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Le rôle et l’importance de l’indépendance des mécanismes de réclamation non judiciaires relevant de l’État dans le cadre du “pilier 3” des Principes directeurs des Nations Unies relatifs aux entreprises et aux droits de la personne

Rapport commandé par l’Ombudsman canadien de la responsabilité des entreprises (OCRE)

Auteur : Jennifer Zerk, Ph. D.

25 mai 2023

Sommaire

Le présent rapport a été commandé par l’Ombudsman canadien de la responsabilité des entreprises (OCRE).

L’OCRE a demandé des recherches et des analyses :

L’expression « mécanisme de réclamation non judiciaire relevant de l’État » englobe un large éventail d’organismes relevant de l’État et pertinents en ce qui concerne le respect des droits de la personne à respecter par les entreprises. Cette diversité complique l’analyse de ces mécanismes. Plus précisément, pour les besoins actuels, l’éventail des mécanismes de réclamation non judiciaires visés par les Principes directeurs des Nations Unies (et le Principe directeur 31 en particulier) rend difficile, voire impossible, la définition du niveau précis d’indépendancerequis pour qu’un mécanisme de réclamation soit considéré comme efficaceen vertu des Principes directeurs des Nations Unies.

Néanmoins, en s’appuyant sur les Principes directeurs des Nations Unies et sur les orientations du Haut-Commissariat des Nations Unies aux droits de la personne (HCDH), il est possible de cibler les principales caractéristiques, à l'heure actuelle, du mandat, de la structure et des dispositions organisationnelles de l’OCRE, qui avantagent ou nuisent à l’établissement et au maintien de son indépendance, ainsi que de recommander quelques améliorations.

La partie 1 du présent rapport explique le contexte de ce projet de recherche, ses objectifs, son champ d’application et la méthodologie de recherche.

La partie 2 présente les principaux aspects du contexte normatif dans lequel s’inscrit la recherche. Après une brève introduction aux Principes directeurs des Nations Unies (sections 2.1 et 2.2) et une brève discussion sur leur lien avec l’OCRE (section 2.3), le rapport explore plus en détail le concept d’efficacité (tel que défini dans les Principes directeurs des Nations Unies) (section 2.4), l’importance de l’« indépendance » pour un mécanisme de réclamation afin que son « efficacité » soit globale (section 2.5) et les différentes façons dont ce degré d’indépendance peut avoir une incidence sur sa capacité à garantir des résultats efficaces en matière de remédiation pour les personnes et les communautés touchées. La section 2.6 donne un aperçu du cadre analytique utilisé pour la discussion dans la partie 3 en relevant trois « dimensions » différentes de l’indépendance (c’est-à-dire par rapport au gouvernement, aux entreprises et aux autres intervenants) et les principaux facteurs (fondamentaux, liés à la gouvernance, opérationnels et juridiques) qui peuvent être pertinents pour chacune d’entre elles.

La partie 3 présente les résultats de l’analyse documentaire des informations rendues disponibles par l’OCRE. Dans cette partie, nous relevons les différents facteurs et caractéristiques, à l'heure actuelle, du mandat, de la structure et des dispositions organisationnels de l’OCRE qui peuvent soit favoriser, soit compromettre l’indépendance de l’OCRE. Cette partie, qui suit largement la structure du tableau présenté à la section 2.6, est organisée en une série de résumés, chacun étant suivi d’une brève critique (présentée sous forme d’ « observations »). Il convient de noter que l’OCRE est un organisme chargé de traiter les allégations d’atteintes aux droits de la personne et qu’à ce titre, certaines considérations particulières s’appliquent en ce qui concerne la consultation des personnes et des communautés touchées. Ces considérations sont examinées plus en détail au point 3.3.

En ayant une meilleure compréhension des divers facteurs et caractéristiques susceptibles de poser problème du point de vue de l’indépendance (et donc de l’« efficacité ») de l’OCRE, ainsi que de leur interaction, nous concluons notre étude dans la partie 4 en présentant une série d’options d’amélioration. Ces options ont été élaborées sur la base de deux scénarios : le premier repose sur l’octroi d’un nouveau mandat à l’OCRE, fondé sur la législation primaire (section 4.1), et le second sur le maintien du statu quo (c’est-à-dire en ce qui concerne les dispositions fondamentales de l’OCRE, voir section 4.2). Un tableau est utilisé pour mettre en évidence la contribution particulière à l’ « indépendance » que chaque option pourrait apporter, certains aspects particuliers qui pourraient devoir être pris en compte, les liens qui peuvent exister entre les différentes options et les orientations pertinentes du HCDH.

La partie 4 ne formule pas de recommandations sur les dispositions structurelles, institutionnelles ou de gouvernance optimales pour renforcer l’indépendance de l’OCRE, ces questions relevant de la politique du gouvernement du Canada. En outre, les orientations existantes du HCDH sur la mise en œuvre des Principes directeurs des Nations Unies ne justifient pas la prise de mesures aussi normatives. Toutefois, nous espérons que les options présentées dans cette section, accompagnées d’observations préliminaires sur leur incidence probable (ou leurs limites), pourront servir de point de départ à des discussions internes fructueuses sur les moyens de renforcer l’indépendance de l’OCRE (et donc son efficacité en tant que mécanisme de réclamation relevant de l’État en vertu des Principes directeurs des Nations Unies) dans une série de scénarios futurs, ainsi qu’à un engagement constructif des intervenants sur ce sujet important.

En conclusion du rapport, nous présentons dans la partie 5 dix facteurs clés relevés au cours de notre étude qui sont les plus susceptibles de saper l’indépendance de l’OCRE, tel qu’il est actuellement constitué. Il convient de noter que l’absence de pouvoirs d’enquête contraignants, bien qu’importante, n’est qu’un aspect d’un tableau beaucoup plus varié et complexe. Cet aspect attire également l’attention sur certaines tendances législatives plus larges – concernant la transparence et les obligations de diligence raisonnable en matière de droits de la personne – qui pourraient avoir une incidence sur le rôle de l’OCRE à l’avenir, ainsi que sur la manière dont il s’acquitte de son mandat actuel.

En attendant que l’OCRE et les ministres et ministères concernés tracent la voie à suivre, il convient de noter les orientations proposées par le HCDH dans un rapport de 2018 au Conseil des droits de l’homme portant précisément sur les mécanismes de réclamation non judiciaires relevant de l’État, dans lequel le HCDH appelle tous les États à

« [procéder à] un examen complet et [à consulter] dûment les parties prenantes afin de déterminer : a) quel est l’arsenal des différents mécanismes non judiciaires relevant de l’État établis sous sa juridiction qui veillent au respect des droits de l’homme par les entreprises; b) si le niveau d’indépendance, le mandat, les fonctionset suffisants, lorsqu’on les examine conjointement avec les lois et politiques y relatives, pour offrir un environnement juridique et réglementaire propice au respect des droits de l’homme par les entreprises; et c) si ces mécanismes répondent aux besoins des personnes ou des groupes pour lesquels ils sont prévus et s’ils protègent suffisamment leurs droits. »

Et à :

« [prendre] les mesures nécessaires pour remédier à toute insuffisance constatée eu égard aux questions mentionnées […] ci-dessus. »Note de bas de page 1

Partie 1. Contexte, objectifs, champ d’application et méthodologie

1.1 Contexte

Le présent rapport a été commandé par l’ombudsman canadien de la responsabilité des entreprises (OCRE).

L’OCRE a été créé en vertu du décret 2019-1323 et il a pour mandat de :

L’article 1(1) du décret définit comme suit ce que l’on entend par « atteinte aux droits de la personne » :

« Répercussions négatives sur les droits de la personne reconnus internationalement et contenus notamment dans la Déclaration universelle des droits de l’homme, le Pacte international relatif aux droits civils et politiques et le Pacte international relatif aux droits économiques, sociaux et culturels – qui découlent des activités d’une entreprise canadienne à l’étranger. (human rights abuse) »

L’expression « entreprise canadienne » est définie à l’article 1(2) du même instrument comme suit :

« entité constituée ou formée sous le régime des lois du Canada ou d’une province, ou formée autrement au Canada, exerçant des activités à l’extérieur du Canada dans le secteur du vêtement ou les secteurs minier ou pétrolier et gazier, y compris l’entité qu’elle contrôle qui exerce des activités à l’extérieur du Canada dans le secteur du vêtement ou les secteurs minier ou pétrolier et gazier. »Note de bas de page 3

Ces définitions limitent effectivement le champ d’action de l’OCRE au titre des points b), c) et d) ci-dessus aux secteurs du vêtement, et aux secteurs minier ou pétrolier et gazier, bien que le mandat de l’OCRE au titre des points a), e) et f) soit sans doute plus large.

1.2 Objectifs de la recherche

L’OCRE a demandé des recherches et des analyses :

1.3 Méthodologie et champ d’application

Le présent rapport a été élaboré à partir de recherches et d’analyses documentaires. Cette recherche documentaire a été effectuée au moyen de l’examen d’un ensemble d’informations mises à notre disposition par l’OCRE, ainsi que d’autres informations publiques relatives à l’OCRE, obtenues grâce aux recherches effectuées par l’auteur sur Internet et dans les bibliothèques. La trousse d’information fournie par l’OCRE comprenait des informations relatives aux points suivants :

Une version préliminaire du présent rapport a été soumise à l’OCRE et aux membres de son personnel pour commentaires. L’actuelle OCRE, Mme Sheri Meyerhoffer, s’est rendue disponible pour un entretien. La présente version définitive a été produite sur la base des commentaires et des renseignements supplémentaires reçus.

Le présent rapport examine le rôle et l’importance de l’indépendance de l’OCRE par rapport à d’autres acteurs et entités (relevant de l’État ou non), étant donné le statut de l’OCRE en tant que mécanisme de réclamation non judiciaire relevant de l’État en vertu des Principes directeurs des Nations Unies. Par conséquent, outre les Principes directeurs des Nations Unies eux-mêmes, l’analyse tient particulièrement compte des commentaires et des orientations sur la mise en œuvre des Principes directeurs des Nations Unies émanant du Haut-Commissariat des Nations Unies aux droits de la personne (« HCDH »), l’organisme chargé de diriger le programme concernant les entreprises et les droits de la personne au sein du système des Nations Unies.

Conformément au mandat de l’auteur, le rapport porte précisément sur le rôle et l’importance de l’indépendancedans l’accès aux mécanismes de remédiation. Par conséquent, un examen détaillé du rendement de l’OCRE par rapport aux divers autres « critères d’efficacité » des mécanismes de réclamation non judiciaires énoncés dans les Principes directeurs (c’est-à-dire qui ne sont peut-être pas aussi directement liés aux questions d’indépendance des mécanismes) dépasse le cadre de ce rapport. (Pour une liste complète de ces critères d’efficacité, voir l’encadré 2 ci-dessous).

La recherche tient compte des normes relatives à la gouvernance et à la conduite des organismes publics, notamment les Principes de Venise sur les institutions d’ombudsman,Note de bas de page 4 dans la mesure où elles ont éclairé le travail du HCDH en ce qui concerne l’efficacité des mécanismes de remédiation non judiciaires relevant de l’État. Toutefois, un examen détaillé de l’application des Principes de Venise à l’OCRE, et la question de savoir si l’OCRE possède le niveau d’indépendance requis sur la base de ces principes, dépassent la portée du présent rapport, ce sujet faisant l’objet d’une recherche distincte et complémentaire.Note de bas de page 5

Les options présentées dans la partie 4 du présent rapport sont fondées sur le tableau qui ressort de cette recherche documentaire. Toutefois, il peut y avoir d’autres pratiques ou expériences en rapport avec le degré d’indépendance de l’OCRE (y compris la mesure dans laquelle elle s’aligne sur les normes internationales pertinentes et les possibilités d’amélioration), qui nécessiteraient des recherches empiriques supplémentaires (par exemple, au moyen d’entretiens avec l’OCRE, le personnel de l’OCRE, les fonctionnaires ministériels concernés et d’autres intervenants) afin de les explorer de manière approfondie.

Le présent rapport ne constitue pas un avis juridique. L’examen détaillé des modifications à la loi qui pourraient être nécessaires pour mettre en œuvre les options présentées dans la partie 4 du présent rapport dépasse donc le cadre de ce projet de recherche. Le présent rapport ne prétend pas à la faisabilité juridique de l’une ou l’autre de ces options; il s’agit de questions pour lesquelles il convient de solliciter un avis juridique indépendant auprès d’avocats canadiens.

Le présent rapport ne constitue pas non plus un examen détaillé des avantages et des inconvénients des différentes options structurelles, institutionnelles ou de gouvernance, ces questions relevant des politiques du gouvernement du Canada. Le présent rapport se contente de souligner, sur la base des informations disponibles à ce jour et de l’analyse documentaire ci-dessus

Partie 2. Les Principes directeurs des Nations Unies relatifs aux entreprises et aux droits de la personne

2.1 Quels sont les Principes directeurs des Nations Unies?

Les Principes directeurs des Nations Unies constituent le cadre normatif mondial qui fait autorité en matière de conduite responsable des entreprises et de lutte contre les atteintes aux droits de la personne dans les activités des entreprises et les chaînes d’approvisionnement mondiales. Ils illustrent une norme de pratique qui est désormais attendue de tous les États et de toutes les entreprises en ce qui concerne les entreprises et les droits de la personne. Ils ont été approuvés par le Conseil des droits de l’homme des Nations Unies en juin 2011.

Composés de 31 principes, les Principes directeurs reposent sur une structure à « trois piliers » comme suit :

2.2 Statut des Principes directeurs des Nations Unies

Bien qu’ils ne constituent pas en soi un instrument juridiquement exécutoire, les Principes directeurs des Nations Unies précisent les répercussions des normes et pratiques existantes pour les États et les entreprises, dont certaines sont effectivement contraignantes en vertu du droit international ou national. Comme l’explique le HCDH :

« Les Principes directeurs ne sont pas un instrument international que les États ratifient et ils ne créent pas d’obligations juridiques nouvelles. En revanche, ils explicitent et précisent les implications des normes des droits de l’homme en vigueur, dont certaines sont juridiquement contraignantes pour les États, et donnent des indications sur la façon de les mettre en œuvre. Les Principes directeurs se réfèrent aux obligations actuelles des États aux termes du droit international et en découlent. Souvent, il existe une législation nationale (laquelle peut éventuellement être requise) pour veiller à ce que ces obligations soient effectivement respectées et appliquées. Cela signifie également que des éléments de ces Principes directeurs peuvent être repris dans la législation nationale réglementant les activités des entreprises. »Note de bas de page 6

Les principes directeurs bénéficient d’un large soutien de la part des entreprises, de la société civile et des États. Un certain nombre d’organisations internationales et régionales ont adapté leurs propres normes à ces principes, notamment l’OCDE dans ses Principes directeurs pour les entreprises multinationales (voir chapitre IV).Note de bas de page 7 Les Principes directeurs des Nations Unies ont également été entérinés par de nombreuses organisations internationales et régionales, des organisations économiques, des organisations de la société civile, des syndicats, des institutions nationales et régionales, des initiatives multipartites, des entreprises et d’autres groupes d’intervenants.

2.3 Pertinence des Principes directeurs des Nations Unies pour l’OCRE

Les dispositions des Principes directeurs des Nations Unies énoncées dans le pilier 3 (principes directeurs 25 à 31) expliquent l’importance des mécanismes de réclamation non judiciaires relevant de l’État pour traiter et offrir des voies de remédiation efficaces en cas de préjudices causés par des entreprises.

Le principe directeur 27 prévoit ce qui suit :

« Les États devraient fournir des mécanismes de réclamation non judiciaires efficaces et appropriés, en plus des mécanismes judiciaires, dans le cadre d’un système étatique complet de remédiation dans les cas d’atteintes aux droits de la personne commises par les entreprises. »

Le commentaire du principe directeur 27 ajoute :

« Les mécanismes administratifs, législatifs et autres mécanismes non judiciaires jouent un rôle essentiel en complément et en remplacement des mécanismes judiciaires. Même lorsque les systèmes judiciaires sont efficaces et bien dotés en ressources, ils ne peuvent pas prendre en charge toutes les atteintes présumées; des voies de remédiation ne sont pas toujours nécessaires; ce n’est pas non plus l’approche privilégiée par tous les requérants. »

Encadré 1. Qu’est-ce qu’un mécanisme de réclamation non judiciaire relevant de l’État?

Aux fins des Principes directeurs des Nations Unies :

Les « mécanismes de réclamation non judiciaires relevant de l’État » sont des mécanismes par lesquels les personnes ou les communautés peuvent demander des recours pour une atteinte à leurs droits de la personne causée par les activités d’une entreprise. Les mécanismes non judiciaires relevant de l’État se distinguent des mécanismes judiciaires (c’est-à-dire les tribunaux) en ce qu’ils sont administrés par le pouvoir exécutif et rendent des comptes à ce dernier plutôt qu’à l’appareil judiciaire du gouvernement. La participation de l’État à leur mise en place et au moins certains aspects de leur fonctionnement ou de leur administration les distinguent des mécanismes de réclamation qui ne relèvent pas de l’État.

Extrait du HCDH, « Improving accountability and access to remedy for victims of business-related human rights abuse through State-based non-judicial mechanisms: explanatory notes to final report », le 1er juin 2018, Document des Nations Unies A/HRC/38/20/Add.1. Copie disponible à l’adresse suivante (en anglais seulement) A/HRC/44/32 : Amélioration de la responsabilisation des entreprises et de l’accès à des voies de recours pour les victimes de violations des droits de l’homme liées à une activité commerciale au moyen de mécanismes de réclamation ne relevant pas de l’État - Rapport de la Haute-Commissaire des Nations Unies aux droits de la personne | OHCHR.

L’OCRE est un mécanisme de réclamation non judiciaire relevant de l’État.

Les Principes directeurs des Nations Unies ne précisent pas exactement quels types de mécanismes de réclamation non judiciaires relevant de l’État doivent être mis en place par les États afin de satisfaire au principe directeur 27 et à l’obligation de protection plus large de l’État, décrite dans le « pilier 1 ». Le principe directeur 27 précise simplement que ces mécanismes doivent être « efficaces et appropriés ». Comme nous l’expliquons plus loin (voir section 2.4), l’efficacité d’un mécanisme de réclamation non judiciaire (aux fins de l’évaluation de la conformité avec les Principes directeurs des Nations Unies) est évaluée en fonction des « critères d’efficacité » énoncés dans le principe directeur 31 des Nations Unies. Le critère supplémentaire du « caractère adéquat » du principe directeur 27 fait référence à la nécessité de concevoir et de faire fonctionner les mécanismes de réclamation non judiciaires relevant de l’État de manière à ce qu’ils soient adaptés aux contextes et aux lieux dans lesquels ils sont censés fonctionner, qu’ils répondent aux conditions et aux besoins locaux et qu’ils soient alignés sur les normes internationales en matière de droits de la personne. Toutefois, il existe un chevauchement évident entre « efficace » et « adéquat », car des mécanismes de réclamation inadaptés ont peu de chances d’être efficaces.

L’expression « mécanisme de réclamation non judiciaire relevant de l’État » englobe un large éventail d’organismes relevant de l’État et pertinents pour le respect des droits de la personne par les entreprises. Comme l’explique le HCDH dans un rapport de 2018 au Conseil des droits de l’homme des Nations Unies :

« Il existe de nombreuses catégories de mécanismes non judiciaires relevant de l’État. Dans la plupart des pays, on constate l’existence d’un éventail de mécanismes ayant un rôle à jouer dans le traitement des plaintes ou dans la résolution des différends découlant des atteintes aux droits de l’homme liées aux activités des entreprises. On trouve ces mécanismes à tous les niveaux de l’administration (local, régional et national). Le mandat de certains couvre l’ensemble des droits de l’homme, mais nombre d’entre eux sont des organes spécialisés dans des domaines particuliers tels que le droit du travail, la lutte contre la discrimination, les droits des consommateurs, le droit à la vie privée, les droits environnementaux ou encore le droit d’avoir accès à une eau potable et le droit à la santé. Les inspections du travail, les tribunaux du travail, les organismes de protection des consommateurs (souvent conçus pour différents secteurs d’activité), les tribunaux de l’environnement, les organismes de protection de la vie privée et des données, les services d’ombudsman de l’État, les organismes étatiques de santé et de sécurité, les organismes chargés des normes professionnelles et les institutions nationales des droits de l’homme, sont des mécanismes non judiciaires relevant de l’État. »Note de bas de page 8

Cette diversité complique l’analyse des mécanismes non judiciaires relevant de l’État, et il est évident qu’une certaine souplesse est nécessaire dans la conception de tout cadre d’évaluation ou d’analyse comparative pour tenir compte du fait que les organismes qui entrent dans cette catégorie peuvent être très différents sur le plan de leurs structures institutionnelles, leurs mandats, la portée géographique de leurs activités, leurs fonctions, leurs pouvoirs et leurs accords de gouvernance. Toutefois, des orientations utiles peuvent être trouvées dans les rapports publiés par le HCDH à l’issue de chaque phase du Projet sur la responsabilité et les accès aux voies de remédiation, qui comprend une série d’« objectifs stratégiques » pour les États et les autres acteurs, étayés par une série d’« éléments » destinés à mettre en évidence les pratiques exemplaires pour un large éventail de mécanismes différents.Note de bas de page 9

L’OCRE est décrit (notamment dans son instrument juridique fondateur)Note de bas de page 10 comme un organe de type « ombudsman » qui, comme indiqué ci-dessus, est l’une des différentes formes que peuvent prendre les mécanismes de réclamation non judiciaires relevant de l’État (tels que décrits dans les Principes directeurs des Nations Unies). Cette désignation officielle de l’OCRE en tant qu’institution d’ombudsman soulève sa propre série de questions, qui font l’objet d’une étude distincte et complémentaire.Note de bas de page 11 Pour les besoins du présent rapport, les Principes directeurs des Nations Unies et les orientations fournies par le HCDH (en particulier les rapports de 2018 au Conseil des droits de l’homme qui portent précisément sur les mécanismes non judiciaires relevant de l’État)Note de bas de page 12 sont des références essentielles. Les Principes directeurs des Nations Unies revêtent une importance particulière pour l’OCRE pour deux raisons principales :

2.4 Le concept d’ « efficacité » des mécanismes de réclamation non judiciaires en vertu des Principes directeurs

Les Principes directeurs des Nations Unies définissent une série de critères permettant d’évaluer l’efficacité de tous les mécanismes de réclamation non judiciaires relatifs au respect des droits de la personne par les entreprises (voir le principe directeur 31). Ces critères sont souvent appelés (et sont mentionnés dans le présent rapport) « critères d’efficacité du Principe directeur 31 des Nations Unies. » Étant donné que ces critères s’appliquent à un très large éventail de mécanismes non judiciaires, qu’ils relèvent ou non de l’État, ils sont délibérément flexibles. Une explication de haut niveau de la signification de ces différents critères dans la pratique est fournie dans le commentaire des Principes directeurs des Nations Unies. Le HCDH a fourni des conseils supplémentaires sur la meilleure façon de mettre en œuvre les critères d’efficacité du Principe directeur 31 des Nations Unies dans différents contextes, et en ce qui concerne un large éventail de mécanismes de réclamation (y compris les organes d’ombudsman), au moyen de rapports au Conseil des droits de l’homme à la fin des deuxièmes et troisièmes phases du Projet sur la responsabilité et l’accès aux voies de remédiation du HCDH.Note de bas de page 15

Encadré 2 : Les critères d’efficacité du Principe directeur 31 des Nations Unies

Principe directeur 31. Afin que leur efficacité soit assurée, les mécanismes de réclamation non judiciaires, relevant ou non de l’État, devraient être :

a) Légitimes : ils suscitent la confiance des groupes d’acteurs auxquels ils s’adressent et doivent répondre du bon déroulement des procédures de réclamation;

b) Accessibles : ils sont communiqués à tous les groupes d’acteurs auxquels ils sont destinés et fournissent une assistance suffisante à ceux qui se voient opposer des obstacles particuliers pour y accéder;

c) Prévisibles : ils prévoient une procédure clairement établie assortie d’un calendrier indicatif pour chaque étape, et un descriptif précis des types de procédures et d’issues disponibles et des moyens de suivre la mise en œuvre;

d) Équitables : ils s’efforcent d’assurer que les parties lésées ont un accès raisonnable aux sources d’information, aux conseils et aux compétences nécessaires à la mise en œuvre d’une procédure de réclamation dans des conditions équitables, avisées et conformes;

e) Transparents : ils tiennent les requérants informés du cours de la procédure et fournissent des informations suffisantes sur la capacité du mécanisme à susciter la confiance dans son efficacité et à répondre à tous les intérêts publics en jeu;

f) Compatibles avec les droits : ils veillent à ce que l’issue des recours et les mesures de remédiation soient compatibles avec les droits de l’homme internationalement reconnus;

g) Une source d’apprentissage permanent : ils s’appuient sur les mesures pertinentes pour tirer les enseignements propres à améliorer le mécanisme et à prévenir les réclamations et atteintes futures ».

Principe 31 des Principes directeurs des Nations Unies. Non souligné dans l’original. Il convient de noter qu’un huitième critère selon lequel les mécanismes doivent être « fondés sur la participation et le dialogue » est prescrit spécifiquement pour les « mécanismes de niveau opérationnel » (un type de mécanisme de réclamation qui ne relève pas de l’État). Toutefois, comme le présent rapport se concentre sur les critères d’efficacité du Principe directeur 31 des Nations Unies en ce qui concerne les mécanismes de réclamation relevant de l’État, il a été omis de la liste ci-dessus.

2.5 En quoi l’indépendance des mécanismes de réclamation non judiciaires relevant de l’État est-elle pertinente pour leur « efficacité » au titre du Principe directeur 31?

L’indépendance n’est pas traitée dans le Principe directeur 31 comme un critère d’efficacité d’un mécanisme en tant que tel. Elle est mieux comprise comme un moyen de parvenir à une fin – un moyen par lequel les différents critères d’efficacité du Principe directeur 31 des Nations Unies peuvent être satisfaits – plutôt que comme une fin en soi. Il n’est donc pas possible de dire dans l’abstrait quel niveau d’indépendance est requis pour atteindre l’« efficacité » telle que ce concept est défini dans les Principes directeurs des Nations Unies, ni les moyens précis par lesquels ce niveau d’indépendance devrait être atteint. La question de savoir si un mécanisme est suffisamment indépendant est plutôt évaluée en fonction des résultats de ce mécanisme; pour reprendre les termes du Haut-Commissariat aux droits de la personne,

« si le niveau d’indépendance, le mandat, les fonctions et les pouvoirs de ces mécanismes sont adaptés et suffisants, lorsqu’on les examine conjointement avec les lois et politiques y relatives, pour offrir un environnement juridique et réglementaire propice au respect des droits de l’homme par les entreprises. »Note de bas de page 16

L’indépendance est pertinente pour plusieurs des « critères d’efficacité » du Principe directeur 31 des Nations Unies. Par exemple, elle est considérée comme un aspect particulièrement important de la légitimité d’un mécanisme de réclamation aux yeux des personnes susceptibles de vouloir utiliser le mécanisme [voir le paragraphe 31a) des Principes directeurs des Nations Unies]. Le commentaire des Principes directeurs des Nations Unies note, dans sa discussion du concept de « légitimité », que

« Pour instaurer cette confiance, il importe généralement de s’assurer d’établir les responsabilités permettant d’éviter que les parties à une procédure de réclamation ne compromettent son bon déroulement. »

L’indépendance peut également être un facteur de la capacité d’un mécanisme à agir de manière objective, impartiale et sans parti pris et, par conséquent, équitable [voir le paragraphe 31d) des Principes directeurs des Nations Unies]. L’indépendance d’un mécanisme de réclamation peut également être un facteur permettant d’agir de manière prévisible, ce qui constitue un autre critère d’efficacité selon les Principes directeurs des Nations Unies [voir le paragraphe 31c) des Principes directeurs des Nations Unies].Note de bas de page 17

La transparence d’un mécanisme de réclamation [voir le principe directeur 31e)] et son indépendance sont également étroitement liées. Le respect de la transparence rend un mécanisme moins vulnérable à l’ingérence d’intérêts particuliers et donc plus susceptible d’agir de manière prévisible [voir le Principe directeur 31c)].

Comme on peut le constater, les critères d’efficacité du Principe directeur 31 des Nations Unies sont liés de multiples façons, et la réussite ou l’échec relatif à un critère est souvent étroitement lié aux résultats obtenus pour d’autres critères.

L’éventail des mécanismes non judiciaires visés par le Principe directeur 31 fait en sorte qu’il est impossible de prescrire, dans l’abstrait, le point précis à partir duquel une norme d’ « efficacité » est satisfaite. Pour les mêmes raisons, il n’existe pas actuellement d’outil ou d’orientation qui permettrait de porter un jugement définitif sur le niveau précis d’indépendance requis pour qu’un mécanisme de réclamation soit catégoriquement considéré comme efficace en vertu des Principes directeurs des Nations Unies. L’ « efficacité » des mécanismes de réclamation est plutôt une question de degré et dépend du contexte, et le processus de conformité avec les Principes directeurs des Nations Unies est un processus constant et itératif, fondé sur les expériences, les leçons apprises, les conseils d’institutions internationales crédibles travaillant dans le domaine des entreprises et des droits de la personne, telles que le HCDH, le Groupe de travail des Nations Unies sur les entreprises et les droits de l’homme, l’OCDE, les institutions nationales des droits de la personne, ainsi que les contributions importantes apportées par les organisations de la société civile intéressées, les syndicats et d’autres intervenants.

Il peut être particulièrement difficile pour les mécanismes de réclamation relevant de l’État d’établir et de maintenir le bon degré d’indépendance par rapport au gouvernement. Comme l’observe le HCDH dans son addendum explicatif à son rapport de 2018 au Conseil des droits de l’homme :

« 35. … une caractéristique déterminante d’un mécanisme non judiciaire relevant de l’État (par opposition à un mécanisme judiciaire) est sa relation avec le pouvoir exécutif (plutôt qu’avec l’appareil judiciaire) du gouvernement. Cela soulève des questions quant au niveau d’indépendance approprié du fonctionnement, à la lumière de son mandat, de ses fonctions et de ses pouvoirs particuliers, afin de garantir la légitimité et la confiance du mécanisme aux yeux des intervenants […]

....

28. La mesure dans laquelle un mécanisme doit être capable d’agir de manière indépendante et proactive, ainsi que les mesures nécessaires pour y parvenir, varient en fonction de la nature du mécanisme et de son mandat. Des comités de nomination indépendants pour les membres des conseils d’administration, ou la représentation des intervenants au sein des organes directeurs ou l’utilisation d’organes indépendants de contrôle ou de conseil peuvent être efficaces dans certains contextes, mais pourraient ne pas convenir dans d’autres contextes. »Note de bas de page 18 [traduction]

Pour aider les États dans cette analyse complexe, le HCDH, dans son rapport principal de 2018 sur les mécanismes de réclamation non judiciaires relevant de l’État, a présenté une série d’ « éléments » qui seront pertinents pour juger de la « légitimité » d’un mécanisme (et donc de l’« efficacité » globale telle que définie dans les Principes directeurs des Nations Unies). Deux de ces « éléments » sont directement liés à la question de l’indépendance, à savoir :

« 6.1 L’État a pris les dispositions structurelles, institutionnelles et administratives nécessaires et prévu les ressources nécessaires pour : a) assurer à chaque mécanisme relevant de l’État un niveau d’autonomie opérationnelle vis-à-vis des fonctions gouvernementales, compte tenu de son mandat et de ses fonctions; b) réduire au minimum les risques de conflit d’intérêts pour le mécanisme relevant de l’État (ou pour tout membre de son personnel) en ce qui concerne l’exercice de ses pouvoirs ou fonctions; et c) réduire autant que possible le risque de tout abus d’influence de la part de tout acteur ou groupe d’acteurs.Note de bas de page 19

… [et] ...

6.6 Les mécanismes non judiciaires relevant de l’État ont adopté et mis en œuvre des politiques et des procédures appropriées pour repérer les conflits d’intérêts (réels et potentiels), les prévenir et y réagir comme il se doit, y compris les conflits d’intérêts qui peuvent survenir lorsque le mécanisme en question assume une série de fonctions, telles que l’éducation et la sensibilisation, en sus du traitement des plaintes et du règlement des différends. »

2.6 En quoi l’indépendance des mécanismes de réclamation non judiciaires relevant de l’État est-elle pertinente pour l’accès à des mesures de remédiation efficaces en cas d’atteinte aux droits de la personne causée des entreprises?

Les personnes touchées par des atteintes aux droits de la personne causées par des entreprises ont tendance à ne pas utiliser les mécanismes de réclamation auxquels elles ne font pas confiance. Ces personnes, ainsi que les personnes et les organisations qui les représentent, éprouvent une réticence compréhensible à consacrer du temps, de l’argent et d’autres ressources précieuses à des mécanismes ou à des processus qui ont peu de chances d’aboutir à un résultat positif.

La perception d’un manque d’indépendance, que ce soit de la part du gouvernement ou d’intérêts particuliers, soulève des questions légitimes parmi les intervenants quant à savoir si la plainte sera prise au sérieux et traitée de manière équitable et impartiale, ce qui a des incidences évidentes sur l’évaluation du risque par rapport aux avantages.

Les inquiétudes concernant le manque d’indépendance seront encore plus vives dans les cas et les contextes où il existe un risque de représailles à l’encontre des personnes qui déposent une plainte. Les questions relatives à l’indépendance d’un mécanisme peuvent soulever des doutes, par exemple, quant à la fiabilité des engagements de non-divulgation ou des garanties d’anonymat. La conséquence peut être que, bien qu’il y ait un mécanisme disponible pour répondre à une réclamation en théorie, il n’y a pas de voie sûre ou réaliste pour y remédier dans les faits.

Le manque d’indépendance peut également constituer une contrainte pour les types de mesures de remédiation substantielle qu’un mécanisme peut apporter. Par exemple, cette perception peut dissuader les parties à une plainte de s’engager sérieusement et de manière proactive dans des processus visant à trouver une solution adéquate et un plan réalisable pour la mettre en œuvre (un problème particulier pour les mécanismes de réclamation qui reposent sur la bonne volonté et le dialogue plutôt que sur des pouvoirs contraignants d’enquête, d’exécution et de surveillance). Elle peut conduire les mécanismes à privilégier la prudence dans la manière dont ils traitent certains intervenants (et en particulier les entreprises qui font l’objet des réclamations), ce qui les rend inefficaces en tant que source de contestation et moins susceptibles de donner lieu à des débats qui pourraient susciter une nouvelle réflexion. Elle peut nuire à la crédibilité des recommandations formulées (par exemple sur la base de perceptions selon lesquelles un résultat a été façonné par des considérations politiques) et donc à la probabilité qu’elles soient prises au sérieux et mises en œuvre avec diligence. Les préoccupations des intervenants concernant le manque d’indépendance peuvent également limiter la capacité d’un mécanisme à explorer pleinement les répercussions des différentes options de remédiation auprès de différents groupes d’intervenants, par exemple pour garantir que les résultats sont correctement alignés sur les normes internationales en matière de droits de la personne (voir le critère d’efficacité de la « compatibilité avec les droits » du Principe directeur 31 des Nations Unies, dans l’encadré 2 ci-dessus) et que la remédiation n’entraîne pas de conséquences négatives involontaires.

2.7 Comment les mécanismes de réclamation non judiciaires relevant de l’État établissent-ils et maintiennent-ils leur indépendance?

La réponse à cette question dépend du type d’indépendance; plus précisément, il faut préciser « indépendance par rapport à qui »? Comme nous le verrons plus en détail dans la partie 3, l’indépendance des mécanismes de réclamation non judiciaires relevant de l’État comporte plusieurs dimensions, à savoir :

Les questions et les facteurs qui seront pertinents pour établir et maintenir l’indépendance vis-à-vis de chacun de ces différents groupes d’intervenants et d’intérêts sont présentés dans le tableau ci-dessous.

Tableau 1 : Facteurs relatifs à l’indépendance

Indépendance vis-à-vis de qui?

Questions et facteurs pertinents

Gouvernement

  • Questions fondamentales (y compris le mandat, les fonctions et les pouvoirs).
  • Les questions de gouvernance et de contrôle (y compris les dispositions en matière de conseil, de contrôle de la qualité et de responsabilisation).
  • Questions opérationnelles
    • Général et stratégique (y compris l’établissement et l’examen des politiques opérationnelles et des processus de réclamation).
    • Dotation en personnel et recrutement (y compris l’embauche et le licenciement).
    • Ressources et questions budgétaires (y compris l’accès à l’expertise, au soutien administratif, aux services juridiques ainsi qu’aux ressources financières).
  • Questions juridiques (par exemple, exemptions, immunités).

Entreprises

  • Questions fondamentales (y compris le mandat, les fonctions et les pouvoirs).
  • Questions opérationnelles : questions de personnel et de recrutement (y compris les congés « dans son jardin » et la rotation du personnel pour éviter que le personnel soit soumis à l’emprise des règlements ou des entreprises).
  • Règles relatives aux conflits d’intérêts (y compris les politiques, les procédures disciplinaires).
  • Risque d’être soumis à « l’emprise de la réglementation » ou à « l’emprise des entreprises » (y compris la séparation des fonctions).
  • Questions juridiques (par exemple, exemptions, immunités).

Autres intervenants

  • Questions fondamentales (y compris le mandat, les fonctions et les pouvoirs).
  • Questions opérationnelles (notamment la conception du mécanisme de réclamation, les processus de réception et de traitement des réclamations et le suivi).
  • Règles relatives aux conflits d’intérêts.
  • Questions juridiques (par exemple, exemptions, immunités).

Remarque : Des considérations particulières s’appliquent en ce qui concerne les personnes et les communautés touchées; voir la section 3.3 ci-dessous.

La section suivante (partie 3) examine les facteurs susmentionnés dans la mesure où ils concernent précisément l’OCRE (sur la base des informations disponibles pour les besoins de l’étude documentaire), et les répercussions de ces facteurs pour l’efficacité de l’OCRE (telle que définie dans les Principes directeurs des Nations Unies) et la contribution de l’OCRE à l’accès aux voies de remédiation de manière plus générale.

Partie 3. Analyse

3.1 L’indépendance de l’OCRE par rapport au gouvernement du Canada

3.1.1 Questions fondamentales

L’institution de l’OCRE a été créé par le décret 2019-1323. L’OCRE est nommé par le gouverneur en conseil en vertu de l’alinéa 127.1(1)c) de la Loi sur l’emploi dans la fonction publique en tant que conseiller spécial du ministre du Commerce international. En vertu de son instrument juridique fondateur, l’OCRE a pour mandat de promouvoir des normes sur la conduite responsable des entreprises, de conseiller les entreprises canadiennes, de conseiller le gouvernement et d’« examiner » les allégations d’atteintes aux droits de la personne découlant des activités d’entreprises canadiennes, dans des secteurs en particulier, à l’extérieur du Canada.Note de bas de page 20 Le mandat de l’OCRE comprend également la formulation de recommandations au gouvernement sur certaines questions, notamment a) l’accès aux services commerciaux et au soutien pour les entreprises considérées comme n’ayant pas agi de bonne foi au cours d’une procédure d’examen, et b) en ce qui concerne l’examen portant sur le « financement et les services que le gouvernement du Canada fournit aux entreprises canadiennes » à l’issue d’un processus d’examen.Note de bas de page 21 Toutefois, il est établi expressément que l’OCRE « n’établit aucune nouvelle norme relative à la conduite responsable des entreprises. »Note de bas de page 22 L’OCRE n’a pas le pouvoir de contraindre à la production de preuves ou de témoignages.

Observations

i) Établi par des mesures législatives subordonnées (ou une « législation déléguée »), l’OCRE est plus désarmé en cas de modifications ou annulations – par exemple, à la suite d’un changement de gouvernement ou de priorités politiques – que s’il avait été créé par une législation primaire. Alors que les mesures législatives subordonnées peuvent généralement être abrogées ou modifiées par une nouvelle mesure du pouvoir exécutif, la loi de base ne peut être abrogée ou modifiée sans un nouveau débat parlementaire, ce qui suppose un contrôle beaucoup plus important de la part des représentants élus.

(ii) Il existe un risque de tension entre a) le rôle de l’OCRE en tant qu’élément d’un ministère axé sur la promotion du commerce et b) son rôle de gardien des normes internationales sur la responsabilité des entreprises et de mécanisme de réclamation pour les atteintes aux droits de la personne commises par les entreprises, qui pourrait s’avérer difficile à gérer dans la pratique.

(iii) Le manque de clarté de l’instrument juridique fondateur de l’OCRE concernant la mesure dans laquelle l’OCRE peut fournir des orientations aux entreprises n’est pas utile. Si la référence aux « normes » à l’article 6 du décret peut être interprétée comme étant limitée à la promulgation de règles et de règlements juridiquement contraignants, cela peut être cohérent avec le statut juridique actuel de l’OCRE en tant qu’organisme ne disposant d’aucun pouvoir réglementaire délégué (et distinct des organismes quasi judiciaires établis en vertu des lois du Canada). Toutefois, si l’interdiction prévue à l’article 6 du décret (c’est-à-dire la création de nouvelles « normes » relatives à la conduite responsable des entreprises) peut être interprétée comme s’étendant même à la promulgation d’orientations non contraignantes pour les entreprises, cela semble, à première vue, inutilement limitatif et difficile à concilier avec le mandat de l’OCRE, qui est de « conseiller les entreprises canadiennes sur leurs pratiques et leurs politiques au regard des principes de conduite responsable des entreprises. »

(iv) L’absence de pouvoirs d’enquête ayant force exécutoire de l’OCRE accroît sa dépendance à l’égard d’autres sources d’information, y compris des sources gouvernementales, ce qui a des conséquences évidentes sur sa capacité à agir de sa propre initiative.

(v) La capacité de l’OCRE à ne formuler que des recommandations, par opposition à des orientations ayant force exécutoire (par exemple en ce qui concerne l’admissibilité d’une entreprise à de futurs services et soutiens commerciaux), érode encore son influence sur les acteurs gouvernementaux et commerciaux (une question examinée plus en détail au point 3.2 ci-dessous).

(vi) D’autre part, la capacité de l’OCRE à effectuer des examens d’entreprises à sa propre initiative est importante pour son autonomie opérationnelle (voir ci-dessous).

3.1.2 Questions de gouvernance et de contrôle

L’OCRE est décrit comme relevant de la ministre du Commerce international, mais l’institution est censé fonctionner de manière indépendante du gouvernement (l’organe exécutif compétent étant Affaires mondiales Canada).Note de bas de page 23 En vertu de la loi fondatrice de l’OCRE, ce dernier doit soumettre à la ministre un rapport annuel sur ses activités, qui est présenté au Parlement et mis à la disposition du public sur le site Web de l’OCRE.)Note de bas de page 24 

L’instrument juridique fondateur de l’OCRE prévoit, outre les rapports annuels mentionnés ci-dessus, la présentation à la ministre d’« évaluations initiales », de « rapports provisoires » et de « rapports finaux » relatifs à un examen, ainsi que de rapports sur les activités de suivi, qui doivent également être mis à la disposition du public après leur présentation à la ministre.Note de bas de page 25 Selon les procédures opérationnelles de l’OCRE,Note de bas de page 26 la ministre doit recevoir les rapports 30 jours avant leur publication sur le site Web de l’OCRE.Note de bas de page 27 Les rapports concernant les entreprises du secteur de l’extraction sont transmis au ministre des Ressources naturelles en même temps qu’à la ministre du Commerce international.Note de bas de page 28

En vertu de dispositions supplémentaires énoncées dans une lettre de la ministre adressée à l’OCRE le 4 octobre 2022,Note de bas de page 29 l’OCRE doit soumettre à la ministre au plus tard le 1er novembre de chaque année un rapport annuel des réalisations comprenant « des mesures qualitatives et quantitatives de la façon dont l’OCRE s’est acquitté de chaque aspect de son mandat, en renvoyant aux objectifs et aux indicateurs de rendement énoncés dans le plan de travail » (sur le plan de travail annuel, voir la section 3.1.3 ci-dessous). Ce rapport est ensuite déposé devant le Parlement conformément à l’article 13 du décret 2019-1323.

Cette même lettre indique que la ministre s’attend à ce qu’il y ait également

En outre, l’ébauche d’un cadre de coopération entre Affaires mondiales Canada et l’Ombudsman canadien de la responsabilité des entreprises (l’« ébauche de cadre de coopération »)Note de bas de page 30 engage Affaires mondiales Canada à « fournir de la rétroaction régulière sur les objectifs et le rendement [de l’OCRE] » [traduction]. Ce même projet d’accord engage également l’OCRE à « partager avec le Ministère des informations pertinentes non classifiées et non commercialement sensibles », à « informer [Affaires mondiales Canada] de tout rapport ou conseil produit par l’OCRE avant de les rendre publics » et à « consulter le Ministère [ou d’autres ministères, le cas échéant] lorsqu’il est question d’enjeux qui relèvent de leurs mandats respectifs ou qui touchent aux priorités plus larges du gouvernement du Canada » [traduction].

Observations

(i) Malgré les nombreuses références dans les documents officiels au statut « indépendant » de l’OCRE (vis-à-vis du gouvernement), il existe un certain nombre de caractéristiques des accords de gouvernance et de contrôle entre l’OCRE et les ministres et ministères concernés qui peuvent avoir une incidence sur la capacité de l’OCRE à fonctionner de manière indépendante dans la réalité.

(ii) Bien qu’un certain degré de contrôle et d’examen par la direction des activités de l’OCRE soit manifestement nécessaire (p. ex. par la présentation et le dépôt d’un rapport annuel) et si une communication permanente entre l’OCRE et AMC est évidemment souhaitable pour assurer la cohérence des politiques, des exigences excessives en matière de partage d’informations ou d’autorisation (et en particulier celles qui peuvent avoir une incidence sur la capacité de l’OCRE à rendre compte précisément des résultats de la consultation des intervenants ou qui peuvent susciter des attentes quant à la volonté de l’OCRE de prendre en compte des suggestions de révisions substantielles du contenu) soulèveront des questions légitimes parmi les intervenants quant à la capacité du mécanisme à fonctionner indépendamment du gouvernement dans la réalité.

(iii) La pratique consistant à donner aux ministres un aperçu préalable des rapports relatifs aux examens (même si cela n’est fait que par courtoisie) soulèvera des questions légitimes quant à savoir si un équilibre correct a été trouvé en ce qui concerne la responsabilité de l’OCRE vis-à-vis du gouvernement par rapport aux autres intervenants. Comme nous l’avons indiqué ci-dessus, le décret impose à l’OCRE de fournir aux ministres des « évaluations initiales », des « rapports provisoires » et des « rapports finaux » relatifs à un examen, ainsi que des rapports sur les activités de suivi, dans chaque cas avant la publication. Les procédures opérationnelles de l’OCRE confirment que les ministres auront connaissance des rapports relatifs aux cas de révision individuels 30 jours avant leur publication. En supposant qu’il s’agisse d’une simple « courtoisie » et non d’une rétroaction substantielle sur le contenu, cette période de préavis de 30 jours semble excessivement longue, surtout si on la compare au délai dont disposent les parties à une réclamation d’examiner et de commenter les faits contenus dans un rapport. Selon les propres procédures opérationnelles de l’OCRE, les informations pertinentes ne doivent être partagées que « [si l’ombudsman] estime » que les renseignements contenus dans un rapport peuvent avoir un effet préjudiciable sur l’une des parties. Une fois encore, la perception (qui pourrait même être fondée) selon laquelle les ministres peuvent avoir une plus grande possibilité d’influencer le contenu des rapports des procédures d’examen que les parties réelles à une réclamation est susceptible de miner la confiance des intervenants dans l’indépendance du mécanisme.

(iv) Les messages concernant les relations de l’OCRE avec le gouvernement sont parfois confus et contradictoires. Par exemple, l’OCRE est décrit comme fonctionnant « de façon indépendante » du gouvernement tout en étant présenté comme un élément clé de la « stratégie canadienne de conduite responsable des entreprises à l’étranger » du gouvernement.

(v) Les dispositions de l’ébauche d’accord-cadre de coopération sur l’échange d’informations sont extrêmement larges et vagues. Ce document, qui décrit les accords opérationnels et autres conclus entre l’OCRE et le ministère compétent, semble destiné à coexister avec la lettre d’octobre 2022 sur l’Énoncé des priorités et des responsabilités. La relation entre ces deux dispositions n’est pas précisée. Toutefois, l’hypothèse de travail (du moins celle du personnel de l’OCRE) est que la lettre de la ministre prévaudrait en cas d’incohérence. Si tel est le cas, il semblerait que la ministre dispose d’un moyen simple de modifier unilatéralement les termes des accords avec le Ministère, en dehors des modalités de l’ébauche d’accord-cadre de coopération elle-même.

3.1.3 Questions opérationnelles : générales et stratégiques

En vertu de son instrument juridique fondateur, l’OCRE a le pouvoir discrétionnaire de déterminer la manière dont les examens doivent être menés et peut, « à son entière discrétion », refuser d’examiner une plainte.Note de bas de page 31 Les procédures d’un « processus d’examen équitable et transparent » doivent être élaborées par l’OCRE, qui a le pouvoir discrétionnaire (mais non l’obligation) de tenir compte des recommandations du « Groupe consultatif sur la conduite responsable des entreprises »Note de bas de page 32 (voir les points 3.2.1 et 3.3.1 ci-dessous). L’approche de l’OCRE en ce qui concerne la conduite des examens est définie dans un ensemble spécial de « procédures opérationnelles » élaborées et publiées par l’OCRE.Note de bas de page 33

En vertu de dispositions supplémentaires énoncées dans la lettre d’octobre 2022 sur l’Énoncé des priorités et des responsabilités,Note de bas de page 34 l’OCRE doit soumettre à la ministre un plan de travail annuel avant le 30 juin de chaque année « décrivant les domaines d’intérêt et les activités proposés pour [l’OCRE] » et comprenant « des indicateurs de rendement pour chaque aspect [du mandat de l’OCRE]. »

La dernière version de la stratégie du gouvernement canadien en matière de conduite responsable des entreprises prévoit d’établir un « organisme consultatif multilatéral pour fournir des conseils à Affaires mondiales Canada en matière de CRE,Note de bas de page 35 et [de] veiller à ce qu’un tel organisme comprenne des personnes sous-représentées, y compris celles provenant de collectivités marginalisées ou vulnérables ».Note de bas de page 36 Toutefois, le statut officiel de cet organisme (que l’on suppose être le même que celui mentionné à l’article 9 du décret 2019-1323) est celui d’un conseiller du ou de la ministre, et non de l’OCRE. Bien qu’il ne semble pas conforme au statut « indépendant » de l’OCRE de chercher à consulter cet organisme consultatif particulier, cela n’empêcherait pas en soi l’OCRE de chercher à établir un organisme consultatif précis pour lui-même afin d’agir comme une caisse de résonance et une source de conseils pour l’OCRE sur un large éventail de questions opérationnelles, d’une manière similaire à celle envisagée pour le conseil consultatif multipartite d’AMC.

D’autres questions opérationnelles liées au personnel, aux ressources et au budget sont abordées dans les sections 3.1.4 à 3.1.6 ci-dessous.

Observations

(i) Le fait que l’OCRE conserve le pouvoir discrétionnaire de décider de la meilleure manière de procéder à un examen, y compris de le poursuivre ou d’y mettre fin, est important pour l’autonomie opérationnelle de l’OCRE. Toutefois, comme nous l’avons indiqué à la section 3.1.2 ci-dessus, les exigences, les attentes et les engagements concernant le partage d’informations entre l’OCRE et les ministres et ministères concernés, y compris en ce qui concerne les examens en cours, peuvent avoir un effet négatif sur la perception qu’ont les parties prenantes de l’indépendance de l’OCRE vis-à-vis du gouvernement, ce qui a des répercussions sur la confiance des intervenants.

(ii) L’affirmation selon laquelle l’OCRE fonctionne en toute indépendance par rapport au gouvernement peut également être remise en question s’il y a des échanges excessifs entre l’OCRE et les ministres et ministères concernés avant l’accord sur le plan de travail annuel, et plus encore si des modifications substantielles sont demandées par le gouvernement avant l’approbation et la publication du plan. La lettre d’octobre 2022 sur l’Énoncé des priorités et des responsabilités ne précise pas si la ministre a le droit de demander des révisions d’un plan de travail annuel, ni dans quelle mesure ces questions peuvent faire l’objet de négociations. Bien que les acteurs actuels puissent s’entendre sur les répercussions pratiques de l’indépendance de l’OCRE (y compris sur le fait que les plans de travail annuels seront acceptés « tels quels »), les demandes de modification ou de négociation de certains aspects du plan de travail annuel formulées par les futurs ministres auraient des répercussions évidentes sur l’indépendance de l’OCRE. Il pourrait donc être utile de mettre par écrit l’entente actuelle et de l’intégrer dans une forme d’accord (par exemple, le projet d’accord-cadre de coopération).

(iii) Il peut également être utile de consigner par écrit la mesure dans laquelle l’OCRE sera autorisé à s’écarter du plan de travail annuel (par exemple, en cas d’urgence, de crise généralisée, telle qu’une pandémie mondiale, ou de changement de circonstances).

3.1.4 Questions opérationnelles : dotation en personnel et recrutement

Sélection et nomination de l’ombudsman

Comme indiqué ci-dessus, l’OCRE est un fonctionnaire employé par le ministère des Affaires étrangères, du Commerce et du Développement, qui porte le titre de conseiller spécial du ministre du Commerce international. Il s’agit d’un poste de niveau GCQ-6, une nomination de haut niveau au sein de la fonction publique canadienne, dont l’ancienneté équivaut à celle d’un sous-ministre adjoint. La procédure de nomination de l’OCRE est la même que pour toutes les nominations par le gouverneur en conseil et repose sur les principes d’ouverture, de transparence et de nomination sur la base du mérite.Note de bas de page 37 Dans le cadre de ce processus, un comité de sélection est formé et chargé de recommander des candidats à la nomination, sur la base des critères d’admissibilité fixés par le comité de sélection. Le poste est annoncé publiquement au moyen d’un « Avis de débouchés professionnels » publié sur les sites Web des ministères concernés et dans la Gazette du Canada. Les candidats inscrits sur une liste restreinte de candidats qualifiés passent un entretien avec le comité de sélection. L’OCRE est nommé pour une période maximale de cinq ans (à temps plein), qui peut ensuite être « renouvelée » pour une nouvelle période à la discrétion de l’organe de nomination.Note de bas de page 38 En vertu du décret 2019-1323, l’OCRE occupe son poste « à titre inamovible », ce qui signifie, selon les « Modalités applicables aux personnes nommées par le gouverneur en conseil » du gouvernement, qu’il ne peut être relevé de ses fonctions que « pour des raisons valables. »Note de bas de page 39

L’OCRE est soumis aux « Lignes directrices relatives aux activités politiques des titulaires de charge publique », qui font partie de la politique canadienne pour un gouvernement ouvert et responsable (2015).Note de bas de page 40 Les présentes lignes directrices reposent sur un principe général selon lequel :

« Le titulaire d’une charge publique ne doit pas participer à des activités politiques qui sont perçues ou pourraient raisonnablement être perçues comme étant incompatibles avec ses fonctions publiques ou comme pouvant nuire à sa capacité d’exercer ses fonctions de manière politiquement impartiale, ou encore qui pourraient jeter le doute sur l’intégrité ou l’impartialité de sa charge. »Note de bas de page 41

Observations

(i) Le respect de procédures de nomination transparentes et équitables pour la désignation du personnel clé est essentiel pour la crédibilité et la légitimité des mécanismes de réclamation relevant de l’État aux yeux des intervenants. Les documents d’orientation relatifs à la nomination de l’OCRE semblent bien le reconnaître.

(ii) Une forte participation des intervenants à la composition des comités de sélection pour les postes clés peut contribuer à garantir que toute préoccupation concernant un manque d’indépendance de la part d’un candidat soit exprimée et examinée dès le départ. Il est également important de faire preuve de diligence raisonnable en ce qui concerne les antécédents des candidats, afin de s’assurer que toutes les sources possibles de conflit d’intérêts sont cernées et prises en compte.

(iii) Plusieurs questions relatives au renouvellement du mandat de l’OCRE ne sont pas claires. Du point de vue de l’indépendance de l’OCRE, le manque de clarté qui entoure la question de

· la durée d’un éventuel second mandat (c’est-à-dire d’un « renouvellement ») de l’OCRE est particulièrement préoccupant,

· tout comme les facteurs à prendre en compte pour décider si le mandat de cinq ans de l’OCRE doit être prolongé (à noter que la décision de renouveler ou non un mandat semble être laissée à la discrétion du ministre), et

·  la définition de la norme « à titre inamovible » qui s’applique à la poursuite des deux mandats en vertu du décret.

Une plus grande clarté sur ces questions contribuerait à réduire le risque d’ingérence politique dans le rôle et les travaux de l’OCRE.

Recrutement de personnel

L’OCRE est responsable du recrutement de son propre personnel qui, une fois nommé, devient employé du ministère des Affaires étrangères, du Commerce et du Développement en vertu de la Loi sur l’emploi dans la fonction publique. Le recrutement est effectué par l’OCRE conformément à un document officiel d’Affaires mondiales Canada conférant un pouvoir de décision et d’approbation subdélégué en ce qui concerne les décisions de recrutement et d’embauche.Note de bas de page 42 En vertu de cet accord, l’OCRE, dans l’exercice de l’autorité subdéléguée, est tenu de faire ce qui suit :

« Respecter les valeurs de la [Loi sur l’emploi dans la fonction publique] (mérite, impartialité, justice, accessibilité, transparence et représentativité) et répondre aux exigences de la [Loi], du Règlement sur l’emploi dans la fonction publique, de la Politique de nomination de la CFP, des politiques organisationnelles et de tout autre texte réglementaire applicable qui a trait à l’intégrité des nominations. »Note de bas de page 43 [traduction]

En outre, comme nous l’avons indiqué ci-dessous, l’OCRE dépend d’Affaires mondiales Canada pour une série de services d’appui internes, notamment les ressources humaines, la gestion financière, les services juridiques et l’appui informatique. L’OCRE a approuvé un financement permanent des salaires pour 14 postes (ETP), y compris l’ombudsman elle-même. En outre, l’OCRE engage, de temps à autre, du personnel à court terme (« personnel occasionnel ») pour 90 jours par an, des étudiants, des employés à temps partiel et des employés « à durée déterminée » dont la durée n’excède pas 3 ans. Les coûts de ce personnel occasionnel et de courte durée sont couverts par le budget de fonctionnement de l’OCRE. Actuellement, 26 personnes travaillent à l’OCRE (comprenant à la fois des employés nommés pour une durée indéterminée et des personnes occupant un poste de plus courte durée, y compris le personnel occasionnel). Tous les membres du personnel (ETP et non indéterminés) sont soumis

La pertinence de ces éléments pour l’indépendance de l’OCRE vis-à-vis des autres intervenants (et en particulier des entreprises) est examinée plus loin (voir les sections 3.2.2 à 3.2.4 ci-dessous).

En cas de non-respect de l’une de ces normes, il incombe au représentant des travailleurs d’AMC affecté à l’OCRE par le service des ressources humaines d’Affaires mondiales Canada de veiller au bon déroulement de toute procédure disciplinaire pertinente.

Observations

(i) Le fait que l’OCRE dispose d’un pouvoir délégué en matière de finances et de personnel, c’est-à-dire de la responsabilité et de l’autorité ultime sur les personnes qu’il a recrutées, est important pour l’autonomie opérationnelle de l’OCRE.

(ii) La capacité de l’OCRE à concevoir et à mettre en œuvre des politiques en matière de discipline et de conflits d’intérêts précisément adaptées à ses activités risque d’être limitée par le fait que toutes les embauches et toutes les cessations d’emploi sont soumises aux règles et aux politiques qui régissent l’ensemble de la fonction publique.Note de bas de page 44

(ii) Le fait que l’OCRE relève d’Affaires mondiales Canada pour les divers services de soutien interne énumérés ci-dessus a des conséquences évidentes sur l’autonomie opérationnelle de l’OCRE. La dépendance de l’OCRE à l’égard des conseillers juridiques du Ministère pourrait poser d’importants problèmes

3.1.5 Questions opérationnelles : allocations de fonds et budget

L’OCRE reçoit un financement permanent d’Affaires mondiales Canada (AMC), une composante des crédits d’AMC approuvés par le Parlement. En ce qui concerne les allocations de financement « permanentes », la position semble être que, selon les règles du ministère des Finances et du Conseil du Trésor, elles ne peuvent être révoquées ou réduites une fois qu’elles ont été annoncées dans le budget fédéral et approuvées par le Conseil du Trésor, bien qu’elles puissent faire l’objet de réductions gouvernementales « généralisées. ». La procédure d’attribution des fonds suppose la présentation d’un budget annuel par l’OCRE à AMC. Toutefois, l’OCRE dispose d’une autonomie en matière de composition du budget et de dépenses, sous réserve des règles et règlements financiers qui s’appliquent à toutes les institutions du gouvernement fédéral. Un financement permanent supplémentaire peut être demandé par l’intermédiaire d’AMC au ministre du Commerce international, qui, s’il l’approuve, le soumettra au ministère des Finances. S’il est approuvé par le ministère des Finances, un financement permanent supplémentaire sera inclus dans le budget fédéral et déposé devant le Parlement. Le processus nécessite ensuite une présentation au Secrétariat du Conseil du Trésor exposant l’objectif et l’incidence prévue du financement supplémentaire. Ce financement supplémentaire est ensuite débloqué sous réserve de l’approbation du Conseil du Trésor.

Si les demandes de fonds supplémentaires ponctuels pour un exercice donné ne sont pas approuvées par AMC, l’OCRE peut toujours adresser une demande au ministre du Commerce international ou une demande de financement en dehors du cycle budgétaire au ministère des Finances.

Les progrès réalisés par l’OCRE par rapport aux indicateurs de rendement (par exemple dans le rapport annuel des réalisations de l’OCRE soumis au ministre) ne sont pas officiellement pris en compte dans les décisions de financement, bien qu’il soit entendu que la démonstration du « rapport qualité-prix » peut être importante pour persuader le ministre de soutenir les demandes de financement supplémentaire de temps à autre.

Comme toute entité gouvernementale, l’OCRE fait l’objet d’un audit financier régulier; toutefois, on ne sait pas exactement quand ou à quelle fréquence un tel audit aurait lieu, et aucun n’a encore eu lieu.

La lettre d’octobre 2022 sur l’Énoncé des priorités et des responsabilités confirme un budget de fonctionnement actuel pour l’OCRE de 4,3 millions de dollars par an (comprenant un budget de fonctionnement de 3,7 millions de dollars et le reste sous forme de fonds non discrétionnaires). Le financement de l’OCRE provient de trois sources distinctes. Après déduction des montants non discrétionnaires (c’est-à-dire les coûts de fonctionnement et les avantages sociaux), l’OCRE dispose d’un contrôle (c’est-à-dire d’un pouvoir discrétionnaire sur les dépenses) de 3 439 248 $ pour l’exercice 2021-2022 et de 3 731 263 $ pour l’exercice 2022-2023 et les exercices suivants. L’ébauche d’accord-cadre de coopération entre l’OCRE et Affaires mondiales Canada contient peu d’informations sur la manière dont les fonds seront alloués à l’avenir, se contentant d’indiquer que toute réduction future du budget « tiendra compte de l’indépendance de l’OCRE »Note de bas de page 45 [traduction]. Toutefois, le budget fédéral de 2021 indique que le financement sera « continu. » Lors de son témoignage devant un sous-comité parlementaire le 23 février 2021, l’actuelle ombudsman, Mme Sheri Meyerhoffer, a estimé que le budget alloué à l’OCRE était suffisant pour répondre à ses besoins à l’époque.Note de bas de page 46

Observations

(i) Le fait que l’OCRE reçoit une allocation spéciale d’un budget ministériel et qu’il a le contrôle de la manière dont cette allocation est dépensée est important du point de vue de l’établissement et du maintien d’un certain degré d’indépendance par rapport au gouvernement. La décision de financer l’OCRE sur une base « permanente » contribue à réduire le risque de manipulation des décisions de financement à des fins politiques (par exemple, dans le pire des scénarios, afin de limiter les activités de l’OCRE considérées comme allant à l’encontre d’autres objectifs politiques, commerciaux ou diplomatiques). Toutefois, les liens entre la démonstration du « rapport qualité-prix » et la prise de décision future en matière de financement (en particulier les critères qui régiront toute réduction ou augmentation du financement) ne semblent pas avoir été clairement définis. Il convient de les clarifier et d’envisager de leur donner une assise juridique plus solide pour l’avenir.  

(ii) En plus d’améliorer la clarté, il est important de contrôler et de limiter la mesure dans laquelle les critères pertinents pour l’attribution des fonds peuvent être modifiés unilatéralement par les organes gouvernementaux concernés (par exemple, le ministre, le Ministère ou le Conseil du Trésor). Même si l’ébauche d’accord-cadre de coopération pouvait être grandement clarifiée en ce qui concerne les affectations de fonds, par exemple, la facilité avec laquelle cet accord peut être résilié signifie que l’accord-cadre, en tout état de cause, pourrait fournir peu de certitudes pratiques.

(iii) Bien que le financement « permanent » dans le cadre du budget fédéral actuel offre un certain degré de stabilité, l’OCRE peut être vulnérable à des réductions de financement en cas de changement de gouvernement.

3.1.6 Questions opérationnelles : autres ressources

Les modalités de l’ébauche d’accord-cadre de coopérationNote de bas de page 47 suggèrent que l’OCRE dépend d’Affaires mondiales Canada pour « les services et le soutien internes, tels que les ressources humaines, la gestion financière, la rémunération, la gestion des locaux, la gestion du matériel, la technologie de l’information, les services généraux, les services juridiques, la planification et les rapports généraux, l’accès à l’information et la protection des renseignements personnels (AIPRP), la sécurité et la planification d’urgence, et les services de communication » [traduction].Note de bas de page 48

Observations

i) La dépendance de l’OCRE à l’égard des services de communication du gouvernement du Canada (par l’intermédiaire d’Affaires mondiales Canada) pose problème du point de vue de l’indépendance de l’OCRE. Il en résulte que l’OCRE ne semble pas avoir d’autonomie en ce qui concerne ce qu’il publie et le moment où il le fait sur son site Web. Compte tenu de l’importance des communications en ligne en tant que source d’information pour les intervenants (par exemple en ce qui concerne le rôle de l’OCRE en tant que mécanisme de réclamation non judiciaire, et en ce qui concerne l’avancement et les résultats des examens), il conviendrait d’examiner comment renforcer l’autonomie de l’OCRE en matière de communication avec les intervenants (et donc sa capacité à satisfaire aux critères d’efficacité des Principes directeurs des Nations Unies que sont l’« accessibilité » et la « transparence »).

ii) En ce qui concerne les répercussions de la dépendance de l’OCRE à l’égard du gouvernement du Canada pour les services juridiques, voir la section 3.1.7 ci-dessous.

3.1.7 Questions juridiques : protection des renseignements personnels et accès du public aux informations détenues par les autorités publiques/immunités juridiques

Dans sa composition actuelle, l’OCRE est assujetti à la Loi sur la protection des renseignements personnels et à la Loi sur l’accès à l’information. La Loi sur la protection des renseignements personnels protège les renseignements personnels des particuliers contre toute utilisation à des fins autres que celles pour lesquelles ils ont été recueillis, mais, selon un avis juridique de 2019 fourni par Me Barbara McIsaac, c.r. (l’« avis McIsaac »), l’OCRE serait tout de même tenu de divulguer des renseignements à caractère personnel dans certaines circonstances, aux termes de cette loi. Dans ses Procédures opérationnelles du Mécanisme de responsabilisation des droits de la personne,Note de bas de page 49 l’OCRE confirme qu’il n’utilisera pas ou ne divulguera pas de renseignements personnels sans le consentement de la personne à qui ils appartiennent, à moins qu’un tribunal n’ordonne à l’OCRE de le faire. Toutefois, selon l’avis McIsaac, les renseignements recueillis par l’OCRE et fournis par des tiers, y compris les renseignements confidentiels fournis par des entreprises canadiennes, peuvent faire l’objet d’une demande de divulgation au titre de la Loi sur l’accès à l’information. L’avis juridique McIsaac note en outre que l’OCRE ne bénéficie pas de protections prévues expressément dans la loi contre la responsabilité civile ou pénale dans l’exercice de ses fonctions, y compris de protections contre les poursuites pour diffamation.Note de bas de page 50

Observations

i) L’efficacité des mécanismes de réclamation non judiciaires relevant de l’État, au sens des Principes directeurs des Nations Unies, dépend de la possibilité pour les personnes d’avoir recours à ces mécanismes en toute confiance et sans crainte de représailles. Par conséquent, la possibilité que la capacité de l’OCRE à offrir et à respecter des engagements de confidentialité et des garanties d’anonymat soit soumise à des contraintes juridiques ou qu’elle soit annulée par un tribunal pour cause d’incompatibilité avec d’autres lois canadiennes est une source de préoccupation importante.

ii) Le fait que l’OCRE dépend du ministère de la Justice pour ses conseils juridiques peut limiter sa capacité à élaborer sa propre approche de la vie privée et de la protection des renseignements, adaptée aux types de procédures d’« examen » qui peuvent être entreprises dans le cadre de son mandat (et qui pourraient supposer des plaignants, tels que les défenseurs des droits de la personne, qui peuvent être très vulnérables au risque de représailles, y compris de la part d’intérêts gouvernementaux ou commerciaux dans leur pays d’origine). Cette situation peut également limiter la capacité de l’OCRE à offrir des engagements de confidentialité aux entreprises, ce qui peut s’avérer nécessaire pour encourager la participation à l’examen des plaintes et aux examens.

3.2 L’indépendance de l’OCRE par rapport aux entreprises

3.2.1 Questions fondamentales

Voir le résumé au point 3.1.1 ci-dessus. Aux fins de la présente discussion, il est pertinent de rappeler en particulier

Il convient également de rappeler qu’en vertu du décret, le champ d’activité de l’OCRE est limité aux entreprises canadiennes « [exerçant des activités] à l’extérieur du Canada dans le secteur du vêtement ou les secteurs minier ou pétrolier et gazier » (ainsi qu’aux filiales de ces entreprises qui exercent des activités dans les mêmes secteurs).Note de bas de page 52

Observations

(i) La capacité de l’OCRE, dans le cadre de son mandat, à entreprendre des examens à sa propre initiative, ainsi que son pouvoir d’accepter ou de refuser une plainte à son « entière discrétion » sont importants pour son indépendance. Toutefois, sa capacité à répondre aux allégations de manière solide et indépendante risque d’être compromise dans la pratique par l’absence de pouvoirs d’enquête, ce qui signifie que l’OCRE dépend grandement de la bonne volonté des acteurs économiques pour accéder aux renseignements et au personnel nécessaires à une enquête approfondie sur les questions soulevées.

(ii) Le décret fait allusion à certains moyens qui peuvent être pris pour inciter les entreprises à coopérer aux enquêtes, y compris la possibilité que l’OCRE recommande le retrait de certains services commerciaux ou du soutien du gouvernement du Canada. Cependant, tout effet de levier que cela pourrait supposer [qui aurait pu contribuer à compenser l’absence de pouvoirs d’enquête, voir le point i) ci-dessus] sera affaibli par le fait qu’il ne s’agit que de recommandations, sans conséquences juridiques contraignantes, que le ministre concerné peut refuser de mettre en œuvre (sous réserve des exigences du droit administratif canadien en ce qui concerne des questions telles que la prise de décision et l’utilisation du pouvoir discrétionnaire du pouvoir exécutif).

(iii) Les répercussions et les défis liés à la combinaison d’un rôle de « promotion » et de « sensibilisation » avec un rôle de « supervision » ou de « conformité » sont examinés séparément à la section 3.2.4 ci-dessous.

3.2.2 Questions opérationnelles : dotation en personnel et recrutement

Voir le résumé au point 3.1.4 ci-dessus. Aux fins de la présente analyse, il convient de rappeler en particulier les procédures de nomination par le gouverneur en conseil puisque l’OCRE fait l’objet de ce type de nomination.

La position concernant le personnel de niveau inférieur à l’OCRE est examinée aux points 3.2.3 et 3.2.4 ci-dessous.

Observations

i) Les documents d’orientation du gouvernement du Canada relatifs aux « nominations par le gouverneur en conseil » (la procédure qui s’applique à la nomination de l’OCRE) soulignent l’importance d’un examen de la diligence raisonnable dans les antécédents des candidats pour s’assurer qu’ils répondent aux critères de sélection et que toutes les sources possibles de conflit d’intérêts sont relevées (voir plus loin la section 3.2.3). Compte tenu de la nature de la fonction, une bonne compréhension de la gestion d’entreprise et des marchés, en particulier dans les secteurs couverts par le mandat de l’OCRE, est susceptible de constituer un avantage. Comme nous l’avons indiqué ci-dessus (voir section 3.1.4, « Observations »), le fait de veiller à ce que les intervenants puissent participer activement à la composition des comités de sélection pour les postes clés peut contribuer à garantir que toute préoccupation concernant un manque d’indépendance de la part d’un candidat puisse être exprimée dès le début du processus, y compris en raison d’une participation dans le passé aux activités d’entreprises qui peuvent faire l’objet de plaintes auprès de l’OCRE.

3.2.3 Conflits d’intérêts

En tant que titulaire d’une charge publique, l’OCRE est soumis à la Loi sur les conflits d’intérêts du Canada de 2006, qui l’oblige :

Cette loi oblige également les titulaires de charges publiques, dans les 60 jours suivant leur nomination, à présenter au commissaire aux conflits d’intérêts et à l’éthique un rapport confidentiel faisant état d’informations sur les emplois, les fonctions de consultant ou les fonctions consistant à « administrer ou [à] exploiter une entreprise ou une activité commerciale » que le ou la titulaire de la charge publique a exercées au cours des deux années précédentes.Note de bas de page 54 Le commissaire examine le contenu du rapport confidentiel avec le ou la titulaire de la charge publique concernée (sur une base annuelle) pour s’assurer que la Loi est respectée.

Comme indiqué ci-dessus (voir section 3.1.4), les autres membres du personnel de l’OCRE (ETP et employés autres que les employés nommés pour une période indéterminée) sont soumis à ce qui suit :

Le code de valeurs et d’éthique d’AMC contient des orientations détaillées pour les fonctionnaires sur les questions d’éthique, y compris la façon de reconnaître et d’éviter les conflits d’intérêts. Des conseils sont donnés sur les cadeaux et l’hospitalité, par exemple, ainsi que sur les activités extérieures.

Observations

i) Les dispositions solides des lois canadiennes régissant les conflits d’intérêts des titulaires de charges publiques renforcent la confiance dans l’intégrité et l’indépendance de l’OCRE par rapport aux intérêts commerciaux.

(ii) Pour renforcer l’indépendance par rapport aux intérêts commerciaux et souligner l’importance de ces considérations auprès du personnel de l’OCRE, il pourrait être utile que l’OCRE élabore des politiques en matière de conflits d’intérêts (y compris en ce qui concerne le recrutement et les mesures disciplinaires prévues en cas de conflits d’intérêts) spécialement conçues pour les travaux de l’OCRE. Comme nous l’avons indiqué précédemment, la capacité de l’OCRE à concevoir et à mettre en œuvre des politiques en matière de discipline et de conflits d’intérêts précisément adaptées à ses activités risque d’être limitée par le fait que toutes les embauches et toutes les cessations d’emploi sont soumises aux règles et aux politiques qui régissent l’ensemble de la fonction publique.Note de bas de page 55 Toutefois, l’OCRE pourrait étudier la possibilité d’une orientation « consultative » destinée précisément au personnel de l’OCRE (et en particulier aux membres du personnel qui participent à l’examen des plaintes ou des allégations dans le cadre du mandat de l’OCRE). Entre-temps, les normes génériques élaborées pour l’ensemble de la fonction publique semblent répondre, au moins en termes généraux, au problème de la « l’emprise » sur l’OCRE par les entreprises au moyen du recrutement et de situations de conflit d’intérêts d’après-mandat.

3.2.4  « Emprise de la réglementation »

L’emprise de la réglementation (également appelée « emprise des entreprises ») fait référence à la possibilité que des organismes de réglementation soient dominés ou indûment influencés par des entreprises qu’ils sont chargés de réglementer. Afin d’évaluer dans quelle mesure l’OCRE peut être sujet à une « emprise de la réglementation », il convient de rappeler qu’en vertu de son instrument juridique fondateur, l’OCRE a pour mandat de promouvoir des normes sur la conduite responsable des entreprises, de conseiller les entreprises canadiennes, de conseiller le gouvernement et d’« examiner » les allégations d’atteintes aux droits de la personne découlant des activités d’entreprises canadiennes, dans des secteurs en particulier, à l’extérieur du Canada.Note de bas de page 56

L’« emprise de la réglementation » peut également se produire lorsqu’il n’existe pas de mesures de protection suffisantes pour empêcher le personnel d’accepter des offres d’emploi de la part d’entreprises avec lesquelles il est en contact dans le cadre de son travail. À cet égard, il convient de noter les règles énoncées dans la Loi sur les conflits d’intérêts, à laquelle l’OCRE est soumis en tant que titulaire d’une charge publique, qui interdit aux titulaires de fonctions publiques

« de conclure un contrat de travail ou d’accepter une nomination au conseil d’administration d’une entité avec laquelle il a eu des rapports officiels directs et importants au cours de l’année ayant précédé la fin de son mandat, ou d’accepter un emploi au sein d’une telle entité. »Note de bas de page 57

Pour le personnel de niveau inférieur à l’OCRE, le Code de valeurs et d’éthique d’AMC (mentionné ci-dessus) prévoit ce qui suit :

« Avant de quitter leur emploi dans la fonction publique, tous les fonctionnaires doivent dévoiler leurs intentions relativement à toute activité ou à tout emploi futur à l’extérieur de la fonction publique qui pourrait présenter un risque de conflit d’intérêts réel, apparent ou potentiel avec leurs responsabilités actuelles, et discuter des conflits d’intérêts potentiels avec leur gestionnaire ou la Direction des valeurs et de l’éthique, qui consultera le sous-ministre des Affaires étrangères le cas échéant. »Note de bas de page 58

La Directive sur les conflits d’intérêts du gouvernement du Canada contient des orientations supplémentaires sur la gestion des situations susceptibles de donner lieu à une « emprise de la réglementation. » Les dispositions relatives aux « procédures de prévention et de traitement des conflits d’intérêts et de responsabilités pendant la période d’après-mandat » indiquent une période de restriction d’un an (voir A.2.2.4.3), qui peut être réduite sur demande.

Observations

i) En ce qui concerne les mécanismes de réclamation non judiciaires relevant de l’État, il peut y avoir emprise réglementaire lorsqu’un organisme se voit confier des fonctions qui peuvent exiger une collaboration étroite avec les mêmes entreprises que à qui il doit demander de rendre des comptes. Dans les cas où le « mécanisme en question assume une série de fonctions, telles que l’éducation et la sensibilisation, en sus du traitement des plaintes et du règlement des différends », le HCDH a souligné la nécessité « dans certains cas […] de séparer les fonctions pour maintenir l’objectivité et l’indépendance du personnel chargé de l’application des lois » [traduction]. Il pourrait donc être justifié de mettre en place des dispositions pour assurer un certain degré de séparation entre le personnel et les activités liées aux aspects de « promotion et de sensibilisation » du travail de l’OCRE, et ceux concernés par l’examen des allégations et des plaintes; toutefois, cela pourrait être difficile sur le plan opérationnel en raison du petit nombre d’employés de l’OCRE.

ii) Les dispositions de la Loi sur les conflits d’intérêts de 2006 relatives au travail futur (voir l’article 35) ainsi que les articles pertinents du Code de valeurs et d’éthique d’AMC devraient contribuer à réduire le risque de « capture réglementaire » de l’OCRE et de son personnel.

3.2.5 Questions juridiques

Voir le résumé au point 3.1.6 ci-dessus. Aux fins de la présente analyse, il est particulièrement pertinent de rappeler les commentaires de l’avis McIsaac sur les éventuelles lacunes et déficiences dans les protections juridiques contre la responsabilité civile accordées à l’OCRE en ce qui concerne l’exécution du mandat et des fonctions de l’OCRE en vertu du décret,Note de bas de page 59 et l’adéquation de la situation actuelle à la lumière du mandat et des fonctions particulières de l’OCRE.

Observations

i) Toute vulnérabilité de l’OCRE à l’intimidation par des poursuites-bâillons intentées par des entreprises, ou des types de litiges similaires, pourrait avoir un effet dissuasif sur la capacité de l’OCRE à mettre en cause les entreprises et à leur demander des comptes dans le cadre des procédures d’examen.

3.3 L’indépendance de l’OCRE par rapport aux autres parties prenantes

De nombreuses caractéristiques des dispositions juridiques, institutionnelles, de gouvernance et opérationnelles actuelles de l’OCRE, examinées ci-dessus, sont également pertinentes pour l’indépendance de l’OCRE par rapport aux autres intervenants. En voici quelques-unes :

Ces idées d’équité, de transparence, d’impartialité et d’intégrité s’expriment dans de nombreux (sinon tous les) critères d’efficacité du Principe directeur 31 des Nations Unies, les plus évidents étant les critères de légitimité [Principe directeur 31a)], de prévisibilité [Principe directeur 31c)], d’équité [Principe directeur 31d)], de transparence [Principe directeur 31e) et de « compatibilité avec les droits » [Principe directeur 31f)].

Toutefois, pour les mécanismes de réclamation non judiciaires relevant de l’État, l’équité et l’impartialité ne signifient pas que les parties à une réclamation doivent s’engager dans un mécanisme de réclamation exactement dans les mêmes conditions. Au contraire, comme on l’explique dans le commentaire des Principes directeurs des Nations Unies :

« Dans les réclamations ou les différends entre les entreprises et les intervenants concernés, les premières ont souvent beaucoup moins accès à l’information et aux services d’experts et n’ont souvent pas les moyens financiers de les payer. Lorsque ce déséquilibre n’est pas corrigé, il peut réduire à la fois la réalisation et la perception d’un processus équitable et rendre plus difficile la recherche de solutions durables. » [traduction]Note de bas de page 63

Ces préoccupations sont reconnues dans les Procédures opérationnelles du Mécanisme de responsabilisation des droits de la personne de l’OCRE dans les termes suivants :

« L’OCRE s’est engagé à mettre en place des processus de résolution des conflits qui permettent de corriger les déséquilibres de pouvoir, qui sont inclusifs et qui prennent en considération des éléments tels que la race, le sexe, l’origine ethnique et l’âge, ainsi que les liens entre ceux-ci. L’OCRE étudiera les moyens de remédier aux obstacles supplémentaires en matière d’accès auxquels sont confrontées les personnes et les collectivités qui courent un risque accru de violence, de vulnérabilité ou de marginalisation, en particulier les personnes et les communautés noires et autochtones. »Note de bas de page 64

En d’autres termes, tout en respectant les normes d’équité et de transparence, les mécanismes de réclamation non judiciaires relevant de l’État sont censés accorder une attention particulière aux besoins des personnes et des communautés susceptibles d’être touchées par des atteintes aux droits de la personne commises par les entreprises et pour qui l’utilisation du mécanisme a été mise en place. Cela nécessite une consultation étroite auprès des personnes touchées et leurs représentants sur la conception et le fonctionnement du mécanisme, ainsi que sur son fonctionnement dans la pratique. Comme l’a indiqué le HCDH :

« Les concepteurs et les opérateurs de mécanismes de réclamation doivent être prêts à consulter de façon véritable les intervenants (qui pourraient être) touchés à différents stades. Cette consultation devrait permettre aux personnes concernées par l’élaboration et l’exploitation du mécanisme d’entendre et de comprendre les intérêts et les besoins des intervenants et d’y répondre » [traduction]Note de bas de page 65 

Dans la pratique, donc, ces deux impératifs, soit a) s’assurer que le mécanisme répond correctement aux besoins des intervenants et des communautés touchés et b) répondre aux problèmes découlant des déséquilibres de pouvoir et de ressources entre les personnes et communautés touchées et les entreprises concernées, signifient que les mécanismes de réclamation relevant de l’État sont susceptibles d’interagir (et sont d’ailleurs censés interagir) très différemment avec les différents types d’intervenants, en trouvant un équilibre délicat entre la nécessité d’agir équitablement envers toutes les parties à une réclamation (y compris les entreprises, bien entendu) et la nécessité de veiller à ce que les personnes touchées puissent participer à tous les processus pertinents en toute confiance et de manière proactive.

Cela ne dénote pas un parti pris ou un manque d’indépendance de la part du mécanisme. Au contraire, il s’agit d’un antidote, au moins partiel, aux diverses sources possibles d’« emprise de la réglementation » évoquées au point 3.2.4 ci-dessus, élément considéré comme essentiel à l’obtention de bons résultats en matière de droits de la personne pour les personnes touchées.

Une consultation véritable des intervenants peut être difficile à réaliser en pratique et peut nécessiter beaucoup de temps et de ressources. C’est particulièrement le cas lorsque les personnes et les communautés touchées sont difficiles à déterminer à l’avance ou qu’elles se trouvent dans des endroits isolés ou éloignés. Les orientations du HCDH, mentionnées ci-dessus, attirent l’attention sur un point important (et souvent négligé), à savoir que « les communautés sont rarement homogènes en termes d’intérêts des personnes » [traduction], ajoutant que « des efforts véritables et créatifs sont nécessaires pour consulter adéquatement des groupes plus difficiles à atteindre et obtenir une image complète des besoins et des préférences des intervenants » [traduction].Note de bas de page 66

Cela nous rappelle qu’il est important de veiller à ce que les concepteurs et les opérateurs des mécanismes de réclamation ne donnent pas involontairement la priorité aux besoins et aux préférences de certains intervenants concernés par rapport à d’autres (par exemple, en raison de l’« emprise » par certains groupes d’intérêt ou de l’omission de mener des consultations suffisamment larges ou approfondies).

Pour l’élaboration de la première version de ses Procédures opérationnelles relatives à la conduite des processus de réclamation et d’examen, l’OCRE a pris ses propres dispositions pour la mobilisation des intervenants, en facilitant trois cycles de consultation au total et en englobant des représentants de groupes d’entreprises, d’organisations de la société civile et de syndicats, dont certains avaient déjà participé au Groupe consultatif. La prochaine mise à niveau de ces procédures (prévue pour 2024) devrait supposer au moins une série de consultations supplémentaires.

Partie 4. Options pour renforcer l’indépendance de l’OCRE

Comme nous l’avons indiqué au début (voir la section 1.3, « Méthodologie et champ d’application »), les conseils sur les dispositions structurelles, institutionnelles ou de gouvernance optimales en vue de renforcer l’indépendance de l’OCRE dépassent le champ d’application du présent rapport. Ces questions relèvent de la politique du gouvernement du Canada.

Au lieu de cela, les résultats de la recherche et les recommandations sont présentés ci-dessous selon deux « scénarios » : le premier repose sur l’octroi d’un nouveau mandat à l’OCRE, fondé sur la législation primaire (section 4.1), et le second sur le maintien du statu quo (c’est-à-dire en ce qui concerne la nature des dispositions fondamentales de l’OCRE, voir section 4.2).

Les sections suivantes sont disposées en tableau pour en faciliter la consultation et pour mettre en évidence la contribution particulière à l’ « indépendance » que chaque option pourrait apporter, certains aspects particuliers qui pourraient devoir être pris en compte, les liens qui peuvent exister entre les différentes options et les orientations pertinentes du HCDH. Toutefois, les options présentées dans les tableaux ci-dessous ne sont proposées qu’« en principe. » Nous ne nous prononçons pas sur la faisabilité juridique ou opérationnelle de ces mesures, et un avis juridique distinct serait probablement nécessaire pour leur mise en œuvre dans tous les cas.

Il ne faut pas supposer que tous les éléments énumérés dans chaque « scénario » ne s’appliquent qu’à ce scénario. Par exemple, certaines options présentées à la section 4.2 (scénario du « maintien du statu quo ») pourraient également être pertinentes pour la section 4.1 (scénario du « nouveau mandat »). Toutefois, étant donné que de nombreuses options (sinon toutes) présentées au point 4.1 nécessiteraient une législation primaire pour être mises en œuvre efficacement, il est difficile de voir comment elles pourraient être prises en compte (même sous une forme plus limitée) dans le cadre d’un scénario de « maintien du statu quo ».

4.1 Un nouveau mandat

Tableau 2 : Options pour renforcer l’indépendance de l’OCRE dans le cadre d’un « nouveau mandat »

Options

Incidences pour l’indépendance de l’OCRE

Autres observations et mises en garde

Références
*Voir « Principales ‘références’ » plus bas

1. L’OCRE est constitué en vertu d’une loi du Parlement.

Le mandat de l’OCRE est solidement établi par la loi, et il faudrait une nouvelle loi du Parlement (et donc un examen parlementaire) pour le modifier.

Le recours à la législation primaire sera probablement nécessaire pour la mise en œuvre de la plupart (voire de la totalité) des options 2 à 8 de la présente section, qui sont examinées séparément ci-dessous.

Le fait d’inscrire le mandat de l’OCRE dans la législation primaire rendrait plus difficile sa modification en cas d’urgence ou de circonstances imprévues (par exemple, s’il y avait un besoin urgent d’élargir le champ d’action de l’OCRE à un autre secteur).  

On pourrait envisager la possibilité de prévoir des modifications limitées et précises de la portée du mandat au moyen de mesures de législation déléguée (par exemple, pour élargir les secteurs qui relèvent de la compétence de l’OCRE).

Des dispositions d’habilitation ou des modifications peuvent être nécessaires dans d’autres textes législatifs pour permettre à l’OCRE de fonctionner en tant qu’organisme indépendant, par exemple la Loi sur la gestion des finances publiques.

3.1.1

Principe directeur 27 des Nations Unies

Rapport principal de la phase II du projet sur la responsabilité et les voies de remédiation, annexe, partie I

2. L’OCRE est constitué en tant qu’entité juridique à part entière et est juridiquement distinct des ministères concernés.

La création d’une séparation juridique entre l’OCRE et le gouvernement devrait contribuer à résoudre les tensions qui pourraient exister entre le rôle de l’OCRE en tant qu’élément d’un ministère axé sur la promotion du commerce et son rôle de gardien des normes internationales en matière de responsabilité des entreprises. L’OCRE disposerait de l’indépendance et de l’autonomie nécessaires pour se concentrer sur l’exécution de son propre mandat.

Les membres du personnel de l’OCRE pourraient être employés directement par l’OCRE, idéalement sous réserve de conditions d’emploi personnalisées, de règles de confidentialité et de politiques relatives aux questions disciplinaires, aux conflits d’intérêts, aux périodes de préavis et à l’acceptation d’emplois ultérieurs. L’OCRE pourrait disposer de sa propre équipe juridique interne, capable de fournir des conseils juridiques indépendants.

Cela aurait probablement des conséquences financières l’OCRE (par exemple, l’office pourrait ne pas être en mesure d’accéder aux services de soutien aussi efficacement que les ministères concernés, qui peuvent bénéficier d’économies d’échelle, par exemple en ce qui concerne les technologies de l’information, l’équipement, les matériaux). Toutefois, des accords de service et de détachement pourraient éventuellement être conclus, sous réserve de garanties appropriées (par exemple, en matière de confidentialité).

3.1.1

3.1.4

Rapport principal de la phase II du projet sur la responsabilité et les voies de remédiation, annexe, objectifs stratégiques (OS) 6 et 9, en particulier 9.4

3. Les dispositions relatives à la structure, aux nominations clés, à la durée du mandat, à la gouvernance et à la supervision sont inscrites dans la législation primaire.

L’OCRE bénéficierait d’une sécurité juridique en ce qui concerne les modalités de gouvernance et de contrôle, qui ne pourraient être modifiées sans un examen et un débat parlementaires. Cela permettrait d’éviter toute ingérence politique dans les activités de l’OCRE sous le couvert de la « supervision », de la « liaison » ou de la « courtoisie ».

D’un autre côté, cela offre moins de flexibilité au cas où des changements seraient nécessaires, par exemple pour répondre à des besoins ou à des circonstances imprévus.

3.1.4

Rapport principal de la phase II du projet sur la responsabilité et les voies de recours, annexe, partie I

4. Les fonds sont alloués directement par le Trésor (et non par l’intermédiaire d’un ministère).

Les subventions seraient accordées directement à l’OCRE, pour son propre usage, sous réserve des dispositions et des normes de gouvernance et de contrôle, et libres de toute condition supplémentaire pouvant résulter du fait qu’elles sont passées par le contrôle d’une autre entité gouvernementale, offrant à l’OCRE une plus grande autonomie opérationnelle et (potentiellement) un plus grand degré de certitude en ce qui concerne les ressources à sa disposition.

Les critères d’attribution des fonds d’une année sur l’autre (y compris les augmentations et les diminutions de fonds) devraient être clairement précisés, et des contrôles appropriés devraient être appliqués à toute modification unilatérale des critères.

Les garanties de ressources suffisantes pour mener à bien le mandat pourraient éventuellement être inscrites dans la législation primaire.

3.1.5

Rapport principal de la phase II du projet sur la responsabilité et les voies de remédiation, annexe, partie I

5. Une disposition légale est prévue (que ce soit dans la législation primaire de l’OCRE ou dans une loi d’application plus générale) qui permettrait à l’OCRE de garantir la confidentialité et l’anonymat aux utilisateurs du mécanisme qui en font la demande, en particulier dans les cas où il y a un risque de représailles.

L’OCRE est en mesure de proposer des engagements de non-divulgation et d’anonymat en fonction de sa propre évaluation des besoins dans des cas individuels, et de veiller à ce que ces engagements soient respectés.

L’incapacité de l’OCRE à offrir de telles garanties, en raison de contraintes juridiques, peut sérieusement ébranler la confiance des intervenants et, dans certains cas, mettre en danger les personnes qui utilisent le mécanisme. Il semble peu probable que les exemptions et dérogations nécessaires aux lois existantes sur l’accès aux renseignements détenus par les pouvoirs publics (c’est-à-dire celles qui sont nécessaires pour garantir que les risques de représailles sont correctement pris en compte et que les engagements de non-divulgation sont juridiquement sans faille) puissent être obtenues sans une nouvelle législation primaire.

3.1.7

Rapport principal de la phase II du projet sur la responsabilité et les voies de remédiation, annexe, objectif stratégique (OS) 7, en particulier 7.10 et 7.11.

6. L’OCRE a le pouvoir de convoquer des témoins et de contraindre à la production de témoignages.

L’OCRE ne dépendrait pas de la bonne volonté des entreprises (qui peuvent faire l’objet de réclamations) pour l’accès aux informations nécessaires à une enquête sur une plainte ou à un examen.

Il pourrait être nécessaire de clarifier davantage dans la législation les circonstances dans lesquelles ces pouvoirs seraient utilisés, dans l’intérêt de la sécurité juridique des entreprises.

Les pouvoirs d’enquête ne pourront être utilisés qu’à l’égard de personnes et d’entités canadiennes, et de preuves situées au Canada. Pour établir les faits « sur le terrain » à l’extérieur du Canada, l’OCRE devrait s’appuyer sur d’autres sources d’information.

L’utilisation de ces pouvoirs peut parfois faire l’objet d’une contestation juridique (par exemple, par des entreprises visées par un examen); une équipe juridique interne doit être prête et capable de répondre (voir le point 2 ci-dessus).

3.1.1

Voir phase II du projet sur la responsabilité et les voies de remédiation, notes explicatives, paragraphe 38.

3.1.7

7. L’OCRE a le pouvoir de prendre des ordonnances exécutoires en ce qui concerne l’accès des entreprises aux services commerciaux et au soutien.

Les décisions de l’OCRE concernant les mesures commerciales appropriées (par exemple, en réponse à la non-coopération d’une entreprise dans le cadre d’un processus d’examen ou dans le cadre d’un ensemble de mesures correctives à l’issue d’un processus de réclamation) devraient être suivies d’effet et ne pas être édulcorées ou mises de côté à des fins politiques.

Ces pouvoirs pourraient également renforcer l’influence de l’OCRE dans le cadre des procédures d’examen, en augmentant la probabilité que les entreprises se conforment aux demandes de l’OCRE de fournir des éléments de preuve ou des déclarations de témoins.

L’utilisation de ces pouvoirs peut parfois faire l’objet d’une contestation juridique de la part des entreprises; une équipe juridique interne devrait être prête et capable de répondre (voir également le point 2 ci-dessus et le point 8 ci-dessous).

3.1.1

3.1.6

Rapport principal de la phase II du projet sur la responsabilité et les voies de remédiation, annexe, objectif stratégique (OS) 4.

3.2.1

8. L’OCRE a pour mandat clair de publier des orientations interprétatives faisant autorité (et, si possible, des normes exécutoires) en matière de conduite responsable des entreprises.

Crédibilité accrue auprès des intervenants, y compris les entreprises et les personnes et communautés concernées. Des normes plus claires pour juger de la conduite des affaires, ce qui réduit les risques ou les perceptions de partialité.

Si des lois sur l’obligation de diligence raisonnable en matière de droits de la personne sont finalement adoptées (comme cela a été discuté lors de récentes audiences organisées par le Comité permanent du commerce international), l’OCRE, en tant qu’organisme de premier plan chargé de promouvoir la conduite responsable des entreprises, pourrait avoir un rôle important à jouer.

Cette option peut être avantageuse du point de vue du renforcement de la sécurité juridique pour les entreprises. Une consultation étroite avec un large éventail de parties prenantes serait nécessaire dans le cadre du processus de développement.

3.1.1

9. L’OCRE bénéficie d’immunités en matière de responsabilité pénale et civile.

Des avis juridiques antérieurs ont soulevé un certain nombre de préoccupations concernant les niveaux de risque juridique auxquels l’OCRE peut être exposé dans l’exercice de son mandat et de ses fonctions. L’analyse du risque de responsabilité de l’OCRE (par exemple pour diffamation ou manquement à une obligation d’origine législative) dépasse le cadre du présent rapport. Toutefois, d’une manière générale, il convient de noter l’effet dissuasif que les poursuites-bâillons (ou autres) pourraient avoir sur la capacité de l’OCRE à demander des comptes aux entreprises au moyen de procédures d’examen.

L’analyse des types d’immunités et d’exemptions nécessaires doit tenir compte des activités susceptibles d’être entreprises dans le cadre du mandat de l’OCRE et des risques juridiques que ces activités peuvent entraîner, ainsi que des précédents et des pratiques d’ombudsmans dans d’autres pays.

3.1.6

3.2.5

PRINCIPALES « RÉFÉRENCES »

Sections pertinentes du présent rapport.

Principes directeurs des Nations Unies sur l’entreprise et les droits de l’homme (Principes directeurs), y compris les commentaires.

Orientation sur le Projet du HCDH sur la responsabilité et les voies de remédiation (RP de la phase II du projet sur la responsabilité et les voies de remédiation =) Rapport principal de la phase II du projet sur la responsabilité et les voies de remédiation; NE de la phase II du projet sur la responsabilité et les voies de remédiation = Notes explicatives de la phase II du projet sur la responsabilité et les voies de remédiation).

4.2 Le statu quo

Tableau 3 : Options pour renforcer l’indépendance de l’OCRE dans un scénario de « maintien du statu quo »

Options

Incidences pour l’indépendance de l’OCRE

Autres observations et mises en garde

Références
*Voir « Principales ‘références’ » plus bas

1. Explorer des moyens de doter l’ébauche d’accord-cadre de coopération d’assises juridiques plus solides.

L’ombudsman bénéficierait d’une plus grande sécurité en ce qui concerne les modalités d’engagement auprès des ministres et ministères concernés, les dispositions en matière d’établissement de rapports et le contrôle. Cela contribuerait à réduire le risque d’ingérence politique dans les activités de l’OCRE sous couvert de « supervision » ou de « liaison » et donnerait à l’OCRE une plus grande assurance que son indépendance est reconnue et respectée.

Les possibilités d’y arriver dans le cadre de ce scénario de « maintien du statu quo » peuvent être limitées du fait que l’institution de l’OCRE n’a pas de personnalité morale distincte. [Il semble que l’ébauche d’accord-cadre de coopération doive être signée par l’OCRE, en sa qualité de titulaire de charge publique (c’est-à-dire de conseiller spécial du ministre)].

[L’inclusion d’un mécanisme de « consultation précédant la révocation » dans l’ébauche de l’accord-cadre de coopération pourrait être préférable à la proposition actuelle de révocation unilatérale par l’une ou l’autre des parties dans un préavis de 20 jours.]

3.1

Rapport principal de la phase II du projet sur la responsabilité et les voies de remédiation, annexe, partie I, objectif stratégique (OS) 6, en particulier 6.1.

2. Réexaminer les « modalités d’engagement » existantes entre l’OCRE et les ministres et ministères concernés (notamment en ce qui concerne la planification et les exigences en matière de rapports périodiques et annuels) en fonction d’un ensemble de critères clairs, les réviser si nécessaire et consigner les résultats dans un futur accord-cadre de coopération plus détaillé et plus exhaustif.

Une plus grande clarté sur ces questions donnerait à l’OCRE une plus grande assurance que son statut d’indépendance est reconnu et respecté.

La création de deux arrangements distincts – l’une avec le ministère et l’autre avec le ministre – semble être une source de confusion. Cet examen devrait porter sur i) la question de savoir si une « lettre sur l’Énoncé des priorités et des responsabilités » de la ministre est juridiquement nécessaire ou appropriée, compte tenu du statut d’indépendance de l’OCRE, et ii) les perspectives d’un accord unique « global » couvrant le contrôle et la responsabilité, ainsi que les questions opérationnelles, qui serait moins susceptible d’être modifié de manière unilatérale que l’arrangement actuel.

Si ces questions ne peuvent être couvertes par la législation de base, elles devraient être traitées dans l’ébauche d’accord-cadre de coopération (avec beaucoup plus de détails qu’il n’y en a actuellement) en tant qu’option de second choix.

Toutefois, voir le point 1 ci-dessus sur la nécessité de doter l’ébauche d’accord-cadre de coopération d’assises juridiques plus solides.

3.1.2

3.1.3

3.2

Rapport principal de la phase II du projet sur la responsabilité et les voies de remédiation, annexe, objectif stratégique (OS) 6, en particulier 6.1.

3. Clarifier les critères qui seront appliqués pour décider de la prolongation du mandat d’un OCRE (et la durée du mandat de « renouvellement »).

Des critères de décision objectifs et transparents réduisent le risque d’ingérence politique dans la manière dont l’OCRE s’acquitte de son mandat et de ses fonctions.

Pour ces raisons, il serait utile que l’instrument juridique fondateur de l’OCRE clarifie davantage les circonstances dans lesquelles l’OCRE peut être révoqué « pour des raisons valables » (par exemple, abus de pouvoir, faute grave).

Les normes actuelles relatives aux nominations par le gouverneur en conseil et, plus généralement, aux renouvellements de mandat, seront pertinentes pour la définition et l’encadrement de ces critères.

Si ces questions ne peuvent être clarifiées dans un instrument juridique fondateur (tel qu’un nouveau décret), il convient de trouver d’autres moyens juridiques (par exemple, une lettre d’engagement, un addendum à l’ébauche d’accord-cadre de coopération ou tout autre document politique approprié qui ne peut être modifié facilement et unilatéralement).

Toutefois, voir le point 1 ci-dessus sur la nécessité de doter l’accord-cadre de coopération d’assises juridiques plus solides.

3.1.4

4. Officialiser des critères clairs sur la base desquels les décisions de financement et les allocations seront prises et les documenter clairement dans l’ébauche d’accord-cadre de coopération.

L’OCRE peut planifier en ayant une garantie raisonnable dans le fait que les allocations de fonds ne seront pas réduites de manière arbitraire. Le risque d’ingérence politique dans la manière dont l’ombudsman s’acquitte de ses fonctions est ainsi réduit.

Si ces questions ne peuvent être couvertes par la législation de base, elles devraient être traitées dans l’ébauche d’accord-cadre de coopération (avec beaucoup plus de détails qu’il n’y en a actuellement) en tant qu’option de second choix.

Toutefois, voir le point 1 ci-dessus sur la nécessité de doter l’ébauche d’accord-cadre de coopération d’assises juridiques plus solides.

3.1.5

Rapport principal de la phase II du projet sur la responsabilité et les voies de remédiation, annexe, objectif stratégique (OS) 6, en particulier 6.1.

5. Nommer un conseiller juridique interne à l’OCRE, dont les responsabilités seront consacrées uniquement  par l’OCRE et qui rendra compte (uniquement) à l’OCRE.

L’OCRE peut faire appel à des conseillers juridiques indépendants pour les questions relevant de son mandat.

Le conseiller juridique interne de l’OCRE devrait être chargé de procéder d’urgence à un examen des risques juridiques associés au travail de l’OCRE (y compris tout risque juridique assumé par l’OCRE personnellement).

Un conseiller juridique indépendant est nécessaire pour aider l’OCRE à comprendre et à gérer tout risque juridique découlant de l’exercice de son mandat et de ses fonctions (que ce soit à l’égard d’un ministère concerné ou de l’OCRE lui-même). Ce poste est également important pour aider à clarifier les obligations légales dans des circonstances en particulier ou pour résoudre des désaccords.

Comme nous l’avons mentionné précédemment, les règles juridiques existantes qui font du ministère de la Justice le responsable exclusif des services juridiques du gouvernement (sous réserve d’exceptions précises) rendent difficile la mise en place d’un conseiller juridique indépendant pour l’OCRE, compte tenu de son statut juridique actuel. Une autre solution consisterait à étudier la possibilité de faire appel à des conseillers spécialisés du ministère de la Justice ou de procéder à des « cloisonnements éthiques ».

3.1.4

3.1.7

3.2.5

Rapport principal de la phase II du projet sur la responsabilité et les voies de remédiation, annexe, objectif stratégique (OS) 6, en particulier 6.1.

6. Créer une certaine séparation fonctionnelle entre le personnel qui prend part aux activités de « promotion » et de « sensibilisation » et celui qui participe à la conduite des examens.

Le personnel qui prend part à la conduite des examens est moins enclin à subir « l’emprise de la réglementation ».

Cet aspect devra être concilié avec les considérations opérationnelles. Dans la pratique, il est plus facile d’atteindre cet objectif dans les institutions avec plus de personnes que dans des institutions plus petites comptant moins de personnel.

3.1.1

3.2.4

Paragraphes 31a) et d) des Principes directeurs des Nations Unies.

Rapport principal de la phase II du projet sur la responsabilité et les voies de remédiation, annexe, objectif stratégique (OS) 6, en particulier 6.1.

7. Procéder à une consultation détaillée des intervenants sur les Procédures opérationnelles du Mécanisme de responsabilisation des droits de la personne et les mettre à jour si nécessaire.

Cette consultation est importante pour garantir que l’on tienne compte des besoins des personnes et des communautés touchées qui pourraient souhaiter déposer une plainte auprès de l’OCRE.

Elle aide également les concepteurs et les opérateurs du mécanisme de réclamation à cerner les mesures pratiques qui peuvent être prises pour corriger les déséquilibres de pouvoir qui existent entre les personnes qui souhaitent présenter une réclamation et les entreprises concernées, et pour que l’équité soit respectée entre les différents groupes d’intervenants touchés.

Dans le cadre de tout processus de mise à jour, il sera important de réfléchir à la question de savoir si les processus de réclamation (et en particulier les dispositions relatives à la capacité des différentes parties à commenter les conclusions et à corriger le dossier) établissent un équilibre approprié entre les droits et les intérêts du gouvernement et ceux des intervenants.

Comme nous l’avons mentionné précédemment (voir section 3.1.2), le préavis de 30 jours donné aux ministres quant au contenu d’un rapport d’examen semble excessivement long. Il convient de réexaminer cet aspect ainsi que les raisons pour lesquelles un tel préavis a été donné et de modifier les procédures opérationnelles en conséquence. Les modifications devraient préciser dans quelle mesure les commentaires sur le contenu substantiel seront sollicités ou bien accueillis (s’ils le sont) et comment ils seront traités, compte tenu du statut officiel de l’OCRE en tant qu’organisme indépendant.

Étant donné le nombre d’entreprises et l’éventail des activités, des lieux géographiques et des contextes opérationnels susceptibles de donner lieu à une plainte auprès de l’OCRE, il ne serait pas possible de concevoir un processus de consultation des intervenants qui concernerait tous les groupes d’intervenants. Toutefois, les organisations de la société civile et les syndicats peuvent parfois constituer des substituts adéquats. (Voir le point 8 ci-dessous)

3.1.2

3.3

Paragraphes 27 et 31d) des Principes directeurs des Nations Unies

8. Étudier les possibilités de création d’un conseil (ou d’un groupe) consultatif pluripartite permanent spécialement consacré à l’OCRE.

Un tel organe pourrait être sollicité, par exemple, au cours de processus d’examen ou dans le cadre des efforts visant à améliorer en permanence le mécanisme de réclamation à la lumière des « enseignements tirés ».

Un comité consultatif propre à l’OCRE pourrait donner son avis sur les points suivants :

a) le contenu des politiques, des procédures et des rapports périodiques de l’OCRE;

b) les questions techniques soulevées par les processus d’examen;

c) le point de vue des intervenants sur les incidences négatives et les mesures correctives à prendre;

d) le rendement de l’OCRE par rapport aux critères d’efficacité du Principe directeur 31 des Nations Unies.

Les membres pourraient être triés sur le volet en raison de leur expertise technique spécialisée dans les domaines précis couverts par le mandat de l’OCRE (par opposition à la stratégie relative à la responsabilité des entreprises du gouvernement du Canada de manière plus générale).

3.1.3

3.3

Phase II du projet sur la responsabilité et les voies de remédiation, notes explicatives, paragraphe 38.

9. Préciser que l’OCRE est en mesure d’offrir des conseils aux entreprises canadiennes sous la forme d’orientations non exécutoires.

Crédibilité accrue auprès des intervenants, y compris les entreprises et les personnes et communautés concernées. Des normes plus claires pour juger de la conduite des affaires, ce qui réduit les risques ou les perceptions de partialité.

Même si ces normes ne sont pas exécutoires ou n’ont qu’un statut juridique indicatif, cette option pourrait être avantageuse du point de vue de la sécurité juridique accrue pour les entreprises.

Le décret n’indique pas clairement ce que l’on entend par « norme » à l’article 6. À tout le moins, il conviendrait de clarifier ce point afin qu’il soit clair que l’OCRE peut émettre, de temps à autre, des orientations non exécutoires à l’intention des entreprises sur des questions relevant de son mandat.

Une consultation étroite avec un large éventail d’intervenants serait nécessaire dans le cadre du processus d’élaboration d’orientations ou de « normes ».

3.1.1

3.3

10. Étudier les possibilités de clarifier la manière dont les ministres et les ministères traiteront les recommandations de l’OCRE, notamment en ce qui concerne les recommandations visant à supprimer ou à suspendre les services commerciaux et le soutien dans les circonstances décrites dans le décret.

En clarifiant la manière dont ces recommandations orientent la prise de décisions ministérielles en ce qui concerne l’accès à l’appui et aux services commerciaux pourrait potentiellement renforcer l’effet de levier de l’OCRE dans le contexte des processus d’examen, ce qui rendrait plus probable la coopération des entreprises avec les processus de révision.

Les contraintes juridiques qui pèsent sur le pouvoir discrétionnaire des ministres peuvent limiter les possibilités d’y parvenir dans la pratique.

3.1

Rapport principal de la phase II du projet sur la responsabilité et les voies de remédiation, annexe, objectif stratégique (OS) 4.

13. Élaborer des orientations « propres à l’OCRE » à l’intention du personnel sur la mobilisation des intervenants (à la fois dans le contexte des examens et de manière plus générale), y compris la reconnaissance des conflits d’intérêts et la manière de les traiter.

L’OCRE devra faire preuve de la plus grande impartialité et de la plus grande intégrité dans la conduite de l’examen des plaintes et des réclamations. La légitimité et la crédibilité de l’OCRE en dépendent.

Ces orientations devraient être bien alignées sur les règles et politiques éthiques existantes régissant l’ensemble de la fonction publique, et elles pourraient n’avoir (au maximum) qu’un « statut officieux », ce qui signifie que dans les décisions relatives aux questions disciplinaires, les normes applicables à l’ensemble du secteur public serviraient de point de référence.

3.2

3.2

Rapport principal de la phase II du projet sur la responsabilité et les voies de remédiation, annexe, OS 9

12. Permettre à l’OCRE de créer et de gérer son propre site Web.

La dépendance de l’OCRE à l’égard des services de communication du gouvernement du Canada (par l’intermédiaire d’Affaires mondiales Canada) pose problème du point de vue de l’indépendance de l’OCRE. La capacité des ministères ou du personnel du gouvernement à dicter quelles informations apparaissent sur le site Web (et à quel moment) a des répercussions évidentes sur la manière dont l’OCRE peut répondre aux critères d’efficacité des Principes directeurs des Nations Unies en matière d’accessibilité et de transparence dans la pratique. Même si la possibilité d’ingérence n’est que théorique, elle peut avoir un effet dissuasif.

Cela a évidemment des répercussions sur le plan des ressources pour l’OCRE. L’expertise technique nécessaire à la maintenance d’un site Web dédié devrait être disponible à l’interne.

3.1.5

Paragraphes 31b) et e) des Principes directeurs des Nations Unies

Rapport principal de la phase II du projet sur la responsabilité et les voies de remédiation, annexe, OS 9

PRINCIPALES « RÉFÉRENCES »

Sections pertinentes du présent rapport.

Principes directeurs des Nations Unies sur l’entreprise et les droits de l’homme (Principes directeurs), y compris les commentaires.

Orientation sur le Projet du HCDH sur la responsabilité et les voies de remédiation (RP de la phase II du projet sur la responsabilité et les voies de remédiation =) Rapport principal de la phase II du projet sur la responsabilité et les voies de remédiation; NE de la phase II du projet sur la responsabilité et les voies de remédiation = Notes explicatives de la phase II du projet sur la responsabilité et les voies de remédiation)

Partie 5. Conclusion

Cette étude a relevé un certain nombre de facteurs susceptibles de compromettre l’indépendance de l’OCRE et, par conséquent, sa capacité à satisfaire aux « critères d’efficacité » définis dans les Principes directeurs des Nations Unies relatifs aux entreprises et aux droits de la personne. Il s’agit notamment des facteurs suivants :

Parmi ces problèmes, c’est l’absence de pouvoirs d’enquête exécutoires qui semble actuellement retenir le plus l’attention dans les débats politiques sur le rôle et le rendement de l’OCRE, en particulier dans les commentaires et les critiques formulés par les commentateurs externes et les intervenants. Toutefois, comme on peut le voir, cette question, bien qu’importante, n’est qu’un aspect d’un tableau beaucoup plus varié et compliqué.

En l’absence de « modalités d’engagement » claires entre les intervenants concernés, il existe un risque que l’indépendance de l’OCRE finisse par dépendre, non pas de structures et de principes solides, mais de facteurs plus éphémères tels que les personnalités des acteurs concernés (par exemple, la « fougue » de l’OCRE et le « soutien » de la ministre et de ses collègues du ministère). Toutefois, il est possible d’améliorer la clarté et la stabilité des dispositions, même dans le scénario du « statu quo », et la partie 4 ci-dessus présente une série d’options à explorer.

Lors de l’élaboration d’options visant à renforcer l’indépendance de l’OCRE, il sera important de tenir compte de certaines tendances législatives plus larges dans le domaine des entreprises et des droits de la personne. L’une des principales initiatives consiste à mettre en place des normes de transparence plus contraignantes pour les entreprises en ce qui concerne leur rendement en matière de droits de la personne et d’environnement. Les commentateurs sont de plus en plus nombreux à évoquer la perspective de l’établissement de nouvelles normes de transparence exécutoires pour les entreprises canadiennes dans un avenir relativement proche. Des lois sur l’obligation de diligence en matière de droits de la personne font également l’objet de discussions, mais la possibilité qu’elles soient édictées est un peu plus lointaine. Des lois de ce type font actuellement l’objet de discussions dans un certain nombre de pays européens, et une proposition de directive sur le devoir de vigilance des entreprises en matière de durabilité a été adoptée par la Commission européenne en février 2022. À terme, le Canada pourrait suivre cet exemple. Si des propositions législatives canadiennes détaillées devaient voir le jour sur l’un ou l’autre sujet, on peut s’attendre à ce que l’OCRE ait un rôle important à jouer. En tout état de cause, et indépendamment du rôle réglementaire particulier que l’OCRE pourrait jouer à l’avenir, l’introduction de nouvelles lois sur la transparence et l’obligation de diligence pourrait offrir à l’OCRE de nouvelles possibilités en ce qui concerne la manière dont il s’acquitte des différents aspects de son mandat actuel (par exemple, grâce à un meilleur accès à des informations plus détaillées et plus complètes sur la gestion et l’atténuation des risques en matière de droits de la personne).

L’OCRE est une innovation importante dans le domaine des entreprises et des droits de la personne. Toutefois, son statut de « premier au monde » ne signifie pas qu’il ne peut (ou ne doit) pas être amélioré de manière significative. Comme l’a montré la présente étude, veiller à ce qu’un mécanisme de réclamation ait le bon niveau d’indépendance peut potentiellement produire des dividendes multiples et significatifs en termes d’efficacité globale. Il n’est pas possible de déterminer le point exact à partir duquel un mécanisme atteint un niveau d’indépendance « correct » ou « suffisant ». Les orientations du HCDH suggèrent que la meilleure mesure est en fin de compte de savoir si le mécanisme est capable d’« offrir un environnement juridique et réglementaire propice au respect des droits de l’homme par les entreprises » et « si ces mécanismes répondent aux besoins et des personnes et des groupes pour lesquels ils sont prévus et s’ils protègent suffisamment leurs droits ».Note de bas de page 67 En ce qui concerne l’OCRE, les critiques des intervenants suggèrent que ces objectifs ne sont pas encore atteints. Toutefois, cette étude a permis de cerner un certain nombre d’options possibles pour une amélioration progressive, voire immédiate.

À propos de l’auteure

Jennifer Zerk, Ph. D., est rédactrice, chercheuse et analyste indépendante, spécialisée dans le droit et la responsabilité sociale des entreprises. Elle est titulaire d’une maîtrise en droit économique international de l’Université de Londres et d’un doctorat en droit international de l’Université de Cambridge. Elle participe régulièrement aux initiatives et aux consultations politiques du Royaume-Uni et de l’Union européenne à titre de collaboratrice et de conseillère. À l’échelle internationale, elle est une consultante, une commentatrice et une oratrice respectée et recherchée. Elle a fourni des conseils sur un certain nombre d’initiatives importantes en matière de réforme législative et de politique dans le domaine des entreprises et des droits de la personne, y compris, plus récemment, en tant que consultante juridique principale dans le Projet sur la responsabilité et les voies de remédiation du Haut-Commissariat des Nations Unies aux droits de la personne. Elle est chercheuse associée du programme de droit international du Royal Institute of International Affairs (Chatham House).

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