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Rapport d’évaluation initiale d’une plainte déposée par une coalition de 28 organisations concernant les activités de Dynasty Gold Corp.

Numéro de dossier : 220842
Date de réception de la plainte : 2022-06-21
Date de publication du rapport : 07-11-2023         

À propos de l’ombudsman canadien de la responsabilité des entreprises

L’ombudsman canadien de la responsabilité des entreprises (OCRE) est un mécanisme de règlement des différends relatifs aux entreprises et aux droits de la personne mis en place par le gouvernement du Canada. Les personnes peuvent déposer des plaintes auprès de l’OCRE concernant d’éventuelles violations des droits de la personne résultant des activités des entreprises canadiennes des secteurs du vêtement, des mines ou du pétrole et du gaz à l’étranger.

Pour plus de plus amples renseignements, consultez le site du Bureau de l’ombudsman canadien de la responsabilité des entreprises.

Quel est l’objectif de ce rapport ?

Dans ce rapport, l’OCRE présente l’information relatif à l’étape d’évaluation initiale d’une plainte déposée par une coalition de 28 organisations canadiennes le 21 juin 2022, concernant les activités de Dynasty Gold Corp. (DYG).

Conformément à l’article 16 du décret de l’OCRE, les parties ont eu la possibilité de commenter les faits contenus dans le rapport. Un résumé des commentaires reçus figure à la partie 5 du rapport.

Quelles sont les parties concernées par la plainte ?

Les plaignants sont une coalition de 28 organisations de la société civile dont la liste figure à l’annexe 1.

DYG est une société minière canadienne. DYG a été constituée en vertu de la Loi de la Colombie-Britannique sur les entreprises (British Columbia Business Act) le 12 décembre 1985 et son siège social se trouve au 610 Granville Street, à Vancouver.Note de bas de page 1

Quel est l’objet de la plainte ?

La plainte allègue que les opérations minières de DYG dans le nord-ouest du Xinjiang, en Chine, ont recours au travail forcé des Ouïghours, ou en bénéficient.

Selon la plainte, DYG exploite une mine d’or Qi-2 (la mine de Hatu) à Hatu, Karamay, un district minier du nord-ouest du Xinjiang situé à proximité de centres de « détention » ou de « rééducation ».

Pour étayer leurs allégations, les plaignants se réfèrent au communiqué de presse de DYG daté du 25 janvier 2021Note de bas de page 2 et à une déclaration de la directrice générale de DYG, Ivy Chong, rapportée par le journal The Globe and Mail datée du 31 janvier 2021,Note de bas de page 3 reconnaissant que de nombreuses ethnies, y compris les Ouïghours, étaient présentes dans tous les postes de la main-d’œuvre dans la mine de Hatu. Selon DYG, la société offre une rémunération équitable à tous les employés et respecte tous les protocoles, y compris les pratiques culturelles et les jours fériés spéciaux consacrés aux pratiques religieuses.

Dans le communiqué de presse et dans le rapport de The Globe and Mail, DYG a également évoqué le différend juridique qui l’oppose à son partenaire local, Western Region Gold Co. Ltd. (Western Gold), une filiale à cent pour cent de l’entreprise d’État chinoise Xinjiang Non-Ferrous Metal Industry Group Limited (XNF)Note de bas de page 4. Les plaignants affirment que s’il est possible que XNF et sa filiale Western Gold aient eu le contrôle opérationnel de la mine de Hatu, cela n’enlève rien à la responsabilité de DYG de s’assurer qu’il n’y a pas de travail forcé dans ses opérations minières à l’étranger.

Les plaignants indiquent, par lettre datée du 12 novembre 2021, qu’ils ont demandé à DYG de prendre position et de faire preuve de diligence raisonnable en matière de droits de la personne pour s’assurer qu’il n’y a aucun recours au travail forcé des Ouïghours à la mine de Hatu. Selon les plaignants, DYG n’a pas répondu à leur demande et n’a pas expliqué la façon dont la société entreprend des activités de diligence raisonnable en matière des droits de la personne.

Les plaignants soulignent que le contexte dans lequel la société minière opère (violations présumées des droits de la personne au Xinjiang et « campagne générale de génocide et de répression » du Parti communiste chinois) constitue un risque accru pour les droits de la personne. En l’absence d’une réponse détaillée de DYG concernant ses activités de diligence raisonnable dans le Xinjiang, les plaignants estiment qu’il est probable que ces risques n’ont pas été atténués et que DYG n’a pas utilisé son influence pour tenter de renforcer la diligence raisonnable en matière de droits de la personne de son partenaire commercial.

Partie 1 — Résumé de l’étape d’admission (ou d’admissibilité)

  1. Le 1eraoût 2022, sur la base des renseignements fournis par les plaignants, l’ombudsman a décidé que la plainte était admissible conformément à l’article 6.1 des Procédures opérationnelles. Cela signifie que l’ombudsman a estimé que la plainte contenait suffisamment de renseignements pour que l’on puisse raisonnablement penser que chacun des trois critères d’admissibilité était rempli. Les exigences d’admissibilité ne sont pas élevées. Les critères d’admissibilité sont les suivants :
    • Le motif de la plainte est une atteinte présumée à un droit de la personne reconnu à l’échelle internationale.
    • Les allégations de violation découlent des activités à l’étranger d’une entreprise canadienne dans les secteurs du vêtement, des mines ou du pétrole et du gaz.
    • Le motif de la plainte aurait eu lieu après le 1ermai 2019 ou, s’il a eu lieu avant le 1er mai 2019, il se poursuit au moment de la plainte (article 5.7 des Procédures opérationnelles).
  2. La décision de l’ombudsman a été communiquée aux plaignants le 1eraoût 2022.
  3. L’ombudsman a tenté d’envoyer la plainte et une lettre datée du 2 août 2022 à DYG par courrier prioritaire. La lettre n’a pas été réclamée par DYG et a été renvoyée à l’OCRE. L’OCRE a tenté à plusieurs reprises, sans succès, d’obtenir une réponse à la plainte de la part de DYG et d’inviter la société à une réunion d’évaluation initiale. Les paragraphes 10 à 17 du présent rapport fournissent de plus amples renseignements sur ces tentatives. Comme expliqué ci-dessous, la lettre et la plainte ont été remises à DYG par un huissier des services judiciaires le 27 octobre 2022. La plainte est alors passée à l’étape de l’évaluation initiale de la procédure de plainte.

Partie 2 — Évaluation initiale

Contexte

  1. L’évaluation initiale est le processus qui permet de décider de la suite à donner à une plainte admissible, et notamment de la manière de répondre aux objections éventuelles de l’intimé (l’entreprise citée dans la plainte). L’ombudsman ne prend pas de décision sur le bien-fondé de la plainte lors de l’évaluation initiale.
  2. Les objectifs de la méthode d’évaluation initiale sont les suivants :
    • Mieux comprendre les positions des parties concernant les allégations, y compris les objections éventuelles de l’intimé vis-à-vis de la plainte.
    • Commencer à déterminer les besoins et les intérêts sous-jacents des parties.
    • Fournir des renseignements sur le rôle de l’OCRE et les différentes procédures de résolution des litiges.
    • Travailler avec les parties pour évaluer la procédure de résolution des litiges la mieux adaptée aux questions soulevées par la plainte, y compris les allégations et les objections éventuelles de l’intimé.
  3. Lors de l’évaluation initiale, l’ombudsman rencontre les parties pour connaître leur point de vue sur les allégations, répondre à leurs préoccupations et à leurs questions et leur demander leur accord pour participer à un règlement rapide ou à une médiation. Si les parties n’acceptent pas de participer à une procédure consensuelle de résolution des litiges, l’ombudsman décidera de la suite à donner à la plainte, y compris de l’ouverture potentielle d’une enquête.

La procédure d’évaluation initiale dans le cadre de la présente plainte

  1. Les mesures prises par l’OCRE lors de l’évaluation initiale de la présente plainte ont été les suivantes :
    1. Examen sur dossier de la plainte
    2. Réunion virtuelle avec les représentants des plaignants le 18 novembre 2022
    3. Étude documentaire sur les rapports des médias et les documents d’entreprise de DYG, y compris les documents suivants :
    4. Examen des commentaires des plaignants et de DYG concernant l’ébauche du rapport d’évaluation initiale.

Ce que les plaignants ont rapporté à l’OCRE

  1. Lors de la réunion d’évaluation initiale du 18 novembre 2022, les plaignants ont exprimé leur volonté de participer à un règlement rapide ou à une médiation, y compris en acceptant des conditions de confidentialité. Les plaignants sont prêts à travailler sur une résolution systémique qui ne nomme pas DYG et qui trouve des solutions pour traiter le recours possible au travail forcé des Ouïghours et qui aiderait les sociétés minières canadiennes à adopter une diligence raisonnable en matière de droits de la personne appropriée dans ce contexte à haut risque.
  2. Les plaignants ont fait part de leur intérêt pour une procédure qui vise à produire des preuves vérifiables par une tierce partie démontrant que DYG n’a pas recours au travail forcé dans la mine de Hatu.

Tentatives de communication avec DYG

  1. Entre le 2 août et le 27 octobre 2022, l’OCRE a tenté à plusieurs reprises de transmettre la plainte à DYG :
    1. Par courriel à Ivy Chong à son adresse électronique personnelle au travail ainsi qu’à l’adresse électronique générale figurant sur le site Web de DYG
    2. Par courrier recommandé à l’adresse du siège social de DYG figurant sur son site Web (la lettre a été renvoyée à l’OCRE comme non réclamée)
    3. Par voie de signification à l’adresse du siège social de DYG
  2. Le 27 octobre 2022, un huissier des services judiciaires a déposé la plainte à l’adresse du siège social de DYG figurant sur le site Web de Small Business BC (différente de l’adresse du siège social).
  3. Le 23 novembre 2022, une lettre recommandée invitant DYG à une réunion d’évaluation initiale a été livrée avec succès à l’adresse du siège social de DYG.
  4. Le 16 décembre 2022, une lettre indiquant que l’OCRE procéderait à l’évaluation initiale de la plainte et rédigerait un rapport d’évaluation initiale sans leur participation a été envoyée par courriel et par courrier au siège social de DYG.
  5. Entre le 20 février et le 8 mars 2023, des huissiers des services judiciaires ont transmis avec succès une copie de la plainte et une lettre demandant la participation à la procédure de plainte de l’OCRE à six membres du conseil consultatif et directeurs de DYG situés au Canada et aux États-Unis. La même lettre a également été envoyée aux adresses électroniques d’Ivy Chong et de DYG.
  6. Les 10 et 13 mars 2023, l’OCRE a tenté de communiquer avec Ivy Chong au numéro de téléphone indiqué sur le site Web de DYG et a laissé des messages vocaux demandant à DYG de communiquer avec l’OCRE.
  7. Dans la dernière communication avec les membres du conseil consultatif et les directeurs de DYG (décrite au paragraphe 14), l’OCRE a demandé à DYG de confirmer son intention de participer à la procédure d’évaluation initiale avant le 15 mars 2023.
  8. L’OCRE n’a reçu aucune réponse aux courriels, lettres ou messages vocaux envoyés à DYG, à l’exception d’une personne qui a confirmé par courriel le 1ermars 2023 qu’elle n’était plus directrice ou membre du conseil consultatif de DYG. Bien que son nom figurait sur le site Web de l’entreprise en février 2023, une recherche récente a confirmé qu’il ne figurait plus sur la liste des directeurs et de la direction de DYG.Note de bas de page 10
  9. Le 31 mars 2023, conformément à l’article 16 du décret de l’OCRE, une ébauche du présent rapport d’évaluation initiale a été envoyée à DYG par courriel et par courrier recommandé afin que la société puisse faire part de ses commentaires. Le 27 avril 2023, la directrice générale de DYG, Ivy Chong, a répondu à partir de la même adresse de courriel que celle utilisée par l’OCRE lors de toutes ses tentatives pour transmettre la plainte. Dans sa réponse, DYG a indiqué que ses activités d’exploration minérale au Xinjiang avaient pris fin en 2008, soit, selon la société, avant la période admissible.
  10. Compte tenu de ce qui précède, il est raisonnable de conclure que DYG était au courant de la plainte dès l’étape d’admission et n’avait pas l’intention de participer à l’étape d’évaluation initiale de la procédure de plainte jusqu’à ce que la société soit invitée à fournir ses commentaires sur l’ébauche de rapport d’évaluation initiale avant que celui-ci ne soit publié.

Renseignements obtenus à partir d’études documentaires et confirmées ultérieurement par les commentaires de DYG

  1. Les renseignements suivants ont été obtenus à partir d’articles de presse et de documents d’entreprise de DYG. Le 27 avril 2023, DYG a approuvé les renseignements tout en faisant part de ses commentaires sur les faits énoncés dans l’ébauche du rapport d’évaluation initiale :
    1. En 2004, DYG a reçu un permis d’exploitation pour une « coentreprise sino - étrangère », un projet entre DYG et une société publique chinoise, XNF, et deux filiales à 100 % de XNF.Note de bas de page 11
    2. Entre 2004 et 2008, XNF et Western Gold, une filiale à 100 % de XNF, ont signé un protocole d’entente (PE) avec DYG et ont convenu de former une coentreprise minière pour financer conjointement un programme d’exploration et d’exploitation à la mine de Hatu. En juin 2005, SRK Consulting Canada a préparé une estimation des ressources pour la mine de Hatu et DYG a investi plus de 12 millions de dollars américains. Selon DYG, la société détient 70 % des intérêts dans la mine de Hatu, tandis que Western Gold détient les 30 % restants.Note de bas de page 12
    3. En 2016, Western Gold aurait introduit la mine de Hatu en bourse à Shanghai sans le consentement de DYG et sans reconnaître la propriété majoritaire de DYG dans la mine de Hatu.Note de bas de page 13
    4. En 2017, DYG aurait déposé une plainte contre XNF et Western Gold devant un tribunal du Xinjiang pour rétablir la coentreprise.Note de bas de page 14 La directrice générale de DYG, Ivy Chong, a affirmé dans le rapport du Globe and Mail que le tribunal chinois s’était prononcé contre DYG et avait décidé que XNF et Western Gold n’étaient pas obligés de former une coentreprise avec DYG.
    5. Dans son communiqué de presse publié le 13 avril 2022, DYG affirme que depuis 2008, la société n’a aucun contrôle opérationnel sur la mine de Hatu et que son partenaire de coentreprise, Western Gold, exploite la mine de Hatu et gère les relations de travail sans aucune contribution de DYG.Note de bas de page 15
    6. DYG a également déclaré que la société chercherait à obtenir un « résultat juste et équitable » pour son investissement et qu’elle envisagerait d’autres solutions, telles que la recherche d’un dédommagement de la part de son partenaire chinois. Plus récemment, le rapport de gestion de DYG déposé dans le SEDAR indique que la société « évalue la situation et étudie ses options ».Note de bas de page 16

Partie 3 — Comment traiter la plainte

  1. L’ombudsman doit décider des suites à donner à la plainte. L’ombudsman peut opter pour l’une ou l’autre des possibilités suivantes :
    1. Classer la plainte. L’ombudsman peut décider de ne pas donner suite à la plainte et de classer le dossier après la publication de ce rapport conformément à l’article 14 (2) du décret;
    2. Mener une enquête en procédant à une recherche indépendante des faits. L’ombudsman peut décider de mener une enquête et de procéder à une recherche indépendante des faits, conformément à l’article 7 (b) du décret.
  2. Pour décider s’il y a lieu d’enquêter sur une plainte, l’ombudsman prend en considération le contexte général de la plainte et les facteurs pertinents, notamment la question de savoir si :
    1. La plainte est insignifiante ou frivole.
    2. La plainte est en cours d’examen ou a été examinée par une autre instance.
    3. L’entreprise canadienne a déjà apporté une réponse ou une solution satisfaisante aux allégations contenues dans la plainte.
    4. Les renseignements pertinents pourraient être disponibles.
    5. Un recours efficace pourrait être disponible.
    6. Une enquête pourrait entraîner un risque inacceptable pour les plaignants ou d’autres personnes.
  3. Lorsqu’il est question de déterminer si des renseignements pertinents pourraient être disponibles, la coopération de l’entreprise canadienne citée dans une plainte n’est pas un facteur déterminant. L’OCRE peut prendre en considération la disponibilité des renseignements provenant de toutes les sources raisonnablement accessibles. En outre, dans tout rapport définitif, l’OCRE peut commenter les effets qu’a eus la coopération des parties sur la disponibilité des renseignements ainsi que sur d’autres aspects de l’enquête.
  4. Pour déterminer si un recours pratique ou efficace peut vraisemblablement être obtenu dans un cas approprié, l’ombudsman examinera les recours possibles.

Analyse

  1. À première vue, les allégations formulées par les plaignants soulèvent des questions graves concernant une possible violation du droit internationalement reconnu, auquel il est fait référence ou qui est traité dans les instruments suivants :
    1. Droit de ne pas être tenu en esclavage ni en servitude (article 4, Déclaration universelle des droits de l’homme, 1948) ;
    2. Droit au travail, au libre choix de son travail, à des conditions équitables et satisfaisantes de travail (article 23 (1), Déclaration universelle des droits de l’homme, 1948 ; article 6.1, Pacte international relatif aux droits économiques, sociaux et culturels, 1966) ;
    3. Droit de ne pas être astreint à accomplir un travail forcé ou obligatoire (articles 1 et 2, Convention de l’Organisation internationale du Travail sur le travail forcé, 1930 (No. 29), article 8 (3)(a), Pacte international relatif aux droits civils et politiques, 1966 ; Protocole de 2014 relatif à la convention sur le travail forcé, 1930) ;
    4. Interdiction du travail forcé ou obligatoire en tant que mesure de coercition politique ou mesure de discrimination raciale, sociale, nationale ou religieuse (article 1, Convention de l’Organisation internationale du Travail sur l’abolition du travail forcé, 1957 (No. 105)).
  2. La gravité des conséquences sur les droits de la personne de l’éventuel recours au travail forcé des Ouïghours est soulignée dans le rapport du Haut-Commissaire des Nations Unies aux droits de l’homme (en anglais seulement) publié en août 2022. Le rapport constate que des restrictions considérables, arbitraires et discriminatoires des droits de la personne et des libertés fondamentales ont été imposées aux Ouïghours et à d’autres communautés majoritairement musulmanes vivant au Xinjiang « en violation des lois et des normes internationales » et appelle les États, les entreprises et la communauté internationale à prendre des mesures pour mettre un terme à ces violations.
  3. La plainte soulève des questions sur les activités de diligence raisonnable de DYG. Les principes 14 et 17 des Principes directeurs des Nations Unies et les commentaires associés indiquent que la diligence raisonnable en matière de droits de la personne dans les zones à haut risque telles que la région du Xinjiang en Chine doit être adaptée en fonction de la nature et du contexte des activités de l’entreprise, des types de groupes vulnérables et de l’intensité et de la gravité des risques en matière de droits de la personne ; ils précisent également qu’une entreprise peut être amenée à adopter des mesures plus strictes dans un contexte d’exploitation à haut risque.
  4. En outre, les Principes directeurs des Nations Unies fournissent des directives sur la responsabilité des entreprises à faire preuve de transparence à l’égard de leurs activités de diligence raisonnable en matière de droits de la personne. Les entreprises dont les activités commerciales ou le contexte opérationnel présentent des risques d’incidences graves sur les droits de la personne sont tenues de rendre compte officiellement de la manière dont elles reconnaissent ces incidences graves sur les droits de la personne et y remédient (principe 21 des Principes directeurs des Nations Unies et le commentaire associé). Lorsque des préoccupations sont exprimées par ou au nom d’intervenants concernés ou d’autres parties intéressées, les entreprises doivent fournir des renseignements suffisants et veiller à ce que leurs rapports et leur communication soient mis à la disposition des publics visés.
  5. L’absence de contrôle opérationnel, s’il est établi à un stade ultérieur, pourrait avoir des incidences sur la capacité de DYG à cerner les risques et à prendre les mesures de gestion des risques appropriées. Cette situation soulève également des questions quant aux moyens de pression possibles de DYG. Une entreprise possède un moyen de pression lorsqu’elle est en mesure de modifier les pratiques illicites d’une entité à l’origine de la violation des droits de la personne. Les Principes directeurs des Nations Unies prévoient qu’une entreprise a l’obligation de faire pression sur son partenaire commercial dans le but de prévenir ou d’atténuer les effets négatifs sur les droits de la personne. D’autre part, si une entreprise ne dispose pas des moyens de pression nécessaires et n’est pas en mesure d’accroître son influence, elle doit envisager de mettre fin à la relation d’affaires en tenant compte des conséquences négatives potentielles de son retrait (principe 19 et le commentaire associé, Principes directeurs des Nations Unies). Le site Web de DYG, les documents d’entreprise déposés dans le SEDAR et les communiqués de presse de DYG n’indiquent pas clairement si DYG, tout en investissant dans la mine de Hatu, a usé de son influence pour s’assurer que les employés de la mine de Hatu ne comprenaient pas de Ouïghours contraints au travail forcé. Dans le cas où DYG ne disposait d’aucun moyen de pression (en particulier au vu des difficultés opérationnelles que la société a commencé à rencontrer), la question se pose de savoir si DYG a envisagé de mettre fin à la relation d’affaires avec Western Gold. Il ressort clairement du communiqué de presse (en anglais seulement) daté du 13 avril 2022 que DYG cherche toujours à obtenir un résultat « juste et équitable » pour son investissement dans la mine de Hatu.
  6. L’affirmation de DYG selon laquelle la société a mis fin à ses activités d’exploration minière au Xinjiang en 2008 ne semble pas être étayée par ses communiqués de presse datés du 25 janvier 2021 et du 13 avril 2022. Ceux-ci soulèvent au contraire des questions sur le degré de contrôle que DYG exerce sur les opérations de la mine. Le communiqué de presse de DYG (en anglais seulement) daté du 13 avril 2022 fait référence à « l’absence d’opérations en cours au Xinjiang » et au fait que DYG rencontre « des difficultés à poursuivre les opérations à la mine de Hatu ». Par ailleurs, le site Web de DYG a continué à faire référence au projet de la mine de Hatu jusqu’à une date très récente. Au moment de la rédaction de ce rapport, les renseignements figurant sur le site Web de DYG ont été révisés pour refléter le fait que les projets d’exploration de la société se limitent à l’Amérique du Nord. Malgré ces renseignements, le fait que DYG maintienne sa déclaration de participation majoritaire (70 %) dans la mine de Hatu dans ses documents d’entreprise et dans les communiqués de presse soulève des questions quant au processus et à la forme de l’arrêt des activités d’exploration minière de DYG, notamment :
    1. La question de savoir si un avis de résiliation a effectivement été émis par DYG.
    2. La question de savoir si la résiliation (alléguée par DYG) a été suivie d’une entente ou si elle a nécessité une dissolution de la coentreprise de DYG et Western Gold.
    3. La question de savoir si la résiliation a entraîné une vente ou un transfert d’intérêts, etc.
  7. Si l’ombudsman décide d’enquêter sur la plainte, DYG aura la possibilité de répondre et de participer, notamment en fournissant des renseignements supplémentaires concernant la cessation présumée de ses activités dans la mine de Hatu et/ou son degré de contrôle sur la mine de Hatu, ainsi que des renseignements sur ses activités de diligence raisonnable en matière de droits de la personne, y compris les moyens de pression.
  8. Compte tenu du contexte plus large de la plainte et des difficultés à recueillir des renseignements dans le pays, la recherche indépendante des faits peut être limitée. La disponibilité des renseignements devra être évaluée à mesure que l’enquête progressera et sera prise en compte dans tout rapport définitif.
  9. La plainte ne nomme personne ni ne rend quiconque identifiable, ce qui réduit la possibilité qu’une enquête augmente le risque pour les personnes. Si l’ombudsman décide de mener une enquête sur la plainte, une évaluation des risques sera effectuée tout au long de celle-ci.

Partie 4 — Absence de participation pleine et active de DYG

  1. À la date du présent rapport, DYG n’a fait part que de ses commentaires sur l’ébauche du rapport d’évaluation initiale. Avant cela, DYG semble avoir délibérément évité de participer et de coopérer à la procédure de résolution des litiges de l’OCRE sans fournir d’explication.
  2. Les procédures opérationnelles prévoient que la participation pleine et active à la procédure de plainte fait partie de l’exigence d’agir de bonne foi :

    L’article 11.1 exige des parties qu’elles participent pleinement à la procédure de plainte, notamment en fournissant à l’ombudsman les renseignements et les documents pertinents, en mettant les témoins à disposition dans un délai raisonnable, selon les délais établis par l’ombudsman.

    L’article 11.2 prévoit que si une entreprise canadienne ne participe pas activement à la procédure de plainte et si, entre autres, refuse de fournir des renseignements et des documents pertinents, l’ombudsman pourrait tirer les conclusions négatives ou défavorables qui conviennent durant la recherche des faits.

    L’article 12.4 prévoit que l’ombudsman peut déterminer qu’une partie qui ne participe pas activement à l’examen sans explication raisonnable n’agit pas de bonne foi.

  3. Étant donné la participation limitée de DYG jusqu’à présent dans la procédure, l’ombudsman peut examiner la question de la participation de bonne foi à un stade ultérieur. L’ombudsman peut exercer son pouvoir discrétionnaire en vertu de l’article 10 du décret qui prévoit qu’il peut faire des recommandations au ministre sur la mise en œuvre de mesures commerciales, telles que :
    1. Le retrait ou le refus de l’appui à la défense des intérêts commerciaux de l’entreprise canadienne par le ministère des Affaires étrangères, du Commerce et du Développement (connu sous le nom d’Affaires mondiales Canada).
    2. Le refus par le ministère des Affaires étrangères, du Commerce et du Développement d’appuyer à l’avenir la défense des intérêts commerciaux de l’entreprise canadienne.
    3. Le refus par Exportation et développement Canada de soutenir financièrement l’entreprise canadienne à l’avenir.

Partie 5 — Commentaires des parties

Commentaires des plaignants

  1. Le 11 avril 2023, les plaignants ont formulé les commentaires suivants concernant l’ébauche du rapport d’évaluation initiale :
    1. Le fait que DYG nie exercer un contrôle opérationnel sur la mine de Hatu ne doit pas être pris au pied de la lettre. Le communiqué de presse de DYG daté du 13 avril 2022 a été publié deux jours après le dépôt de la plainte auprès de l’OCRE et après la publication du rapport du Globe and Mail. Ces deux déclarations peuvent être « motivées par le désir de se défaire de ses responsabilités ». Le fait que DYG nie exercer un contrôle opérationnel sur la mine de Hatu et l’absence de coopération de la société avec l’OCRE illustrent l’importance de l’enquête menée par l’OCRE.
    2. Même si DYG n’exerce aucun contrôle opérationnel, il lui incombe de veiller à ce que la mine de Hatu, dont elle est propriétaire à 70 %, n’applique pas le travail forcé.
    3. Le classement de la plainte inciterait les entreprises canadiennes à ne pas coopérer avec la procédure de résolution des litiges de l’OCRE. D’autre part, tous les facteurs mentionnés au paragraphe 21 du présent rapport et le contexte général de la plainte militent en faveur d’une enquête avec recherche indépendante des faits.

Commentaires de DYG 

  1. Le 27 avril 2023, DYG a formulé les commentaires suivants concernant l’ébauche du rapport d’évaluation initiale :
    1. Les allégations contenues dans l’ébauche du rapport d’évaluation initiale ne sont étayées par aucun élément de preuve.
    2. DYG a mis fin à ses activités d’exploration minière au Xinjiang en 2008 et n’exerce plus le moindre contrôle opérationnel sur la mine. Les violations présumées des droits de la personne ont été commises plus de dix ans après le départ de DYG du Xinjiang. À l’appui de ces déclarations, DYG a joint ses communiqués de presse datés du 25 janvier 2021 et du 13 avril 2022.

Partie 6 — Décision de l’ombudsman

  1. Le 1eraoût 2022, l’ombudsman a décidé que la plainte était recevable et a informé les plaignants et DYG de sa décision par courriel. Bien que les plaignants aient participé à une réunion d’évaluation initiale le 18 novembre 2022, DYG n’a pas répondu aux lettres de l’ombudsman, excepté pour formuler des commentaires sur l’ébauche du rapport d’évaluation initiale le 27 avril 2023.
  2. La participation pleine et active des deux parties est essentielle pour faire avancer la médiation ou la recherche conjointe des faits. Bien que les plaignants aient indiqué être ouverts à toutes les options en matière de résolution des litiges, DYG déclare ne pas avoir de commentaire à formuler autre que le fait qu’elle n’a aucun contrôle opérationnel sur la mine de Hatu. Il est raisonnable de conclure que DYG n’est pas intéressée par une médiation ou une recherche conjointe des faits à ce stade.
  3. Afin de répondre aux allégations soulevées dans la plainte et à la position de DYG selon laquelle elle n’a aucun contrôle opérationnel sur la mine et que les allégations de violation des droits de l’homme ont été formulées après son départ de la région, l’ombudsman a décidé d’ouvrir une enquête et de procéder à une recherche indépendante des faits. Pour rendre sa décision, l’ombudsman s’est appuyé sur les éléments suivants.
    1. À première vue, la plainte fait état d’allégations graves concernant une éventuelle violation du droit international de la personne à ne pas être contrainte au travail forcé. La brève réponse de DYG à la plainte soulève des questions de fait qui justifient une enquête. Par exemple, les commentaires de DYG et les renseignements transmis par l’entremise des communiqués de presse de DYG n’indiquent pas que la société a mis fin à ses activités au Xinjiang depuis 2008. Les deux communiqués de presse mentionnent plutôt que les déclarations qu’ils contiennent sont des déclarations prospectives et qu’il n’existe « aucune garantie que ces déclarations soient exactes ». Comme indiqué au paragraphe 30 du présent rapport, le fait que DYG maintienne sa déclaration de participation majoritaire (70 %) dans la mine de Hatu soulève des questions quant au processus et à la forme de la cessation de ses activités d’investissement dans la mine de Hatu. Par conséquent, une recherche indépendante des faits est nécessaire pour clarifier le statut des opérations de DYG au Xinjiang.
    2. La plainte n’est pas en cours d’examen ou n’a pas été examinée par une autre instance.
    3. Afin de lutter contre le travail forcé, les sociétés minières canadiennes opérant à l’étranger doivent i) savoir comment le risque de travail forcé peut découler de leurs investissements ou de leurs activités commerciales ; ii) reconnaître la présence ou la présence potentielle de travail forcé ; iii) adopter une diligence raisonnable en matière de droits de la personne solide pour garantir une prévention et une correction efficaces du travail forcé et pour empêcher l’importation de biens issus du travail forcé ; iv) faire preuve d’une prudence accrue lorsqu’elles font des affaires ou investissent dans le Xinjiang ; v) faire pression sur leur partenaire commercial afin de prévenir et d’atténuer les risques liés au travail forcé et, en l’absence de moyen de pression, envisager une sortie responsable de l’investissement ou de la relation commerciale ; et v) enfin, communiquer efficacement leurs politiques et stratégies en matière de diligence raisonnable en matière de droits de la personne aux intervenants concernés, en particulier lorsque des plaintes sont déposées contre leurs investissements ou leurs activités commerciales dans des régions où le risque de travail forcé est élevé. Le manque de participation de DYG à la procédure de l’OCRE jusqu’à présent et la réponse de dernière minute que la société a apportée à l’ébauche du rapport d’évaluation initiale soulèvent des questions quant à la transparence de DYG à l’égard de la diligence raisonnable en matière de droits de la personne et à l’influence possible de DYG.
    4. Il est peu probable qu’une enquête entraîne un risque inacceptable pour les plaignants ou d’autres personnes. Au cours de l’enquête, DYG aura l’occasion de fournir d’autres renseignements pertinents concernant la cessation de ses activités au Xinjiang et le moyen de pression dont elle dispose sur son partenaire, Western Gold. DYG pourrait également décider de participer activement à une procédure consensuelle de résolution des litiges, telle que la médiation, à tout moment avant qu’une décision finale ne soit rendue.
    5. Une enquête avec recherche indépendante des faits pourrait s’avérer difficile compte tenu de la disponibilité des renseignements nécessaires au Xinjiang et de la coopération incertaine de DYG. Toutefois, conformément à l’article 11.8 des Procédures opérationnelles, l’ombudsman peut demander l’aide d’experts, effectuer des recherches adaptées au contexte et demander des contributions aux associations industrielles du secteur minier, aux organisations de la société civile et à d’autres personnes intéressées.

Annex-1

Les plaignants : Une coalition de 28 organisations

  1. Canadians in Support of Refugees in Dire
  2. Need (CSRDN)
  3. Alliance Canada Hong Kong
  4. Anatolia Islamic Centre
  5. Comité Canada Tibet
  6. Canadians Against Oppression & Persecution
  7. Conseil canadien des femmes musulmanes (CCFM)
  8. Conseil canadien des Imams (CCI)
  9. Canada-Hong Kong Link
  10. Médecins pour l’humanité
  11. East Turkistan Association of Canada
  12. End Transplant Abuse in China (ETAC)
  13. Centre de recherche et d’enseignement sur les droits de la personne, Université d’Ottawa
  14. Human Concern International (HCI)
  15. Islamic Circle of North America (ICNA) du Canada
  16. Islamic Society of North America (ISNA)
  17. Justice for All
  18. Lawyers for Humanity
  19. Muslim Association of Canada (MAC)
  20. Conseil national des Musulmans Canadiens (CNMC) — Centre Raoul Wallenberg pour les droits de la personne
  21. Canadian Security Research Group
  22. Share 2 Care (S2C)
  23. Stop Uyghur Genocide Canada
  24. Toronto Association for Democracy in China
  25. Union of Medical care and Relief Organizations-Canada (UOSSM)
  26. Uyghur Refugee Relief Fund
  27. Uyghur Rights Advocacy Project
  28. Vancouver Society in Support of Democratic Movement
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