que l’OCRE devrait rejeter la plainte.
- En ce qui concerne la définition d’un salaire décent, le défendeur se réfère aux paragr. 39 et 40, où il est fait mention au Pacte mondial des Nations Unies. Le défendeur estime que le plan d’action du Pacte mondial des Nations Unies, qui consiste à mettre progressivement en œuvre l’ambition d’un salaire décent dans le respect de l’échéancier proposé, n’est pas de l’inaction.
- Le défendeur déclare que la suggestion de l’OCRE au paragr. 41, selon laquelle il « pourrait être souhaitable d’élaborer une liste de critères pour définir un salaire décent au Bangladesh aux fins de la plainte » [traduction], est contraire au décret de l’OCRE, car cela dépasserait la portée du mandat de l’OCRE. Il précise que, lors de l’instruction d’une plainte, le rôle de l’OCRE est de s’engager dans un processus de recherche des faits afin de déterminer si l’allégation est fondée ou non. Le défendeur estime que les « allégations énoncées dans la plainte ne concernent pas un droit de la personne bien défini qui serait violé par une société canadienne, mais plutôt une question économique extrêmement complexe à laquelle sont confrontés la plupart des pays du monde, et dont on ne peut raisonnablement s’attendre à ce qu’elle soit résolue dans le cadre du processus de l’OCRE » [traduction]. Il affirme que la nature même de la plainte ne relève pas de la compétence de l’OCRE.
- Le défendeur a réitéré son point de vue, tel qu’il a été énoncé au paragr. 24, concernant le niveau de complexité de la définition d’un salaire décent. Il déclare que « le fait de faire peser la charge de la détermination d’un salaire décent sur [le défendeur], qui n’emploie ni directement ni indirectement des travailleurs dans les usines concernées par la plainte, constituerait un dépassement critique du mandat de l’OCRE. En tant que telle, la poursuite de l’enquête sur la plainte ne servirait qu’à causer un préjudice [au défendeur] et des dépenses supplémentaires pour les contribuables canadiens » [traduction].
Les salaires sont examinés dans un autre forum
- Le défendeur a indiqué que le gouvernement bangladais a récemment constitué un conseil salarial, et qu’il s’emploie activement à réexaminer les salaires des travailleurs de l’industrie du prêt-à-porter (PAP)Note de bas de page 15.
- Si l’OCRE détermine qu’elle a compétence pour poursuivre dans cette voie, le défendeur estime que l’OCRE devrait refuser de donner suite à la plainte, parce que les allégations contenues dans la plainte sont actuellement examinées dans une autre instance (article 7 des Procédures opérationnelles). Il affirme qu’il n’y a aucune raison pour qu’une entité du gouvernement canadien enquête sur la question des salaires des PAP dans un contexte où le gouvernement du Bangladesh s’en occupe activement.
La question de la « bonne foi » dans le processus de traitement des plaintes
- Le défendeur a réitéré la question de bonne foi soulevées à propos de la conduite des plaignants, qui ont tenu une conférence de presse sur la plainte avant que le défendeur n’en ait eu connaissance (voir les paragr. 25 et 26).
- Le défendeur estime que la motivation du plaignant est pertinente pour déterminer s’il agit de bonne foi. Dans le cas présent, le défendeur estime que « les affirmations factuelles sans fondement ont été soigneusement orchestrées dans le but précis de nuire à la bonne volonté et à l’image de Canadian Tire dans l’opinion publique » [traduction].
- En ce qui concerne l’analyse de l’OCRE sur la question de la bonne foi (voir les paragr. 47 à 58), le défendeur déclare ce qui suit : « L’OCRE semble avoir conclu, par “analogie” avec les instances judiciaires, que les plaignants n’étaient pas empêchés de publier, lors d’une conférence de presse, la plainte le jour même où ils l’ont déposée » [traduction]. Toutefois, cette analyse ne tient pas compte de l’article 6.2 des Procédures opérationnelles de l’OCRE, qui stipule expressément et sans équivoque que : « [l]e plaignant est tenu de garder la plainte et la décision de l’ombudsman confidentielles jusqu’à ce que le défendeur soit informé » de la décision sur la recevabilité.
- Le défendeur estime que rien ne permet à l’OCRE d’ignorer l’application de l’article 6.2 des Procédures opérationnelles Il déclare également que « l’application par analogie à des affaires judiciaires non pertinentes ne justifie pas le comportement des plaignants » [traduction]. Concernant l’obligation d’agir de bonne foi, le défendeur a également déclaré que « le pouvoir discrétionnaire de l’OCRE n’est pas illimité, et doit tenir compte des règles de l’OCRE, y compris l’article 12.2 des Procédures opérationnelles » [traduction]. En outre, il a également mentionné que l’OCRE avait informé le défendeur que la question avait été abordée avec les plaignants.
- Comme cela est indiqué au paragr. 18, dans le cadre de ses processus d’établissement de rapports ESG en cours, le défendeur envisage toujours de divulguer les noms et les adresses de ses fournisseurs de vêtements et de chaussures.
Recommandations demandées par les plaignants
- Le défendeur estime que les plaignants demandent à l’OCRE de formuler des recommandations qui vont bien au-delà de la portée de la plainte et de la compétence de l’OCRE, et qu’il n’existe aucun élément sur lequel l’OCRE puisse ou doive se fonder pour traiter ces recommandations. Si l’OCRE décide de donner suite ou d’accorder de l’importance aux demandes de recommandation des plaignants, le défendeur déclare qu’il se réserve le droit de présenter des observations supplémentaires.
- En conclusion, le défendeur nie les allégations contenues dans la plainte, et a exprimé des inquiétudes quant au processus suivi jusqu’à présent par l’OCRE dans cette affaire. En outre, il estime que les plaignants n’ont présenté aucune preuve à l’appui des allégations formulées dans la plainte, et qu’ils ont violé de manière flagrante le processus de l’OCRE en menant activement une campagne publique pendant le processus d’examen de l’OCRE. Il demanda à l’OCRE de rejeter la plainte dans son intégralité.
Partie 6 – Décision de l’OCRE
- Selon la plainte, depuis 2019, le défendeur utilise des fournisseurs et/ou des usines dans sa chaîne d’approvisionnement au Bangladesh qui ne versent pas un salaire décent aux travailleurs, qui sont principalement des femmes. Le défendeur a répondu à la plainte en niant les allégations contenues dans la plainte et en soulevant des préoccupations quant au processus qui a conduit l’OCRE à déterminer que la plainte était recevable.
- Comme cela est indiqué dans la partie 5, le défendeur a soulevé plusieurs questions concernant les procédures de l’OCRE. Les paragraphes suivants abordent ces questions.
- Le défendeur a soulevé la question du mandat de l’OCRE et de sa compétence dans l’examen de l’allégation d’atteinte aux droits de la personne en ce qui concerne le droit à un salaire décent.
- Selon l’alinéa 4c) du décret, le mandat de l’ombudsman est « d’examiner toute plainte déposée […] comportant une allégation concernant une atteinte aux droits de la personne […] ». La définition d’une « atteinte aux droits de la personne », selon le paragraphe 1(1) du décret, signifie des « répercussions négatives sur les droits de la personne reconnus internationalement et contenus dans la Déclaration universelle des droits de l’homme, le Pacte international relatif aux droits civils et politiques et le Pacte international relatif aux droits économiques, sociaux et culturels qui découlent des activités d’une entreprise canadienne à l’étranger » (passage non souligné dans l’original). Comme cela est indiqué au paragr. 33, le droit à un salaire décent est un droit de la personne reconnu internationalement dans les articles 23, 24 et 25 de la Déclaration universelle des droits de l’homme (DUDH), et dans les articles 7 et 11 du Pacte international relatif aux droits économiques, sociaux et culturels (PIDESC)Note de bas de page 16.
- En outre, conformément à l’article 5 du décret, l’ombudsman est guidé par les Principes directeurs des Nations Unies (PDF) et les Principes directeurs de l’OCDE. Aux paragr. 45 et 46, l’OCRE fait référence aux articles 11, 12 et 13 des PDNU concernant la responsabilité des entreprises en matière de respect des droits de la personne, ainsi qu’au Chapitre IV des principes directeurs de l’OCDE. Par conséquent, l’examen d’une plainte faisant état d’une violation présumée du droit de la personne à un salaire décent par une entreprise canadienne relève bien du mandat et de la compétence de l’OCRE en vertu du décret. Le niveau de complexité d’un droit de la personne n’est pas un facteur permettant de déterminer la compétence de l’OCRE dans l’examen d’une plainte. En outre, l’examen d’une plainte pour violation présumée d’un droit de la personne n’équivaut pas à la création d’une nouvelle norme concernant l’entreprise responsable.
- Le défendeur se réfère au Pacte mondial des Nations Unies, une institution créée en 2000 qui a établi des normes pour ses membres. Comme cela est indiqué sur son site Web, il s’agit d’une « initiative volontaire basée sur l’engagement des chefs d’entreprise à mettre en œuvre des principes universels de durabilité et à prendre des mesures pour soutenir les objectifs de l’ONUNote de bas de page 17» [traduction]. Le Pacte mondial des Nations Unies ne remplace ni la DUDH ni le PIDESC, mais il s’agit plutôt d’une organisation qui aide les entreprises, à titre volontaire, à mettre en œuvre des processus visant à atteindre des objectifs conformes à ceux des Nations Unies. Le mandat de l’OCRE fait référence à des instruments de défense des droits de la personne, tels que la DUDH et le PIDESC, qui ne prévoient pas d’échéanciers pour le respect des droits de la personne.
- Le défendeur a soulevé la question de la norme de preuve dans la détermination de la recevabilité de la plainte par l’OCRE.
- Selon les articles 5.6 à 5.8 des Procédures opérationnelles, une plainte est considérée comme recevable lorsque l’OCRE estime qu’il y a suffisamment de renseignements concernant les critères de recevabilité (article 5.7 des Procédures opérationnelles). En outre, en ce qui concerne la recevabilité de la plainte, le paragr. 1 mentionne que le seuil de recevabilité est bas. Le 14 décembre 2022, l’ombudsman a décidé qu’il y avait suffisamment de renseignements pour que l’on puisse raisonnablement penser que chacun des trois critères de recevabilité était satisfait. Comme cela est indiqué à l’article 5.8 des Procédures opérationnelles, la décision de l’ombudsman selon laquelle une plainte est recevable ne constitue pas une décision sur le bien-fondé de la plainte. Ces renseignements ont également été communiqués aux parties par l’ombudsman lors de leurs réunions d’évaluation initiale respectives.
- À l’étape de la recevabilité, l’OCRE prend une décision préliminaire concernant les critères de recevabilité en se fondant sur des renseignements et des déductions raisonnables soumises par un plaignant.
- Le défendeur invoque l’alinéa 8b) du décret et l’article 7.1.2 des Procédures opérationnelles, pour demander que l’OCRE refuse d’examiner la plainte parce que les allégations qu’elle contient font actuellement l’objet d’un examen dans une autre instance.
- Conformément à l’alinéa 8b) du décret, l’ombudsman peut, à sa seule discrétion, rejeter une plainte au motif qu’elle est examinée par une autre instance, ou qu’elle l’a déjà été. En outre, conformément à l’article 7.2 des Procédures opérationnelles, l’OCRE ne refusera pas de donner suite à une plainte au seul motif qu’il existe des procédures parallèles. Divers facteurs, y compris le fait que la plainte est examinée dans une autre instance, peuvent être pris en considération par l’OCRE pour prendre sa décision, qui est laissée à sa seule discrétion.
- Selon le défendeur, cette autre instance est organisée par le gouvernement du Bangladesh qui était, et l’est peut-être encore, activement engagé dans l’examen de la question des salaires des PAP. Au moment de la rédaction du présent rapport, le gouvernement du Bangladesh semble avoir pris une décision concernant le salaire minimum des PAPNote de bas de page 18. Toutefois, il est entendu que l’instance a discuté de la question du salaire minimum, mais pas du droit à un salaire décent pour les PAP.
- Conformément à l’alinéa 8b) du décret et à l’article 7.2 des Procédures opérationnelles, et d’après l’examen des différents facteurs, y compris les renseignements communiqués qui concernaient l’instance mise sur pied par le gouvernement du Bangladesh, l’OCRE a décidé que le fait que l’affaire soit examinée dans une autre instance n’est pas, dans ce cas, une raison de refuser l’examen de la plainte.
- Le défendeur a soulevé la question de la bonne foi en ce qui concerne la conduite des plaignants qui ont organisé une conférence de presse sur la plainte avant que le défendeur n’en ait eu connaissance. Les plaignants ont déposé la plainte le 21 novembre 2022 et ont organisé une conférence de presse le 22 novembre 2022. Aucune décision de l’OCRE n’a été prise quant à la recevabilité de la plainte à la date de la conférence de presse.
- Selon l’article 6.2 des Procédures opérationnelles, le plaignant est tenu de préserver la confidentialité de la plainte et de la décision de l’OCRE jusqu’à ce que le défendeur en soit informé. L’objectif de cette section est de garantir la sécurité du plaignant et l’intégrité du processus de traitement des plaintes.
- Le non-respect de cette exigence peut être pris en considération par l’OCRE pour déterminer si les plaignants ont agi de bonne foi. Cette évaluation est laissée à la discrétion de l’OCRE conformément à l’article 12 des Procédures opérationnelles. Le moment de la décision concernant la bonne foi des parties est aussi laissé à la discrétion de l’OCRE, qui peut donc la prendre à la fin de l’examen de la plainte.
- La conséquence d’une action susceptible d’affecter l’exigence de bonne foi des parties n’entraîne pas le rejet automatique d’une plainte. Chaque action est un facteur qui peut être pris en considération pour évaluer le comportement d’une partie dans le cadre du processus de traitement des plaintes. Il est également important d’examiner l’incidence de l’atteinte présumée aux droits de la personne dans la plainte par rapport à une erreur de procédure commise par l’une des parties.
- Dans l’analyse de l’OCRE (paragr. 47 à 53), des références à des publications d’OECD Watch et à des décisions de tribunaux des droits de la personne sont faites afin de démontrer que la publication d’une plainte ou d’une campagne n’est pas une erreur fatale. En outre, conformément à l’article 12.2 des Procédures opérationnelles, l’obligation d’agir de bonne foi comprend l’obligation de préserver la confidentialité des renseignements personnels et professionnels sensibles, de respecter les exigences de confidentialité liées au MRDP, et de s’abstenir de fournir de faux renseignements à l’OCRE et de déformer publiquement le processus.
- Il est à noter que les renseignements contenus dans la plainte sont accessibles au public en ligne. Ils ne contiennent aucun renseignement commercial sur le défendeur qui n’est pas accessible au public, et aucun renseignement nominatif d’une personne qui travaille dans le secteur du vêtement au Bangladesh. Les seules données non publiques disponibles en ligne ont été recueillies auprès de travailleurs qui les ont volontairement communiquées. Dans sa correspondance, le défendeur n’a pas mentionné de renseignements spécifiques qui ont été communiqués dans la plainte qu’il considère comme des renseignements personnels et professionnels sensibles.
- Dans le cas présent, l’OCRE a déterminé que les renseignements contenus dans la plainte n’étaient pas des renseignements personnels ou commerciaux sensibles.
- Le défendeur a également soulevé la question de la bonne foi des plaignants, pour avoir demandé de la documentation.
- Les demandes de documents et la communication de renseignements sont courantes dans tout processus juridictionnel ou d’ombudsman. Comme cela est indiqué aux paragr. 54 à 58, les renseignements demandés par l’une des parties doivent être pertinents par rapport à l’allégation, et il doit y avoir un fondement raisonnable pour croire que les renseignements demandés peuvent contribuer à la résolution de la plainte. Dans le cas des renseignements commerciaux confidentiels, les parties peuvent choisir de protéger ces renseignements par une entente de confidentialité. La demande de documentation n’est pas un facteur énuméré à l’article 12.2 des Procédures opérationnelles qui est utilisé pour déterminer la bonne foi d’une partie.
- L’ombudsman a estimé que la demande des plaignants n’était pas un acte de mauvaise foi.
- Comme cela est indiqué au paragr. 105, le défendeur estime que les recommandations que les plaignants demandent à l’OCRE de formuler dépassent la portée de la plainte et la compétence de l’OCRE. Les recommandations demandées par les plaignants seront prises en considération, et l’ombudsman fera connaître sa décision à la fin de l’examen de la plainte.
- Le défendeur a également demandé un délai de 10 jours ouvrables pour fournir des observations supplémentaires au cas où l’OCRE produirait un rapport contenant des conclusions défavorables. Comme cela a été indiqué précédemment, à ce stade du processus, aucune décision n’est prise sur le bien-fondé de la plainte. Pour clarifier ce propos, à cette étape du processus d’examen, l’OCRE détermine uniquement si l’affaire doit faire l’objet d’une enquête. Les parties reçoivent une copie du rapport final d’évaluation initiale environ 10 jours avant la date de publication. Les parties sont également avisées à nouveau 3 jours avant la date de publication.
- Afin de répondre à l’allégation soulevée dans la plainte, l’OCRE a décidé d’ouvrir une enquête en s’appuyant sur une recherche indépendante des faits. Pour parvenir à sa décision, l’OCRE a pris en compte les facteurs mentionnés au paragr. 29 et, en particulier, la question de savoir si les renseignements actuellement disponibles comportent des lacunes qui justifient la tenue d’une enquête. Consulter la section intitulée « Analyse », qui présente les renseignements contradictoires entre les parties concernant l’allégationNote de bas de page 19.
- Bien que l’OCRE procède à une enquête en menant une recherche indépendante des faits, une médiation est possible à tout moment du processus de traitement des plaintes, à la discrétion de l’ombudsman et avec l’accord des parties. L’ombudsman invite les parties à envisager la médiation et la confidentialité qu’elle peut offrir, notamment en ce qui concerne les renseignements commerciaux de nature délicate. Le défendeur aura la possibilité de fournir d’autres renseignements pertinents au cours de l’enquête.
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